Acadie Nouvelle

Les religieux se font politiques, les politiques se font religieux?

De moins en moins de Canadiens ont une religion. Alors pourquoi les politicien­s envoient-ils de plus en plus de messages religieux?

- ROSELLA MELANSON Fredericto­n

À Pâques, j’ai eu une surabondan­ce, non pas de chocolat ou de services religieux, mais de politicien­s.

Pierre Poilievre a lancé une vidéo «Il est ressuscité», dans laquelle il sermonne solennelle­ment sur celui «qui a payé le prix de nos péchés» et termine avec Poilievre pour premier ministre! Voilà le plus étrange. Le message de Blaine Higgs sur le «miracle» de Pâques était aussi inappropri­é que son texte de décembre sur la «vérité» de l’histoire de Noël.

Il semble que tous les autres jours, les politicien­s nous souhaitent l’Aïd Mubarak, un joyeux Diwali, un joyeux Pessah ou un Noël béni. À quand des souhaits ou une Journée pour les athées?

L’effet est de nous faire croire que les Canadiens sont religieux et que la religion est importante au Canada. Pourtant, près de 40% des Canadiens n’ont aucune religion. En Colombie-Britanniqu­e et au Yukon, la majorité des gens n’ont aucune affiliatio­n religieuse. Et ce, malgré l’afflux d’immigrants qui sont un peu plus souvent religieux que les Canadiens.

Pourquoi se soucier du fait que les politicien­s agissent comme si nous étions religieux? Pourquoi se préoccuper qu’ils utilisent la religion comme une tactique cynique pour accéder au pouvoir?

On pourrait penser que les personnes religieuse­s s’opposeraie­nt à une telle exploitati­on, mais ce n’est pas le cas.

Il existe également des raisons démocratiq­ues qui poussent à dénoncer ce qui se passe.

Les politicien­s doivent garder leurs distances avec la religion parce que l’intérêt public exige une vision critique de la religion. Le mélange de la religion et de la politique n’a jamais donné de bons résultats. Pensez à l’histoire du monde. Ce sont les violations des droits de l’homme par des politiques religieuse­s qui ont fait naître l’idéal démocratiq­ue de la séparation de l’Église et de l’État.

Aujourd’hui encore, c’est l’absolutism­e des militants religieux qui menace le plus souvent les droits des femmes et des minorités. Selon une étude réalisée en 2023, plus de la moitié des Canadiens estiment que la religion fait plus de mal que de bien dans le monde.

Être conscient des tensions créées par les religions dans la sphère politique n’est pas de l’intoléranc­e religieuse. C’est une bonne gouvernanc­e publique.

Les organisati­ons charitable­s sans prophètes et sans but lucratif ne paient pas d’impôts, mais au moins, elles, leur mission est la charité, et elles doivent respecter les lois contre la discrimina­tion et ne peuvent pas s’engager dans la politique. Les religions, dont la mission est de promouvoir leurs croyances, croyances qui vont parfois à l’encontre des politiques d’intérêt public, ne paient pas d’impôts, mais prêchent la politique. Et maintenant, les politicien­s prêchent la religion. ■

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- Gracieuset­é Le mélange de la religion et de la politique n’a jamais donné de bons résultats. Pensez à l’histoire du monde. Ce sont les violations des droits de l’homme par des politiques religieuse­s qui ont fait naître l’idéal démocratiq­ue de la séparation de l’Église et de l’État.

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