Dans les médias chinois
Les frictions commerciales sino-américaines : quel bénéfice ?
Fidèle à son credo « l’Amérique d’abord », le président Trump projette de réduire de 500 milliards de dollars le déficit commercial enregistré par les États-Unis. Pour que son parti obtienne des voix aux élections de mi-mandat qui approchent, le président Trump élabore tout un jeu commercial dans lequel il qualifie la Chine d’adversaire. Les frictions commerciales ont commencé à partir du moment où l’État américain a imposé des droits de douane sur les importations chinoises d’acier et d’aluminium. Par la suite, invoquant le motif que la Chine ne respectait pas les droits de propriété intellectuelle américains, le président Trump a annoncé qu’il infligerait des droits de douane sur les importations chinoises d’une valeur supérieure à 60 milliards de dollars. La Chine a immédiatement réagi, en déclarant que des taxes équivalentes seraient appliquées sur certains produits originaires des États-Unis.
D’un point de vue externe, il semblerait que ces frictions commerciales tendent de plus en plus à dégénérer en véritable guerre commerciale. Et selon moi, il s’agit là de manigances de la part du président Trump, qui tente de récolter un certain soutien en vue des prochaines élections. Prenons l’exemple de l’acier. Les importations des États-Unis en provenance de la Chine représentent tout au plus 2 % du total des importations américaines. Par conséquent, les restrictions imposées n’auront que peu d’effets. Intéressons-nous maintenant à la propriété intellectuelle. Beaucoup d’entreprises actives dans la Silicon Valley et à la pointe d’industries innovantes, telles que l’intelligence artificielle ou l’informatique, ont démarré des activités en Chine, dans la perspective de revendre les produits finis aux États-Unis. Or, si cette catégorie de produits importés est frappée par des droits de douane, je vois mal quel bénéfice pourraient en tirer les États-Unis. Au contraire, il convient plutôt de rappeler que le peuple américain, jusqu’à présent, a pu bénéficier de produits chinois bien moins chers. Actuellement, les prix augmentent progressivement, certainement au plus grand désarroi du peuple américain.
Le rétablissement des entreprises sidérurgiques américaines serait le bienvenu, puisqu’il ferait souffler un vent favorable pour Trump en cette période électorale. Cependant, cet événement ne sera pas nécessairement bénéfique pour le peuple américain. Parallèlement, les produits importés depuis les États-Unis affichent des prix en hausse, ce qui, là encore, ne sera nullement avantageux pour le peuple chinois. Poussons l’analyse un peu plus loin : si les deux pays dressent des barrières tarifaires à proportions égales, comme la population chinoise est bien plus nombreuse que celle des ÉtatsUnis, en moyenne, le fardeau supporté par un individu chinois sera évidemment plus léger que celui supporté
par un individu américain. J’estime donc, en me positionnant du côté de la société, que ces frictions commerciales n’apporteront rien de bon aux ÉtatsUnis et affecteront peu la Chine.
Comment le Japon va-t-il réagir face aux tensions commerciales sino-américaines ? Métaphoriquement parlant, si la Chine ou les États-Unis toussent, le Japon risque lui aussi de s’enrhumer. Dernièrement, le président américain Trump a rencontré le premier ministre japonais Shinzo Abe. Mais ce n’est pas pour autant que le Japon a été ajouté à la liste des pays exemptés de droits de douane. Shinzo Abe a fait tout son possible pour que les États-Unis reviennent sur leur décision de ne pas signer le futur Accord de partenariat transpacifique (TPP). Mais le président Trump préfèrerait que le Japon et les États-Unis mènent des négociations commerciales bilatérales, plutôt que dans un cadre commercial multilatéral. Je crains vivement que le Japon n’en fasse les frais.
Après les Accords du Plaza, le Japon s’est félicité de l’appréciation du yen par rapport au dollar, se vantant même de pouvoir acheter de vastes demeures aux ÉtatsUnis. Mais le Japon, autrefois paradis des exportations, a finalement été contraint par les États-Unis de fermer ses portes. Cet épisode de l’histoire rappelle qu’il est toujours mieux de maintenir un marché ouvert aux échanges. C’est pourquoi je préconise la construction d’une « communauté d’Asie de l’Est ». Toutefois, il est clairement impossible de tracer un petit cercle pour définir cette communauté en Asie de l’Est, tout en poursuivant un développement économique prônant l’exclusivisité. Les pays d’Asie de l’Est doivent s’épauler et garantir la stabilité politique à travers la coopération, afin d’empêcher qu’une guerre n’éclate et de permettre le développement stable de toute la région dans un climat de paix. Le concept de « communauté d’Asie de l’Est » désigne l’établissement d’une plate-forme de coopération réunissant tous les pays de la région, utile pour trouver des solutions et résoudre les problèmes par voie de délibération. Une telle plate-forme en Asie de l’Est favoriserait inévitablement la paix mondiale et le développement économique. C’est ainsi que j’envisage la « communauté d’Asie de l’Est », un projet qui demeure l’un de mes souhaits les plus chers.
