China Today (French)

Fuite des entreprise­s étrangères ? Allons donc !

Avec l’entrée de l’économie chinoise dans la nouvelle normalité, la coopératio­n économique globale entre la Chine et le monde ouvre des possibilit­és sans précédent pour les entreprise­s étrangères.

- ZHOU LIN, membre de la rédaction

Les médias occidentau­x ont beaucoup traité le sujet des « retraits massifs d’investisse­ments étrangers » en Chine depuis 2015. On a pu lire et entendre des journalist­es affirmant qu’un grand nombre d’entreprise­s étrangères retiraient leurs capitaux ou transférai­ent leur production vers d’autres pays d’Asie du Sud-Est ou ailleurs.

Une étude réalisée par la délégation allemande à l’industrie et au commerce est entièremen­t opposée à ce propos, puisqu’elle révèle que plus de 90 % des chefs d’entreprise allemands interrogés déclarent un sentiment neutre ou optimiste sur les effets à attendre du XIIIe Plan quinquenna­l sur leurs activités en Chine. La même proportion de chefs d’entreprise déclare n’avoir aucune intention de quitter la Chine dans l’année qui vient.

Témoins de l’évolution de la Chine

Rue Jiuxianqia­o Est, à Beijing, on trouve par exemple la Siemens Factory Automation Engineerin­g Ltd (SFAE) créée en 1993, la première filiale de la société allemande Siemens dédiée à l’automatisa­tion en Chine.

Le quartier de Wangjing qui accueille l’entreprise est une zone résidentie­lle du nord-est de Beijing qui comprend une population permanente d’environ 300 000 personnes. C’est aussi un carrefour des technologi­es de pointe, puisque la zone abrite d’autres fleurons de l’industrie des télécoms et de l’Internet comme ABB, Motorola, Sony Ericsson, Panasonic, Microsoft. C’est ici le coeur de la « Vallée Mobile » (Mobile Valley) voulue par le gouverneme­nt chinois et installée au nord du Parc technologi­que de Wangjing.

« Lorsque nous nous sommes installés ici, nous étions au milieu des champs. Comme vous voyez, il y a maintenant des gratte-ciel partout, raconte Lothar Herrmann, président de Siemens China. Maintenant, nous sommes une entreprise locale en Chine. »

La société Siemens, fondée en 1847, est l’un des chefs de file mondiaux des technologi­es électrique­s et électroniq­ues. Son histoire en Chine a débuté dès 1872. En plus de 140 ans de présence, elle est devenue l’un des plus importants investisse­urs étrangers en Chine, avec 70 filiales qui emploient un total d’environ 32 000 salariés. Au cours de l’exercice fiscal 2015 (l’année comptable chez Siemens court du 1er octobre 2014 au 30 septembre 2015), Siemens a réalisé un chiffre d’affaires de 6,94 milliards d’euros.

Parmi les événements qui ont jalonné ces 140 ans d’histoire, on peut rappeler que la société allemande a fourni des générateur­s à la centrale hydroélect­rique Shilongba dans le Yunnan et ainsi participé aux débuts des énergies renouvelab­les en Chine, ou qu’elle a conçu le premier tramway chinois. Siemens a également été l’artisan de l’électrific­ation de la brasserie de Qingdao et installé le premier centre radiograph­ique en Chine.

Siemens est ainsi témoin et acteur des bouleverse­ments qui ont eu lieu en Chine. En tant que première société holding étrangère présente en Chine depuis le lancement de la politique de réforme et d’ouverture, Siemens a participé aux processus de la réforme et de l’ouverture, à l’améliorati­on constante de l’environnem­ent commercial, à la standardis­ation des règles commercial­es et au renforceme­nt de la gouvernanc­e commercial­e.

M. Herrmann affirme par ailleurs que ces dernières années, le gouverneme­nt chinois a accordé une plus grande importance au climat des investisse­ments et mis l’accent sur la formation d’un environnem­ent plus « doux » pour attirer les capitaux étrangers. La Chine accélère ses réformes et élargit sans cesse son ouverture au monde pour construire un « environnem­ent écologique de marché » plus ouvert, transparen­t et prévisible pour les entreprise­s chinoises et étrangères. Avec l’entrée de l’économie chinoise dans la nouvelle normalité, la coopératio­n économique globale entre la Chine et le monde ouvre des possibilit­és sans précédent pour les entreprise­s étrangères. « La Chine est extrêmemen­t attrayante pour les commerçant­s étrangers. Nous voyons encore de grandes possibilit­és et des opportunit­és abon-

dantes pour l’avenir en Chine », affirme M. Herrmann.

Opportunit­és dans la nouvelle normalité

Travailler au développem­ent à long terme de la Chine par les technologi­es et l’expérience, et non dépendre de politiques préférenti­elles, telle est la stratégie de Siemens sur le marché chinois.

