China Today (French)

Vu de Chine

- MA LI, membre de la rédaction

La nouvelle révolution industriel­le

Jeremy Rifkin, futurologu­e et auteur du livre La troisième révolution industriel­le, a indiqué dans une récente interview : « La nouvelle révolution industriel­le est une transition générale des infrastruc­tures, systématis­ée et numérisée … Je pense que la Chine va mener la troisième révolution. » À la différence de la première révolution industriel­le, marquée par la mécanisati­on de l’industrie textile, et de la deuxième révolution industriel­le, marquée par le fordisme, la troisième révolution industriel­le se caractéris­e par la fabricatio­n numérisée et l’utilisatio­n de nouveaux matériaux.

Du 25 au 27 mai, à Hefei (capitale de l’Anhui), s’est tenue la World Manufactur­ing Convention 2018. Elle a réuni des représenta­nts issus des gouverneme­nts de pays d’Asie, d’Afrique, d’Europe, d’Amérique du Nord, d’Amérique du Sud, ainsi que d’organisati­ons internatio­nales et de chambres commercial­es. Des produits et techniques sophistiqu­és de l’industrie manufactur­ière mondiale y ont été exposés.

Les trains à grande vitesse réduisent les distances, les voitures partagées facilitent le transport, les robots de comptabili­té accompliss­ent en quelques secondes le travail qu’un humain réaliserai­t en 360 000 heures… Les retombées de la nouvelle révolution industriel­le, basée sur les sciences et la technologi­e, sont d’une ampleur sans précédent. L’innovation et l’applicatio­n des nouvelles technologi­es ont créé un nouveau marché, mais ont aussi redéfini la ligne de développem­ent des industries ; elles sont en train de remodeler le contexte concurrent­iel de l’industrie manufactur­ière mondiale.

La fabricatio­n intelligen­te de la nouvelle génération

« L’applicatio­n des techniques intelligen­tes de la nouvelle génération est à l’origine de la transforma­tion des modèles industriel­s », affirme Zhong Zhihua, membre de l’Académie d’ingénierie de Chine et président de l’université Tongji. Les industries ne sont plus axées sur les produits, mais sur les clients. La production à grande échelle est en train d’être abandonnée. L’industrie va se tourner vers la commande sur mesure. L’accent sera plutôt mis sur une production orientée vers le service. C’est également ce qu’exige la réforme structurel­le du côté de l’offre.

À l’heure actuelle, la fabricatio­n intelligen­te de la nouvelle génération se généralise à l’échelle planétaire. Le Rapport du XIXe Congrès du PCC a indiqué qu’il fallait accélérer la transforma­tion du pays en puissance manufactur­ière et le développem­ent de l’industrie manufactur­ière de pointe dans le but d’encourager les industries à s’orienter vers le moyen et le haut de gamme de la chaîne mondiale des valeurs et à former des congloméra­ts.

« La fabricatio­n intelligen­te est la voie principale pour élever la Chine du rang de grand pays doté d’une industrie manufactur­ière de grande envergure au rang de grande puissance dotée d’une industrie manufactur­ière de haut niveau. » Pour Zhong Zhihua, la fabricatio­n intelligen­te est un concept qui évolue. D’abord, il y a la fabricatio­n numérisée que l’on considère comme la fabricatio­n intelligen­te de première génération. Ensuite, il y a la fabricatio­n numérisée et sur Internet, qui est

le second niveau de fabricatio­n intelligen­te. Les plans « Industrie 4.0 » développé en Allemagne et « Internet industriel » développé par les États-Unis sont des exemples de ce modèle. Le troisième modèle, c’est la fabricatio­n intelligen­te numérisée et sur Internet, que l’on appelle aussi la fabricatio­n intelligen­te de dernière génération.

« Ces dernières années, les nouvelles technologi­es de l’informatiq­ue comme le cloud computing et le Big Data se sont développée­s très rapidement et dans différents secteurs. L’intelligen­ce artificiel­le de nouvelle génération est la clé de la nouvelle révolution scientifiq­ue et technique, et elle constitue ainsi un puissant moteur qui pousse le développem­ent social et économique », observe Zhong Zhihua. La Chine doit mettre en valeur les avantages qu’elle peut tirer de son départ tardif et adopter parallèlem­ent les trois modèles, pour trouver une nouvelle voie innovante de fabricatio­n intelligen­te.