À l’époque, la Chine avait décidé de ne pas signer les Accords du Plaza ratifiés par le Japon. La raison semble évidente d’après moi : la Chine avait commencé à prendre ses précautions pour éviter de réitérer les erreurs passées. Récemment, le président Xi Jinping a de nouveau souligné l’importance de renforcer la libéralisation des échanges. J’ai eu l’occasion de rencontrer le président Xi à plusieurs reprises. J’ai également écouté attentivement le discours qu’il a tenu à l’occasion du Forum de « la Ceinture et la Route » pour la coopération internationale. À mon sens, le concept « la Ceinture et la Route » partage de nombreuses similitudes avec l’idée de bâtir une « communauté d’Asie de l’Est », à la différence que le programme de Xi Jinping est encore plus ambitieux. Je me réjouis de voir que ces deux projets prennent une même direction.
Les projets « la Ceinture et la Route » et la « communauté d’Asie de l’Est » cherchent à parvenir au même résultat par des moyens différents, mais tous enracinés dans la coopération entre les différentes nations, afin d’amener le développement économique dans les pays en développement. Entre-temps, le président Xi Jinping a clamé haut et fort qu’il fallait construire une communauté de destin pour l’humanité, un moyen efficace pour parvenir à la paix. Le monde prend la forme d’une communauté de destin où chacun doit coopérer pour faire advenir une situation gagnant-gagnant. Je suis amplement d’accord avec cette idée. Le projet consistant à fonder la « communauté de l’Asie de l’Est » en vue d’instaurer un climat de paix dans cette région est d’ailleurs taillé dans le même bois.
Je reviens au sujet des frictions commerciales. Selon moi, le Japon et la Chine, sans oublier les États-Unis, doivent absolument entreprendre des négociations en matière économique et dans les autres domaines. L’harmonie entre le Japon, les États-Unis et la Chine est cruciale pour le monde. J’estime que le Japon devrait véritablement prendre part aux diverses interactions qui ont lieu aujourd’hui entre la Chine et les États-Unis, afin de déterminer sur cette base les méthodes visant à stabiliser les relations entre les trois pays.
Le président Trump continue de scander son slogan de campagne « l’Amérique d’abord ». Si les États-Unis peuvent se développer en concrétisant cette idée, alors tant mieux. Toutefois, ce n’est pas en écartant les produits chinois et japonais que les États-Unis couleront des jours plus heureux. Aujourd’hui, à l’heure où la mondialisation se développe, les barrières entre les nations disparaissent progressivement. Dans ce contexte, le peuple américain et les entreprises américaines devraient chercher à tirer leur épingle du jeu en Chine ou au Japon. Si, ce faisant, les États-Unis engrangeaient des profits colossaux, le niveau de vie général des citoyens américains augmenterait. Peut-être est-ce la véritable question à considérer à l’heure actuelle ? D’après moi, pour atteindre cet objectif, nous devrions envisager d’institutionnaliser les relations de coopération entre les trois nations. Les trois pays devront alors accomplir sans cesse de nouvelles réalisations sans se reposer sur leurs lauriers. Au moment opportun, ils devront inviter la Corée du Sud à participer aux échanges, pour réfléchir ensemble à la voie à suivre pour parvenir à l’harmonie des uns et des autres. Ce progrès aurait un impact colossal dans toute l’Asie, voire dans le monde entier. Article paru initialement dans la revue People’s China
Pour que son parti obtienne des voix aux élections de mi-mandat qui approchent, le président Trump élabore toute une stratégie commerciale dans lequel il qualifie la Chine d’adversaire.
le trafic de drogues, ainsi que des plans annuels dans le domaine de la sécurité, tout en organisant des manoeuvres militaires conjointes pour renforcer la confiance mutuelle.
La relance de l’« intégration régionale » en Asie centrale, exclusive des grands pays voisins, répond aux propres besoins de cette zone tout en étant guidée par certaines forces extérieures. Il pourrait en résulter une « certaine distance » des pays d’Asie centrale à l’égard de l’OCS. Celle-ci est par ailleurs confrontée à d’autres défis tout aussi réels : à tout moment, de nouveaux bouleversements pourront se produire alors que la question de l’Afghanistan et celle de la « crise nucléaire » iranienne demeurent jusqu’à aujourd’hui sans solution ; il ne faudrait pas non plus sous-estimer l’opposition constante entre l’Inde et le Pakistan, deux pays qui font courir un risque nucléaire. Les aléas de la situation économique et sécuritaire internationale créent aussi de nouveaux problèmes majeurs qui mettent à l’épreuve l’unité interne de l’OCS et sa force de cohésion. La meilleure réponse à toutes ces difficultés consiste certainement à renforcer l’efficacité du processus de décision à travers ses mécanismes multilatéraux et ses capacités d’action. Il importe pour l’OCS de veiller à bien résoudre les problèmes intérieurs de la région pour éviter que les contradictions entre ses États membres ne soient amplifiées, et de jouer sur la scène internationale son rôle exemplaire de guide en combattant les actes unilatéralistes de certaines puissances occidentales qui ambitionneraient de consolider leurs hégémonies.