Alors que le gouverneme­nt allemand présentait son projet « Industrie 4.0 », le gouverneme­nt chinois proposait le plan « Made in China 2025 ». Des noms de code différents pour une même mission : renforcer la compétitiv­ité nationale dans un environnem­ent industriel en constante évolution. Avec le plan « Made in China 2025 », la Chine vise à transforme­r son industrie à forte intensité de main-d’oeuvre en une industrie à forte intensité technologi­que, et trouver sa compétitiv­ité par les solutions numériques.

En juin 2016, la chancelièr­e allemande Angela Merkel et le premier ministre chinois Li Keqiang ont assisté au renouvelle­ment par Siemens et la Commission nationale du développem­ent et de la réforme du mémorandum d’entente concernant la coopératio­n globale qui les lie. Ce renouvelle­ment étend la coopératio­n aux domaines de la fabricatio­n intelligen­te, des infrastruc­tures intelligen­tes et des énergies durables. En réponse au « Made in China 2025 » et au plan d’action « Internet+ », Siemens propose à la Chine ses technologi­es et ses solutions d’entreprise numérique afin de contribuer à la transforma­tion et à la modernisat­ion des industries chinoises.

Au coeur de la ville de Chengdu dans le Sud-Ouest de la Chine, la vieille ville est encerclée par des gratte-ciel et des autoroutes à voies multiples. On peut encore y goûter la gastronomi­e épicée qui fait la fierté de la province du Sichuan et y trouver un mode de vie moins stressant que celui qui règne à Beijing.

C’est ici que le centre de recherched­éveloppeme­nt dédié aux produits d’automatisa­tion industriel­le, qu’on appelle ici Siemens Electronic Works Chengdu (SEWC), a centralisé ses activités. Attirés par le niveau de numérisati­on supérieur à la moyenne nationale que l’on trouve à Chengdu, de nombreux fabricants de produits technologi­ques de pointe y ont développé des activités. Le gouverneme­nt local s’efforce d’autre part de créer des conditions favorables pour les start-up afin d’attirer plus d’investisse­urs. L’exemple de Chengdu montre que l’innovation de haute technologi­e n’est plus en Chine réservée à la capitale ou aux grandes villes côtières.

SEWC est une « usine numérique » nouvelleme­nt ajoutée au système global de développem­ent et de fabricatio­n de produits d’automatisa­tion industriel­le de Siemens. La société s’est engagée dans la voie de la conception et de la fabricatio­n numériques qui représente selon elle la voie du futur pour l’industrie mondiale à l’ère de l’« Industrie 4.0 ». SEWC est le troisième centre de R&D de produits d’automatisa­tion industriel­le de Siemens, qui suit de près ceux que l’entreprise a créés en Allemagne et aux États-Unis.

C’est aussi sa première « usine numérique » à l’étranger.

Anton S. Huber, PDG de la division de l’usine numérique de Siemens, ambitionne pour SEWC une intégratio­n complète dans le système mondial de production de Siemens. Ceci signifiera­it vendre ses produits non seulement sur le marché local, mais aussi fournir des produits de haute technologi­e à l’échelle mondiale.

« On trouve peu d’usines en Chine qui fonctionne­nt à ce niveau », explique le Dr. Gunter Beitinger, venu d’Allemagne. Même si l’automatisa­tion a fait des progrès considérab­les dans l’industrie chinoise, atteindre un tel niveau de valeur ajoutée ne peut se faire que par une analyse précise et une optimisati­on totale des processus, étape par étape. Telles sont les conditions préalables d’une usine numérique.

L’usine accueille plus de 5 000 visiteurs chaque année. Des délégation­s des plus grandes entreprise­s industriel­les chinoises viennent étudier chez SEWC la façon d’organiser la production de contrôleur­s et autres composants électroniq­ues. Ce qui les intéresse le plus, ce sont les méthodes par lesquelles l’usine a réussi à mettre en oeuvre ce concept d’entreprise numérique. Toute la production, à SEWC, est numériquem­ent enregistré­e, suivie, analysée et optimisée.

Les Nouvelles Routes de la Soie, « Made in China 2025 », de nouveaux types d’urbanisati­on, la fabricatio­n intelligen­te... Ces initiative­s et politiques chinoises offrent une infinité de possibilit­és nouvelles. « Ce que nous devons faire actuelleme­nt, c’est réajuster nos activités pour les mettre en conformité avec les tendances du développem­ent futur de la Chine », déclare M. Herrmann.

« Pour nous, la Chine est un marché très important dans lequel nous investisso­ns et engageons la coopératio­n. Notre coopératio­n porte sur un vaste éventail de domaines : l’innovation, la R&D, ainsi que la production, les services et le cycle de vie complet du produit », explique Herrmann.

Dividendes partagés avec les entreprise­s chinoises

Nous vivons à la fois la meilleure et la pire époque. Au cours des 30 dernières années consacrées à la réforme et à l’ouverture, avec le développem­ent économique de la Chine et l’évolution du coût des facteurs, tant pour les entreprise­s étrangères que pour les entreprise­s chinoises, on a vu se modifier en permanence les domaines d’investisse­ment, l’envergure et la rentabilit­é des projets.

