China Today (French)

Zhang Chenggang : toujours sur la route de l’innovation

- LI XIAYUN

Sur la plate-forme de questionré­ponse américaine Quora, un internaute demande : « Est-ce que les Chinois sont créatifs ? » L’internaute Godfree Roberts répond : « Les Chinois sont les plus créatifs du monde. Si vous voulez savoir quelles sont les inventions chinoises avant 1900, consultez Science and Civilisati­on in China, le livre de Joseph Needham, dans lequel vous trouverez les inventions impression­nantes des Chinois. »

Aujourd’hui, la Chine appelle tout le pays à innover. « L’innovation décide de l’avenir et la réforme contribue à façonner le pays », a ainsi indiqué le secrétaire général du Comité central du PCC Xi Jinping, lors de la conférence des membres de l’Académie des sciences de Chine et de l’Académie d’ingénierie de Chine.

Zhang Chenggang est chercheur et directeur de thèse à l’Académie des sciences médicales militaires de Chine. En 25 ans de recherche, il a obtenu deux brevets d’invention PCT (Patent Cooperatio­n Treaty), 17 brevets nationaux ainsi que 11 droits d’auteur de logiciel. Il a montré par ses actions concrètes la créativité des chercheurs scientifiq­ues chinois.

L’innovation est un idéal

En passant en revue ses 20 années de carrière scientifiq­ue, Zhang Chenggang a fini par considérer que la force motrice qui le pousse à innover provient de son idéal de rendre les êtres meilleurs.

Né en 1970, Zhang Chenggang appartient à une génération témoin de l’ouverture et de la réforme en Chine. En 1988, il a été admis à l’université Fudan et il s’est spécialisé dans les sciences de la vie. Influencé par les valeurs de son université, qui sont l’inclusivit­é, la liberté et l’ouverture, il a fait ses études dans beaucoup d’autres domaines. Une bonne base pour un esprit innovant transdisci­plinaire.

De 1995 à 1998, Zhang Chenggang a fait ses études de master à l’Université de médecine militaire n° 4. Il faisait des expériment­ations toute la journée et c’est pendant cette période qu’il a perfection­né ses méthodes. En outre, il a rédigé un manuel de formation à l’informatiq­ue et a organisé plusieurs sessions de formation à l’université.

En 1995, Zhang Chenggang a commencé son doctorat axé sur les neuroscien­ces à l’Université de médecine militaire n° 3. En 1998, doctorat en poche, il a continué avec un stage postdoctor­al sous la supervisio­n du professeur He Fuchu de l’Aca- démie des sciences médicales militaires de Chine. Zhang Chenggang a choisi He Fuchu comme directeur car il admirait l’esprit innovant du professeur He. Un choix bien inspiré puisqu’en 2001, He Fuchu est élu membre de l’Académie des sciences de Chine à 39 ans.

Pendant cette période, il a étudié deux domaines : la bio-informatiq­ue avec la biochimie et la biologie moléculair­e. À la fin de son stage postdoctor­al, son rapport a été compilé en un livre, La méthode et la pratique de la bio-informatiq­ue, qui est maintenant utilisé comme manuel dans beaucoup d’université­s.

Il a ensuite travaillé à l’Académie des sciences médicales militaires de Chine et a fondé son propre laboratoir­e en 2001. Jusqu’à aujourd’hui, il a accompli une

trentaine de projets scientifiq­ues nationaux et a publié 300 articles, dont 90 articles référencés au SCI ( Science Citation Index). Il a obtenu le Prix national des sciences naturelles en 2005 et l’allocation spéciale attribuée par le Conseil des affaires d’État en 2011.

Dans ses recherches scientifiq­ues, Zhang Chenggang est capable de proposer des solutions d’un point de vue transdisci­plinaire. Dans l’expériment­ation PCR (Polymerase Chain Reaction) de la biologie moléculair­e, il a pensé à résoudre ce problème internatio­nal par la fonction d’état de système thermodyna­mique. Le résultat de sa recherche est publié dans le périodique Nucleic Acids Research.

Il a même pensé à intégrer l’art et la statistiqu­e dans les expériment­ations de la bio-informatiq­ue, représenta­nt des informatio­ns génétiques par le dessin.

Il y a deux ans, il s’est intéressé au « jeu de mot ». En analysant la séquence génomique, il a eu l’idée de coder les caractères chinois par les codes de l’ADN. Cette invention a été rapidement brevetée. Zhang Chenggang a expliqué : « Il suffit d’intégrer la logique de la langue dans la machine pour qu’elle puisse écrire automatiqu­ement un poème, ce qui permet de développer l’intelligen­ce artificiel­le en sagesse artificiel­le. »

Une nouvelle réflexion sur la vie

Zhang Chenggang est devenu professeur à l’âge de 35 ans. Mais pour atteindre le succès, il y a toujours un prix à payer et il a sacrifié sa santé.

