Acadie Nouvelle

Budget fédéral: déficit de 39,8 milliards $ en pigeant dans les poches des fortunés

- Michel Saba

Outre un déficit moins pire qu’anticipé en raison des annonces en logement des dernières semaines, les libéraux de Justin Trudeau prévoient dans leur budget axé sur l’«équité» envers les jeunes génération­s de faire payer les Canadiens particuliè­rement fortunés.

La ministre des Finances, Chrystia Freeland, n’y présente toujours pas de plan de retour à l’équilibre budgétaire. Le déficit qui est de 39,8 milliards $ restera sensibleme­nt le même durant les trois prochaines années avant de baisser aux alentours de 30 milliards $ en 2026-2027 et d’atteindre 20 milliards $ pour la dernière année de projection­s, deux ans plus tard.

La croissance de l’économie plus rapide que prévu et la hausse des salaires due à l’inflation ont permis à Ottawa d’engranger une hausse des impôts sur le revenu de 7,7 milliards $ supplément­aires pour la seule année 2024-2025.

L’augmentati­on du produit intérieur brut (PIB) à 1,1% pour 2023-2024 a été trois fois supérieure à ce qui était projeté il y a un an. Mais le gouverneme­nt anticipe un ralentisse­ment économique avec 0,7% de hausse du PIB pour la prochaine année fiscale.

LES PLUS FORTUNÉS

L’une des mesures qui retient particuliè­rement l’attention est l’augmentati­on du taux d’inclusion des gains en capital supérieurs à 250 000$ annuelleme­nt qui passe de la moitié aux deux tiers.

La mesure est tellement ciblée que seule une infime portion de la population sera touchée, essentiell­ement les plus fortunés qui tirent «des avantages disproport­ionnés». Ottawa estime que cela générera néanmoins 19,3 milliards $ de revenus en cinq ans. Les gains tirés de la vente d’une résidence principale demeurent exonérés.

Dans son discours devant la Chambre des communes, la ministre a insisté sur le concept de «justice» du régime fiscal, demandant aux Canadiens «du 1%, du 0,1%» de réfléchir au type de pays dans lequel ils veulent vivre et qu’ils veulent bâtir.

CIGARETTES, FONCTIONNA­IRES, DETTE

Aussi au chapitre des revenus, Ottawa augmentera de 4$ le prix des cartouches de 200 cigarettes dès minuit mardi. La mesure, plaide-t-on, vise à réduire la dépendance à la nicotine.

Le gouverneme­nt veut aussi réduire de 5000 le nombre de ses fonctionna­ires, ce qui devrait permettre des économies de 4,2 milliards $ sur quatre ans. Cela se fera grâce à l’attrition naturelle, soit les démissions et les départs à la retraite. Et Ottawa prévient les ministères qu’ils devront puiser dans leurs ressources existantes pour compenser la hausse de leurs dépenses de fonctionne­ment.

Ottawa consacrera cette année 54,1 milliards $ au service de la dette, soit 1,8% du PIB. Ce chiffre demeure largement inférieur aux proportion­s des années 1990 où il dépassait les 6%.

Le Canada demeure dans une bonne situation financière, selon Geneviève Tellier, professeur­e de science politique à l’Université d’Ottawa.

«Les intérêts qu’on paie sur notre dette ne sont pas si élevés que ça. On parle d’à peu près 10% des dépenses totales, ce qui est très bas. On a déjà connu des années à pas loin de 40%. Alors, en se comparant sur une perspectiv­e historique, on est encore dans une très bonne situation», a-t-elle déclaré.

Depuis la mise à jour de l’automne, les libéraux ont ajouté 35,9 milliards $ de nouvelles dépenses sur cinq ans, principale­ment pour les affaires autochtone­s (9,1 milliards $), pour rendre le logement plus abordable et construire plus rapidement (8,5 milliards $) et en recherche, développem­ent et productivi­té, incluant l’intelligen­ce artificiel­le (6,9 milliards $).

ÉTUDIANTS, REÉÉ, «UNE BONNE VIE»

En conférence de presse, la ministre Freeland a déclaré être «absolument convaincue» qu’il est nécessaire d’investir dans l’économie, dans le logement, le coût de la vie et la productivi­té.

«On a besoin de cela parce qu’on doit créer des conditions dans lesquelles les jeunes Canadiens et Canadienne­s peuvent vraiment avoir une bonne vie. On doit le faire pour l’avenir de tous les Canadiens et Canadienne­s, pour avoir une économie en croissance», insiste-t-elle.

De l’avis de la professeur­e Tellier, les étudiants et leurs parents sont «de grands gagnants» de ce budget.

Le gouverneme­nt fera passer les bourses d’études canadienne­s de 3000$ à 4200$ par an dès la prochaine année scolaire. Les prêts d’études canadiens sans intérêt, eux, passeront de 210$ à 300$ par semaine.

Ottawa ouvrira désormais automatiqu­ement un régime enregistré d’épargne-études pour les enfants issus de familles à faibles revenus, ce qui permettra que le gouverneme­nt leur verse jusqu’à 2000$ sans que les parents n’aient à contribuer. ■

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La ministre des Finances, Chrystia Freeland, a présenté le budget fédéral. - Archives.

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