Comment devenir un bon photographe
Quatre des photographes animaliers les plus réputés du Canada nous conseillent sur la réussite de grandes photos de nature.
Nous aimerions tous réussir des photos dignes des professionnels. Nous avons demandé à quatre photographes animaliers canadiens de premier plan comment obtenir d’excellents clichés dans la nature. De plus, ils nous recommandent leurs équipements préférés.
Michelle Valberg est photographe depuis 30 ans. Pendant 17 années, elle se rendait au chalet familial au lac Sharbot, en Ontario, et elle y voyait une famille de huards : toujours une mère avec deux bébés sur son dos « et pendant 17 ans, je n’ai pas été capable de prendre cette photo ».
Pour quelqu’un qui a tout photographié, des ours esprits de Colombie-Britannique aux éléphants d’Afrique, le huard commun peut sembler peu impressionnant.
Mais pour Michelle Valberg, la photographie animalière consiste à créer un lien avec l’animal. « C’est cette expression, c’est une émotion, une intimité », dit-elle.
Et cette année, avec les huards, elle a finalement capturé tout cela : « J’étais sur mon kayak et au détour d’une île j’ai trouvé un nid. Et ils m’ont simplement autorisée à rester là. »
Le fait qu’elle considère cette image comme la meilleure qu’elle ait réalisée étaye une de ses recommandations les plus importantes aux photographes débutants : « Beaucoup de gens croient qu’il faut se rendre aux confins du monde pour être un photographe de la nature… Regardez simplement dans votre cour. »
Isabelle Groc, de Colombie-Britannique, enseigne la même chose dans ses ateliers de photographie : « Plongezvous dans le monde des espèces qui vivent près de chez vous… Demandez-vous : comment puis-je photographier cette espèce? Que puis-je faire pour la rendre intéressante? »
En ce qui concerne la photographie de nature, Isabelle nous dit : « Avec les années, j’ai appris à devenir très humble et patiente… et à ne pas avoir trop d’attentes sur le terrain. » À une époque, elle avait un contrat pour Biosphère — elle contribue au périodique depuis le début de sa carrière — pour photographier des baleines franches de l’Atlantique et les baleines ne sont jamais apparues. « J’ai reçu une belle leçon. Ça m’a appris que c’est ça qui est notre réalité, en particulier si nous voulons participer à la conservation des espèces que nous aimons photographier. »
John Marriott, d’Alberta, est d’accord : « Nous tous, en tant que photographes de la nature, nous devons
être des gardiens parce que nous somme sans arrêt sur le terrain. »
Depuis 20 ans, John Marriott « raconte des histoire avec des photos » comme il le dit lui-même. Il vient de publier
Tall Tales, Long Lenses: My Adventures in Photography (Récits de légendes et longues focales : mes aventures de photographe), un livre sur sa carrière. Il conseille aux nouveaux photographes de toujours garder en tête l’enjeu de la conservation des espèces, puisque tout le monde y gagne. « Plus vous êtes vigilant, plus longue sera la rencontre. Pour moi, si j’arrive et qu’un animal fait quelque chose, et qu’il fait la même chose quand je repars, c’est la rencontre parfaite. »
La bonne nouvelle? N’importe qui peut devenir photographe de la nature. Robert McCaw, de Campbellville, en Ontario, nous le confirme : « Ce n’est pas sorcier! »
C’est surprenant, venant d’un photographe spécialiste des oiseaux, sujets particulièrement difficiles à photographier. Mais avec 30 ans d’expérience (notamment des images sur 5 timbres canadiens et des années de contribution à Biosphère), Robert McCaw a mis au point des méthodes éprouvées pour obtenir les images recherchées.
Premièrement, photographiez tout ce que vous pouvez quand vous le pouvez. Si vous faites une promenade et que vous voyez quelque chose de bon, prenez-le. « Vous ne pourrez pas y revenir, ça ne sera pas pareil. » Et même si sa préférence va aux oiseaux, Robert McCaw photographie tout ce qu’il peut trouver : « Ce qui fleurit, vole, nage, marche ou rampe », clame-t-il sur son site Web.
Robert McCaw fait écho au conseil de John Marriott sur la conservation, mais il va plus loin : plutôt que de partir sans déranger un oiseau, il attend souvent que l’oiseau s’envole avant de partir. « Il peut rester au même endroit pendant une heure », dit-il en riant, mais parfois il souhaite que l’oiseau s’envole plus rapidement.
Mais tous les photographes savent que vous n’obtiendrez pas les photos que vous voulez « si vous faites la grasse
« Les gens croient qu’il faut se rendre aux confins du monde pour être un photographe animalier… Regardez simplement dans votre cour. »
matinée », comme le dit Michelle Valberg. Longues séances, sujets récalcitrants, température maussade, « il faut beaucoup de pratique et de patience. »
Voilà une constante chez nos quatre photographes : la pratique. Comme le dit Robert McCaw, « le temps passé sur le terrain est directement proportionnel au nombre de bonnes images. Je sors rarement pour moins de quatre heures à la fois ». Quatre heures à la fois, environ trois sujets par session, plus de trente ans. Il décrit sa bibliothèque d’images ainsi : « C’est comme une collection, ça s’accumule. »
Pour obtenir la prochaine superbe photo, le travail ne s’arrête jamais pour Michelle Valberg : « J’essaie constamment de construire mon inventaire d’images, je cherche toujours quelque chose de différent. » Pour elle, cela signifie trois éléments : « La lumière, une intimité et une expression de l’animal différente de tout le reste (sur le terrain). »
En ce qui concerne la lumière, John Marriott conseille : « On pense toujours qu’il faut photographier quand le soleil est derrière nous. Laissez plutôt le soleil de côté ou même derrière l’animal… Sortez le matin à l’aube ou à la tombée de la nuit… Mélangez un peu tout. »
Quant à l’expression, il est impossible de la capturer si vous n’êtes pas au focus, ce qui est peut-être la partie la plus difficile de la photographie animalière. Isabelle Groc le souligne : « Ça semble insurmontable au début : on ne sait pas où pointer son appareil photo. » Les quatre photographes ont une réponse à ce problème : faites le foyer sur l’oeil. Selon Robert McCaw, « on n’obtient pas de bonne image si la tête n’est pas claire… Le reste du corps, on n’y peut rien ».
Si ça semble beaucoup à mémoriser d’un coup, ne vous en faites pas : l’époque est plus propice que jamais pour se mettre à la photographie de nature. D’après John Marriott, « en ce moment, le domaine connaît une forte progression ».
Même si les téléphones intelligents ne sont pas encore tout à fait prêts pour la photographie professionnelle, du moins pour des sujets aussi difficiles que la faune, il existe plusieurs options d’équipement pour un débutant. (Voyez notre article sur l’équipement à la page 30 qui contient les recommandations de nos quatre experts.)
Et Robert McCaw de conclure : « Ce n’est pas l’appareil photo qui fait le photographe; c’est l’oeil qui est derrière. » Et ça, c’est vous.a