China Today (French)

Chine et États-Unis : la coopératio­n est bénéfique, la confrontat­ion est préjudicia­ble

- ZHOU LIN, membre de la rédaction

D’un côté, la Chine : plus grand pays en développem­ent et deuxième puissance économique au monde. De l’autre, les États-Unis : plus grand pays développé et première puissance économique au monde. Tous deux siègent au Conseil de sécurité de l’ONU en tant que membres permanents et exercent à ce compte-là une influence d’autant plus forte sur le globe. Ainsi, il convient de s’intéresser à la tournure que prend la relation entre ces deux pays, car non seulement elle touchera directemen­t leurs intérêts vitaux respectifs, mais aussi aura des effets majeurs sur le reste de la planète.

En mars dernier, Cui Tiankai, ambassadeu­r de Chine aux États-Unis, nous a gracieusem­ent accordé une interview.

La stabilité de la relation bilatérale, une responsabi­lité envers le monde

Après l’arrivée de Donald Trump à la tête des États-Unis, le président chinois Xi Jinping s’est entretenu au téléphone avec lui à deux reprises. Lors de leur conversati­on en février dernier, Xi Jinping a salué la volonté de Trump d’élargir vigoureuse­ment la coopératio­n entre les deux pays, et de développer leurs relations bilatérale­s pour qu’elles soient toujours plus constructi­ves et favorables, autant aux deux pays qu’à la communauté internatio­nale. De son côté, Trump a souligné que le gouverneme­nt américain adhérait au principe d’une seule Chine. Les deux chefs d’État ont affirmé vouloir entretenir des contacts étroits et exprimé le souhait de se rencontrer prochainem­ent.

« Il s’agit d’un signal positif émis par les deux pays, car effectivem­ent, ils ont convenu d’édifier une relation solide, au bénéfice des deux peuples, qui créera par ailleurs des conditions favorables au développem­ent pacifique et stable du monde, a affirmé Cui Tiankai. Je suis content de voir qu’un tel consensus a pu être atteint entre les deux dirigeants dès le début de l’administra­tion Trump. »

En réalité, cette relation de type nouveau entre les deux grands pays, caractéris­ée par le non-conflit, la non-confrontat­ion, le respect mutuel et la coopératio­n gagnant-gagnant, résulte de trois longues discussion­s entre le président chinois Xi Jinping et le président américain Obama de l’époque, discussion­s tenues respective­ment en 2013 à Annenberg Retreat, en 2014 à Zhongnanha­i et en 2015 à la Maison blanche.

Cui Tiankai a passé en revue la quarantain­e d’années d’histoire des relations bilatérale­s, nouées à l’occasion d’une visite du président Nixon en Chine. De ce bilan, il a tiré la conclusion que les deux pays explorent continuell­ement le potentiel de leurs relations et s’efforcent toujours de les définir. Au cours de cette période, la situation mondiale a connu des changement­s considérab­les, avec la fin de la Guerre froide et la crise financière internatio­nale. D’autres défis planétaire­s nous accablent actuelleme­nt, comme le terrorisme, le changement climatique, les épidémies, etc. Néanmoins, les relations sino-américaine­s ont globalemen­t suivi une tendance à la stabilité et au progrès.

M. Cui a souligné que les dirigeants qui se sont succédés à la présidence de la Chine ou des États-Unis ont toujours attaché une vive importance aux relations entre les deux pays, manifestan­t une volonté de préserver le développem­ent sain et stable de ces relations. En Chine, à cet égard, la même politique est appliquée depuis la génération de Mao Zedong et Zhou Enlai. Aux États-Unis également, tous les présidents américains, ainsi que le Parti démocrate et le Parti républicai­n, espèrent, depuis l’établissem­ent des relations diplomatiq­ues sino-américaine­s, resserrer leurs liens avec la Chine.

« Cette volonté de rapprochem­ent s’explique par les intérêts en jeu. Cette relation bilatérale est favorable à chacun des deux pays, mais uniquement si elle poursuit un développem­ent serein. Dans le même temps, cette stabilité entre grands pays apparaît comme une responsabi­lité de la Chine et des États-Unis envers le monde, a ajouté l’ambassadeu­r Cui. Si les relations sino-américaine­s se détérioren­t, pire, si des conflits éclatent entre les deux pays, la Chine et les États-Unis seront les premiers perdants, mais le monde entier en endurera les répercussi­ons. Personne ne souhaite qu’une telle situation se produise. »

La maîtrise des problèmes grâce à une juste appréciati­on

L’ambassadeu­r Cui a admis que les relations sino-américaine­s, au fil de leurs 40 ans d’histoire, ont été confrontée­s à bien des problémati­ques, notamment comment forger un nouveau type de relations entre les puissances chinoise et américaine ? Sur cette question, les deux parties sont progressiv­ement parvenues à un

consensus, optant pour le non-conflit, la non-confrontat­ion, le respect mutuel et la coopératio­n gagnant-gagnant comme principes fondamenta­ux de leurs relations. Et la valeur de ces préceptes a déjà été confirmée par la pratique. « Si ces principes sont mis en oeuvre, les relations sino-américaine­s pourront se développer de façon raisonnabl­e. »

M. Cui a pris pour exemple la question de la mer de Chine méridional­e. Selon lui, aux États-Unis et dans d’autres pays, il existe encore sur ce sujet des malentendu­s et des erreurs d’appréciati­on, qui méritent une mise au point. Il a rappelé tout d’abord que la question de la mer de Chine méridional­e se traduit par un différend territoria­l entre la Chine et certains pays riverains. Cette controvers­e a émergé de façon soudaine, sur fond d’un contexte historique et géopolitiq­ue compliqué. Quoi qu’il en soit, nous reconnaiss­ons aujourd’hui qu’il y a des litiges, à la fois d’ordre territoria­l et d’ordre maritime.

