Le renouveau du village de Chixi
C’est en 2001 que Zhong Limei est allée pour la première fois dans le village de Chixi, situé à Fuding (une ville au niveau du district sous la juridiction de la ville de Ningde, dans la province du Fujian), pour accompagner son petit ami à la maison. Elle avait alors 20 ans. « Auparavant, ce petit village montagneux n’avait pas de grande route le reliant à l’extérieur. Nous sommes descendus dans un endroit appelé Longting, et nous sommes entrés dans le village en suivant un long et tortueux chemin après avoir traversé à pied la montagne », raconte Mme Zhong, qui a gardé un souvenir très vif de sa première visite dans le village de Chixi, il y a 17 ans.
Malgré l’opposition de ses parents, Zhong Limei s’est installée dans le village de Chixi après son mariage en 2003. De jeune migrante, elle est devenue la représentante des femmes de Chixi et la promotrice du développement de l’écotourisme dans le village pendant dix ans. « Le plus grand changement de notre vie a été le déménagement dans un bâtiment en béton à plusieurs étages, disant adieu aux fuites de la maison en planche par temps de grand vent et de pluie. Par ailleurs, nous avons pu recevoir des voyageurs dans notre propre logement », explique Zhong Limei. Ses expériences reflètent bien le renouveau du village de Chixi.
Efforts de 30 ans
Trois décennies plus tôt, Chixi était un village isolé et très pauvre, où seulement des personnes âgées et des enfants vivaient. Plus de 280 foyers étaient dispersés dans 14 agglomérations de l’ethnie she : aucune route, pas d’électricité ni d’eau et encore moins de télévision ou de moyens de télécommunication.
Le 24 juin 1984, le Quotidien du Peuple a publié à la une la lettre d’un lecteur qui décrivait la pauvreté du village de Chixi, attirant l’attention du Comité central
du PCC et du Conseil des affaires d’État. À la fin du mois de septembre de la même année, CCTV (Télévision centrale de Chine) a diffusé la Notification d’aider les régions pauvres à se débarrasser de la pauvreté, marquant le coup d’envoi de la lutte contre la pauvreté à l’échelon national. Considéré comme l’indicateur de réussite de cette lutte, le village de Chixi est surnommé « le premier village de la lutte contre la pauvreté en Chine ».
« La pauvreté extrême était associée à notre village. On habitait dans des maisons en chaume, on s’éclairait au pétrole, et on mangeait de la patate douce et des herbes sauvages comestibles », se souvient Du Jiazhu, secrétaire de la cellule du Parti du village de Chixi.
La première décennie de la lutte contre la pauvreté, soit de 1984 à 1993, a été assimilée à une opération de « transfusion de sang ». Après le reportage du Quotidien du Peuple, les gouvernements des différents niveaux se sont préoccupés du sort de Chixi. Les villageois ont subitement reçu des jeunes arbres, des lapins reproducteurs et des agneaux venant des quatre coins du pays. Cependant, tous ces dons se sont révélés inutiles en raison du manque de maîtrise technique dans la plantation et l’élevage. La première décennie a été une décennie quasiment perdue.
La deuxième décennie ressemblait davantage à une opération pour « changer le sang ». En 1994, avec l’ouverture de la route principale du village, 22 familles pauvres ont déménagé des montagnes au village central. Plus tard, une dizaine d’autres agglomérations isolées ont suivi cet exemple du « déplacement ». En 1995, plus de 350 foyers de l’ethnie she ont ainsi été déplacés de la cabane en chaume dans les montagnes à la maison de brique au pied des montagnes. À l’aide du gouvernement, le village de Chixi a développé une série de programmes liés au tourisme et à l’agriculture écologique, en guidant les habitants locaux dans l’entrepreneuriat. « En nous appuyant sur les ressources écologiques, nous avons planté des théiers et des arbres dans le but de développer le tourisme rural. Maintenant, on accueille plus de 150 000 visiteurs par an. Faire venir de l’argent à notre porte, c’était inimaginable pour nous auparavant », raconte Du Jiazhu.
La troisième décennie, 2007-2016, est encore un autre type d’opération qui a consisté à « produire du sang », et qui a enfin réussi à faire sortir les gens de la pauvreté. « On a créé en 2016 la Société d’investissement touristique de Chixi, qui a déployé des efforts pour améliorer les infrastructures touristiques du village », indique M. Du. Avec l’essor du tourisme rural, les revenus des villageois ont augmenté progressivement, et beaucoup de femmes au foyer comme Zhong Limei ont ressenti plus de satisfaction et de bonheur liés à cette nouvelle activité.