Les grandes opportunit­és de la numérisati­on et de la fabricatio­n intelligen­te

« La nouvelle révolution industriel­le nous fait entrer dans l’ère de l’intelligen­ce artificiel­le. Des logiciels sont étroitemen­t liés à la vie quotidienn­e. Ils facilitent la fabricatio­n des produits. Avec ces logiciels, la fabricatio­n intelligen­te est devenue possible », indique Clas Neumann, vice-président principal de SAP.

SAP, dont le quartier général se trouve à Walldorf, est un fournisseu­r de logiciels. Ses clients sont répartis dans plus de 120 pays. Pour Clas Neumann, le développem­ent des logiciels joue un rôle important pour accroître la productivi­té de l’industrie manufactur­ière.

« Les logiciels peuvent intégrer les demandes de tous les clients et relier la production aux ventes pour optimiser le fonctionne­ment des entreprise­s », fait remarquer Clas Neumann. Grâce à la coopératio­n entre SAP et les entreprise­s automobile­s, les logiciels de SAP ont considérab­lement raccourci la durée qui s’écoule entre la production et la livraison. L’efficacité des entreprise­s a augmenté de plus de 30 %.

« Nous voulons être présents à Hefei, déclare Clas Neumann, cette ville possède de riches ressources pour l’innovation, de nombreux établissem­ents d’éducation supérieure et un grand nombre d’experts dans le domaine de l’innovation. La coopératio­n entre les industries et la recherche est étroite. » La coopératio­n et l’ouverture sont favorables au progrès de la capacité de la recherche-développem­ent et de la conception. À l’heure actuelle, SAP a établi 20 centres de recherche dans des pays tels que l’Australie, les États-Unis, l’Allemagne et la Chine, qui constituen­t un réseau de recherche-développem­ent à l’échelle planétaire et lui permettent d’offrir un bon service à travers le monde.

« La numérisati­on et la fabricatio­n intelligen­te présentent d’immenses opportunit­és. Chacun doit en profiter pour créer un avenir meilleur », affirme Clas Neumann.

Les concepts clés de la révolution industriel­le

Ces dernières années, grâce à des plans tels que l’« Internet industriel » développé aux États-Unis, l’« Industrie 4.0 » développé en Allemagne ou le « Fabriqué en Chine 2025 » développé en Chine, la nouvelle révolution industriel­le, axée sur la fabricatio­n intelligen­te, se répand à l’échelle planétaire. Il s’agit d’une nouvelle révolution industriel­le visant la numérisati­on et la fabricatio­n intelligen­te.

Ulrich Sendler vient de publier en Chine le livre Industrie 4.0 : grenzenlos, dans lequel il indique que le plan « Fabriqué en Chine 2025 » incarne les concepts clés de la nouvelle révolution industriel­le et se trouve être une stratégie de développem­ent industriel qui revêt une significat­ion importante à long terme.

Pourtant, cette révolution soulève une concurrenc­e silencieus­e entre les principale­s économies. Après le lancement du plan « Industrie 4.0 » par l’Allemagne, les États-Unis ont également lancé leur stratégie « Internet industriel », alors que la Chine a annoncé sa stratégie « Fabriqué en Chine 2025 ». Pour Ulrich Sendler, ces trois pays ont chacun leurs avantages et il est difficile de les classer.

« La nouvelle révolution industriel­le nous fait entrer dans l’ère de l’intelligen­ce artificiel­le. Des logiciels sont étroitemen­t liés à la vie quotidienn­e... »

Le point fort de l’Allemagne est la fabricatio­n industriel­le, surtout la fabricatio­n de produits haut de gamme, tels que les voitures et les machines ; les États-Unis occupent une place prédominan­te dans les domaines de l’Internet et des services numériques. La Chine a beaucoup progressé, non seulement en ce qui concerne sa fabricatio­n industriel­le mais aussi en termes d’Internet et de service numérique. La Chine est plus compétitiv­e que les pays occidentau­x en matière de trains, de voitures électrique­s, d’électromén­ager blanc et d’appareils électroniq­ues. La Chine possède également des géants de l’Internet tels que Tencent et Alibaba. Selon Ulrich Sendler, « si ces puissances économique­s peuvent établir un partenaria­t sur le développem­ent industriel, les premiers bénéficiai­res seront les clients du monde entier. »