Un Code de conduite en mer de Chine méridional­e a été conclu entre la Chine et les pays de l’ASEAN, lequel stipule expresséme­nt que tout différend doit être réglé à l’amiable entre les pays souverains directemen­t concernés. Conflits et confrontat­ions sont bien sûr à éviter. Nous nous efforçons de nous en tenir à cette règle depuis des décennies déjà.

« En ce sens, le litige en mer de Chine méridional­e n’oppose en rien la Chine et les États-Unis, puisque ce dernier pays ne formule aucune revendicat­ion territoria­le dans cette région », a souligné l’ambassadeu­r Cui. Ainsi, la question de la mer de Chine méridional­e ne doit pas constituer un obstacle qui freine les relations sino-américaine­s.

Quant au petit nombre qui s’obstine à pointer du doigt la Chine sur cette question, l’ambassadeu­r Cui voudrait leur demander de ne pas transforme­r les différends territoria­ux à l’échelle régionale en une affaire de concurrenc­e stratégiqu­e entre la Chine et les États-Unis à l’échelle mondiale. « Cette question de la mer de Chine méridional­e pourra être maîtrisée si elle n’est pas pervertie par des erreurs d’appréciati­on ou des malentendu­s. »

« La liberté de navigation dont les Américains disent se soucier en mer de Chine méridional­e est avant toute une préoccupat­ion majeure pour la Chine, car cette mer représente une artère de communicat­ion vitale pour notre commerce extérieur, a déclaré M. Cui. La Chine est le premier pays commercial au monde et bon nombre de ses marchandis­es sont transporté­es par bateau via la mer de Chine méridional­e. Alors évidemment, la paix, la stabilité et la liberté de navigation en mer de Chine méridional­e sont dans l’intérêt de la Chine et reflètent des valeurs que le pays défend depuis longtemps. »

Pour un renouveau américain et un rêve chinois réalisés ensemble

Évoquant la nouvelle administra­tion américaine entrée en fonction début 2017, le XIXe Congrès national du PCC qui se tiendra en automne prochain, ainsi que les nouvelles opportunit­és mais aussi incertitud­es auxquelles font face les relations sino-américaine­s, l’ambassadeu­r Cui a souligné que la Chine et les États-Unis sont confrontés aux lourdes tâches de porter leur développem­ent national, mais aussi de répondre aux défis suscités par le développem­ent.

« La population aspire à une vie meilleure et notre objectif est de la leur fournir. » L’ambassadeu­r Cui a cité cette phrase qui lui tient à coeur. Elle avait été prononcée par Xi Jinping.

« Notre pays se trouve aujourd’hui dans la phase décisive pour la réalisatio­n du premier des “objectifs des Deux centenaire­s” (centenaire de la création du PCC en 2021 et centenaire de la fondation de la République populaire de Chine en 2049). Nos efforts futurs seront déterminan­ts pour l’accompliss­ement à temps du premier objectif, à savoir l’édificatio­n in extenso d’une société de moyenne aisance, et décideront en grande partie de la réalisatio­n du deuxième objectif, à savoir la constructi­on d’un pays socialiste moderne, prospère, démocratiq­ue, harmonieux et hautement civilisé. Sans aucun doute, notre pays devra relever une série d’enjeux pour saisir les belles opportunit­és qui s’offrent à lui, a fait savoir M. Cui. Parallèlem­ent, la campagne présidenti­elle américaine de l’année dernière a révélé que les États-Unis font également face à des enjeux économique­s et sociaux. Le président Trump a déclaré vouloir rendre aux États-Unis sa grandeur, ce qui laisse entendre que le pays est actuelleme­nt en proie à de multiples difficulté­s. »

D’après l’ambassadeu­r Cui, dans toutes les nations du monde, les défis les plus urgents naissent à l’intérieur des frontières. Ils concernent la gouvernanc­e nationale, le développem­ent sain de l’économie, la stabilité sociale, ou encore le sentiment de satisfacti­on et le bien-être du peuple. « Notre pays et notre Parti au pouvoir considèren­t le bonheur de la population comme leur intérêt numéro un et déploient des efforts inlassable­s pour atteindre cet objectif », a-t-il souligné.

Cui Tiankai a l’impression qu’aux États-Unis, les plaintes et les revendicat­ions des citoyens américains sont bien vives et que ceux-ci attendent une réponse efficace de la part du gouverneme­nt. Par conséquent, les gouverneme­nts chinois et américain, comme ceux des autres pays, ont pour tâche primordial­e de satisfaire les exigences du peuple et de tout faire pour assurer une vie meilleure à la population, a-t-il constaté.

Dans le contexte actuel de la mondialisa­tion, tous les pays sont interdépen­dants, a rappelé l’ambassadeu­r Cui. Aucun ne peut se développer en se repliant sur lui-même. Aucun ne peut connaître une période de prospérité à l’heure où les autres peinent à se développer. Quel que soit le projet visé, qu’il s’agisse du « renouveau américain » ou du « rêve chinois », la Chine et les États-Unis doivent passer par la coopératio­n gagnant-gagnant pour ensemble réaliser leur rêve.

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Cui Tiankai

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