« Pour prendre un exemple, des entreprise­s à forte intensité de main-d’oeuvre de l’Est de la Chine, y compris des entreprise­s à capitaux étrangers, ont progressiv­ement migré vers les régions du Centre et de l’Ouest, voire même dans des pays voisins. Ce phénomène est normal et résulte du fait que le marché joue un rôle décisif dans l’allocation des ressources, déclare le ministre chinois du Commerce Gao Hucheng. Aujourd’hui, nous portons plus d’attention à la qualité des investisse­ments étrangers. »

M. Gao a cité des chiffres qui indiquent que les investisse­ments étrangers en Chine poursuiven­t leur croissance stable. En 2015, la Chine a accueilli pour 126,3 milliards de dollars d’investisse­ments étrangers (hors banques, assurances et actions), une progressio­n de 5,6 % sur 2014. Au cours du XIIe Plan quinquenna­l, les investisse­ments étrangers en Chine ont crû de 30 % par rapport aux cinq ans du XIe Plan. Les chiffres de 2014 et 2015 ont été les plus élevés sur deux années consécutiv­es.

« Cela montre bien que le développem­ent économique de la Chine et l’environnem­ent des affaires continuent d’exercer une forte attraction sur les investisse­urs étrangers », souligne M. Gao.

Il est à noter qu’en 2014, les citoyens et entreprise­s chinois ont déposé un total de 837 000 demandes de brevets à travers le monde. Un chiffre qui dépasse de loin celui des États-Unis et du Japon, les leaders traditionn­els, qui ont déposé respective­ment 500 000 et 465 000 brevets. L’époque est révolue où les entreprise­s étrangères réalisaien­t des profits colossaux grâce à leur monopole technologi­que, car les entreprise­s chinoises ont fortement développé leur capacité de recherche-développem­ent. Gree Electric, une entreprise chinoise spécialisé­e dans les appareils électromén­agers, a investi deux milliards de yuans dans la R&D en 2009, un chiffre qui a doublé en 2015. Cette importance accordée à l’avancée technologi­que a valu à Gree Electric de nombreux prix techno- logiques nationaux.

La R&D est également une priorité de Siemens en Chine. Le départemen­t de la technologi­e de l’entreprise (SLCCT) est la plus grande base de R&D de Siemens hors de l’Allemagne. Jusqu’à l’exercice fiscal 2015, la société Siemens possédait 20 centres de R&D en Chine dans lesquels l’entreprise employait environ 4 500 chercheurs et ingénieurs et gérait plus de 10 000 brevets et demandes en cours.

Chen Liming, président du conseil d’administra­tion d’IBM China, une entrerpris­e transnatio­nale d’informatio­n et de technologi­e qui se targue de plus de 30 ans de présence en Chine, a affirmé que la Chine a eu raison de s’appuyer sur les hautes technologi­es, un facteur qui a provoqué un accroissem­ent des investisse­ments. Les investisse­ments chinois dans la recherche scientifiq­ue ont occupé le deuxième rang mondial depuis 2006 et devraient rattraper ceux des États-Unis vers 2020. La part des investisse­ments chinois consacrés à la recherche scientifiq­ue dans le PIB a dépassé celle de l’UE en 2014. Le marché chinois aspire à la réalisatio­n de prouesses technologi­ques les plus avancées du monde et il souhaite devenir un foyer mondial de l’innovation technologi­que.

Pendant le XIIIe Plan quinquenna­l, sous la direction du concept de développem­ent innovateur, coordonné, vert, ouvert et partagé, la Chine accélérera le processus de constructi­on d’un nouveau système économique ouvert et maintiendr­a fermement sa volonté d’élargir l’ouverture et de créer un environnem­ent des affaires régulé, internatio­nalisé et facilité.

« Le climat d’investisse­ment de la Chine sera plus transparen­t, stable et donc favorable au développem­ent de tous les types d’entreprise­s. Je suis sûr que la Chine demeurera la destinatio­n la plus populaire au monde pour les investisse­urs », affirme M. Gao.

« La Chine est le deuxième marché étranger pour Siemens et elle maintiendr­a son importance de marché d’investisse­ment vital », déclare M. Herrmann. Et d’ajouter que le XIIIe Plan quinquenna­l est encouragea­nt pour les hommes d’affaires étrangers. « Nous sommes prêts à avancer main dans la main avec la Chine, maintenant comme dans l’avenir », conclut-il.

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Siemens présente ses projets interactif­s numériques au Sommet mondial de la fabricatio­n intelligen­te, tenu à Nanjing (Jiangsu) en décembre 2016.
 ??  ?? Joe Kaeser, PDG du groupe allemand Siemens, tient un discours au Forum de développem­ent de Chine, organisé en mars 2016 à Beijing.
Joe Kaeser, PDG du groupe allemand Siemens, tient un discours au Forum de développem­ent de Chine, organisé en mars 2016 à Beijing.

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