Le village de Chixi a fondamentalement changé au cours de la dernière décennie. « L’industrie touristique a permis de nous enrichir. Aujourd’hui, on peut offrir de nombreuses expériences touristiques, entre autres, le rafting sur des radeaux en bambou, la cueillette de fruits et les excursions en montagne. Quant à la structure du développement touristique, elle est axée sur la zone touristique de Jiulixi, la zone touristique de Xiashanxi, les maisons anciennes de Kenglinong et les paysages naturels idylliques », dit Du Jiazhu. En 2016, le village a accueilli plus de 200 000 visiteurs, et le nombre maximum de visiteurs pendant une journée peut dépasser 10 000 personnes. Dans le seul domaine touristique, chaque foyer a gagné plus de 60 000 yuans.
M. Du ajoute : « Pour montrer notre reconnaissance au Comité central du PCC et des gouvernements des différents niveaux qui ont apporté leur aide, nous avons spontanément érigé une stèle à l’entrée du village, qui dit ‘‘le premier village de la lutte contre la pauvreté en Chine’’. Nous nous souviendrons toujours du parcours accompli pour sortir de la pauvreté ; ce remerciement sera gravé pour toujours dans notre coeur. »
Durant la matinée du 19 février 2016, dans le studio du Quotidien du Peuple, le secrétaire général du Comité central du Parti Xi Jinping était en ligne avec des journalistes qui interviewaient les villageois à Chixi même. Lors de ces témoignages, Xi Jinping a grandement apprécié les résultats de la réduction de la pauvreté dans le village, souhaitant que le niveau de vie des locaux s’améliore davantage encore.
L’enrichissement par le tourisme, le renforcement par l’agriculture, le redressement par la culture et l’embellissement par l’écologie sont ceux qui constituent la logique du développement du village de Chixi. De 1984 à 2017, le revenu net par habitant est passé de 166 yuans à 16 640 yuans, tandis que les finances du village sont passées du passif de 100 000 yuans au revenu de 800 000 yuans.
Entrepreneuriat caractéristique
En tant que village pilote dans la réduction de la
pauvreté par le tourisme ainsi que village modèle en matière de tourisme rural, le village de Chixi n’a jamais ralenti le rythme de son développement. Avec l’ouverture des routes touristiques et la construction de nouvelles infrastructures, le village attire même de plus en plus de visiteurs. Zhou Xueqin, patronne d’un hôtel lié au tourisme rural, considère que l’amélioration de la vie de sa famille témoigne bien de l’évolution générale du village de Chixi.
« Au début, notre vie dépendait encore des travaux des champs. Nous préparions quelques chambres pour les voyageurs, nous ne faisions le nettoyage qu’en cas de visite. » Mme Zhou parle ici des faillites du concept de développement extensif mis en place il y a dix ans : malgré sa beauté naturelle, le village de Chixi n’avait acquis qu’une célébrité très limitée. Mais avec le renforcement du soutien du gouvernement, le développement touristique du village est remis graduellement sur la bonne voie.
« Maintenant on a créé beaucoup d’hôtels liés au tourisme rural, qui couvrent la gastronomie, le logement et le voyage », ajoute-t-elle. Ce qui l’impressionne le plus, c’est que beaucoup de jeunes qui travaillaient dans d’autres villes reviennent aujourd’hui.
En raison de la métamorphose de Chixi, Du Ying a choisi de devenir un agriculteur d’un nouveau type, un agriculteur avec un cursus universitaire accompli, abandonnant ainsi par choix l’occasion de travailler en ville. « Il y a cinq ans, j’avais la possibilité de rester en ville, mais j’ai décidé de rentrer chez moi en raison des belles perspectives que le village offre désormais. D’une part, la construction et la revitalisation des régions rurales ont besoin de nous, d’autre part, nous y aurons plus d’opportunités », dit Du Ying. Après être sorti diplômé de l’université du Guangxi, il est revenu dans son village natal et s’est engagé dans le traitement des feuilles de thé. Il a recueilli près d’un million de yuans de capital-risque pour créer une usine. Affairé au traitement des feuilles de thé pendant la journée et se chargeant des commandes en ligne le soir, il a réellement formé l’ossature du développement durable de l’économie touristique du village de Chixi.
« Notre village possède de riches ressources en thé, mais on n’avait pas d’usine de traitement. J’en ai donc ouvert une afin de bien utiliser ces ressources. Ces dernières années, influencés par notre exemple, davantage de jeunes, dont des étudiants fraîchement diplômés et des hommes d’affaires, reviennent dans le village et s’investissent dans l’entrepreneuriat », raconte Du Ying. Grâce aux efforts de ces jeunes qualifiés, le village de Chixi se crée un plus bel avenir à portée de main.
L’écotourisme a mis le village de Chixi sur une voie de développement qui réalise la combinaison harmonieuse entre l’enrichissement des habitants et la protection de l’environnement. Sa belle évolution constitue sans doute l’exemple le plus typique en matière de lutte contre la pauvreté.