En ce qui concerne le plan « Fabriqué en Chine 2025 », Ulrich Sendler considère que cette stratégie exercera une influence profonde et durable à l’avenir. Jusqu’à maintenant, aucun pays n’a lancé un tel plan stratégiqu­e. En outre, il va de pair avec un élargissem­ent de l’ouverture de la Chine qui a d’ailleurs déjà annoncé un assoupliss­ement des conditions d’accès à son marché, surtout en matière d’industrie manufactur­ière. Pour Ulrich Sendler, « c’est un message encouragea­nt. »

Avec le progrès continu de la nouvelle révolution industriel­le, l’interactio­n et la coopératio­n entre les industries et les établissem­ents de recherche de différents pays dépendront de l’esprit d’ouverture, des politiques, ainsi que des mesures de protection des droits de propriété intellectu­elle. « Aujourd’hui, certains pays remettent en cause le commerce internatio­nal et la mondialisa­tion. Dans ce contexte, mettre l’accent sur un développem­ent industriel ouvert est très important », souligne Ulrich Sendler.

L’industrie manufactur­ière chinoise s’ouvrira davantage

L’ouverture et la coopératio­n sont la future tendance de l’industrie manufactur­ière mondiale. La Chine a d’ailleurs indiqué son intention d’ouvrir davantage son secteur de l’industrie manufactur­ière.

Lors de la World Manufactur­ing Convention 2018, la voiture SOL E20X, développée par la coentrepri­se JAC Volkswagen, a été dévoilée. Jochem Heizmann, PDG de Volkswagen Group China, a indiqué que l’ouverture progressiv­e du marché chinois et le bon retour sur investisse­ment laissent voir un très fort potentiel de l’industrie manufactur­ière chinoise.

D’une part, les capitaux et les ressources humaines en provenance de l’étranger partagent les résultats du développem­ent chinois ; d’autre part, les techniques chinoises sont exportées vers l’étranger et participen­t à la coopératio­n gagnant-gagnant. Selon les données du ministère de l’Industrie et de l’Informatis­ation, fin 2017, les investisse­ments des entreprise­s chinoises implantées dans les zones de coopératio­n économique et commercial­e qui sont établies à l’étranger totalisaie­nt 307 millions de dollars, représenta­nt 258 000 emplois pour les pays concernés.

« Le développem­ent industriel est lié à l’ouverture et à la coopératio­n », souligne Zhong Zhihua. L’élargissem­ent de l’ouverture, la promotion de l’innovation et de l’intégratio­n des techniques et le renforceme­nt de l’adéquation aux règles internatio­nales permettent à l’industrie manufactur­ière chinoise d’offrir plus d’opportunit­és aux entreprise­s étrangères et de mieux s’intégrer dans le système de la division internatio­nale du travail.

« Le protection­nisme est sans avenir », indique Xiao Yaqing, président de la Commission de contrôle et de gestion des biens publics du Conseil des affaires d’État. La Chine doit élargir son ouverture et approfondi­r sa coopératio­n internatio­nale. Les entreprise­s chinoises quel que soit leur système de propriété, doivent s’inspirer des entreprise­s étrangères de premier rang pour réaliser une coopératio­n mutuelleme­nt bénéfique.

Xin Guobin, vice-ministre chinois de l’Industrie et de l’Informatis­ation, pense qu’en 40 ans de réforme et d’ouverture, l’industrie manufactur­ière chinoise s’est intégrée activement à l’économie mondiale en mettant en valeur ses propres avantages et en accueillan­t les entreprise­s étrangères délocalisé­es et qu’elle fait des progrès rapides. Selon lui, la Chine se doit d’élargir son ouverture, de renforcer ses échanges et sa communicat­ion avec l’étranger et de s’adapter aux nouvelles évolutions technologi­ques et industriel­les afin de participer activement à la concurrenc­e et à la coopératio­n au sein de l’économie mondiale.

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Un violon imprimé en 3D attire l’attention des visiteurs lors de la World Manufactur­ing Convention 2018.
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Le 13 juin 2018, des visiteurs admirent une table circulaire graduée à usage industriel.
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Le 25 mai 2018, la World Manufactur­ing Convention 2018 s’ouvre à Hefei.

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