Servir d’exemple pour la construction d’une communauté de destin pour l’humanité
En raison de la grande différence entre la puissance économique et l’importance des ressources naturelles de ses États membres, ainsi que des degrés différents de participation au commerce international et à la division du travail transnationale, certains de ses États membres montrent peu d’enthousiasme pour la coopération économique multilatérale dans le cadre de l’OCS, qui accuse un certain retard dans ce domaine. L’Inde et le Pakistan, en tant que nouveaux membres, auront besoin de temps pour se familiariser progressivement avec les procédures de l’OCS et suivre ses règles de conduite ; il leur faudra aussi du temps pour traiter correctement leurs différends historiques et leurs contradictions et conflits avec d’autres États membres.
L’année 2018 est la première qui suit la tenue victorieuse du XIXe Congrès du Parti communiste chinois, et marque aussi le 5e anniversaire de l’importante initiative « la Ceinture et la Route ». La Chine, qui suit fidèlement le concept de la diplomatie de grand pays à la chinoise, souhaite plus que jamais apporter sa contribution au développement et à la stabilité de la région et du monde dans son ensemble. La proposition des dirigeants chinois sur la construction d’une communauté de destin pour l’humanité et d’un nouveau type de relations internationales a aussi indiqué l’orientation à suivre pour l’OCS dans les années à venir. Dans ce nouveau contexte historique, l’« esprit de Shanghai » s’est enrichi de nouveaux contenus. Au vu des efforts conjoints de ses membres qui ont des cultures et des systèmes sociaux différents, l’OCS pourra servir d’exemple à la construction d’une communauté de destin. En tant que première organisation internationale baptisée avec le nom d’une ville chinoise, l’OCS porte depuis sa création des « empreintes chinoises ». Ces 17 dernières années, la Chine a non seulement orienté la coopération multilatérale en matière d’idée directrice, de voie à suivre et d’objectifs à atteindre, mais elle a encore proposé des projets concrets et des mesures énergiques en apportant des contributions substantielles et en assumant une plus grande part de responsabilités. Par exemple, elle a consenti, dans le cadre de l’OCS, un prêt préférentiel de 22 milliards de dollars, fondé le premier Comité de bon voisinage et de coopération amicale et créé le Centre de protection environnementale dans le but de promouvoir une « amitié éternelle » entre les États membres, d’élargir les échanges entre les peuples, d’asseoir la coopération régionale sur des bases populaires plus solides et de créer ainsi un meilleur environnement pour les populations.
L’OCS considère que les initiatives majeures proposées par les dirigeants chinois, telles que l’initiative « la Ceinture et la Route » et la construction d’une communauté de destin pour l’humanité, sont des nouvelles forces motrices de développement. En effet, les États membres et observateurs de l’OCS sont tous des pays riverains de « la Ceinture et la Route », et sont liés par une amitié millénaire scellée sur la Route de la Soie et par des partenariats d’entraide mutuellement bénéfiques bâtis dans la conjoncture mondiale actuelle. En 2013, le président Xi Jinping a avancé à Astana, au Kazakhstan, cette proposition majeure de construire « la Ceinture économique de la Soie », proposition qui a exercé, en quelques années, une influence mondiale, apporté d’immenses opportunités de développement à l’OCS et établi une importante plate-forme pour l’interconnexion des stratégies des pays concernés dans le cadre de « la Ceinture et la Route ». À l’avenir, l’OCS établira non seulement une barrière de sécurité solide pour les pays de la région et un pont d’échanges économiques et culturels, mais ouvrira aussi une nouvelle voie de coopération régionale et jouera un rôle irremplaçable dans la transformation du système de gouvernance mondiale et la construction de la communauté de destin pour l’humanité. *SUN ZHUANGZHI est directeur de l’Institut de recherches sur la Russie, l’Europe de l’Est et l’Asie centrale relevant de l’Académie des sciences sociales de Chine et directeur exécutif du Centre chinois de recherches de l’OCS.
L’OCS considère que les initiatives majeures proposées par les dirigeants chinois, telles que l’initiative « la Ceinture et la Route » et la construction d’une communauté de destin pour l’humanité, sont des nouvelles forces motrices de développement.