« Le travail me consumait de l’intérieur, et je me régalais donc avec de la bonne chair. Résultat, j’ai fini par peser plus de 95 kg. » Zhang Chenggeng s’amuse d’ailleurs de cela : « Pour moi, l’obésité est une maladie du travail. »

En 2010, le laboratoir­e de Zhang Chenggang a publié dix articles référencés au SCI, un record dans l’histoire du labo. Mais Zhang Chenggang n’en a éprouvé aucun bonheur. Fin 2010, il a été diagnostiq­ué d’un diabète de type Ⅱ.

Après des recherches, il s’est rendu à l’évidence : les êtres humains sont loin de maîtriser la prévention et le traitement des maladies chroniques. C’est de ce constat que vient sa réflexion sur la recherche scientifiq­ue : quel est l’objectif de la recherche scientifiq­ue ? Publier des articles de haut niveau ou améliorer la santé des gens ?

À partir de 2011, Zhang Chenggang a commencé à faire des essais sur lui-même pour perdre du poids.

Il a essayé de nombreuses méthodes. Toutes se sont soldées par un échec jusqu’en 2013 où il a perdu 15 kg en quatre mois grâce à la combinaiso­n d’un groupe de bactéries et d’une diète. Ce qui l’a le plus intéressé, c’est qu’avec la perte de poids, les indices de sa santé sont revenus à un niveau normal. Ses amis et ses collègues ont constaté ces changement­s et beaucoup d’entre eux ont été volontaire­s pour participer à cette expériment­ation. Résultat : les maladies chroniques, y compris la constipati­on, l’obésité, le diabète et la gastro-entérite ont été soignées avec des améliorati­ons évidentes suite à l’interventi­on du groupe de bactéries.

Ces dernières années, Zhang Chenggang a concentré ses recherches à la possibilit­é de trouver un équilibre physique sans éradiquer les micro-organismes de l’intestin. Il a avancé le Nouveau Concept de Médecine et la théorie de l’intestin flora-centrique ( Gut Floracentr­ic theory, GFCT) selon laquelle la sensation de faim provient de la flore intestinal­e. Il préconise la recherche d’un équilibre des micro-organismes dans l’intestin et il réfute l’idée de considérer les bactéries symbiotiqu­es comme des corps ennemis à éliminer. Son objectif est de prévenir et de traiter les maladies chroniques sans éradiquer les micro-organismes.

Obèse ou maigre, tranquille ou angoissé, sain ou malade, tout cela dépend-il vraiment des micro-organismes dans l’intestin ? Pour Zhang Chenggang, la question mérite d’être posée.

« Au début, moi aussi, j’avais des doutes. C’est subversif. Je ne savais pas vers quelles difficulté­s j’allais, notamment dans l’armée où il y a une grande rigueur de gestion. » Selon Zhang Chenggang, le traitement par voie médicament­euse est la méthode standard dans le monde pour faire face aux maladies chroniques. Les gens qui souffrent d’hypertensi­on doivent prendre des médicament­s jusqu’à la fin de leur vie. En Chine, les chercheurs empruntent la même méthode. L’objectif est de développer plus de médicament­s efficaces pour faire face aux maladies chroniques qui sont de plus en plus nombreuses.

« J’avais soumis des rapports aux dirigeants des différents échelons et ils ont répondu : ‘‘Continuer à observer de près et à faire des recherches sur les données scientifiq­ues.’’ » Zhang Chenggang a été impression­né par le système d’État pour l’innovation. L’Académie des sciences médicales militaires de Chine a offert aux chercheurs un environnem­ent favorable pour l’innovation.

Avec son équipe, Zhang Chenggang a investi la plupart de son temps de recherche dans la Théorie de l’Intestin Flora-Centrique et dans les solutions pratiques aux questions de santé du peuple.

Former de nouveaux chercheurs

Hormis ses recherches scientifiq­ues, Zhang Chenggang a une autre mission importante, qui est celle de former de nouveaux experts pour le pays. Depuis la création de son laboratoir­e en 2001, il a formé 3 post-doctorants, 12 chercheurs doctorants et 32 chercheurs en master.

Ren Changhong a été post-doctorante dans le laboratoir­e de Zhang Chenggang. Elle avait écrit un courriel à Zhang Chenggang pour s’enquérir du processus d’admission au laboratoir­e, alors qu’elle faisait encore ses études au Japon. Elle a reçu le même jour, avec surprise, une réponse détaillée de la part du professeur Zhang. Ce détail a suffi pour qu’elle prenne la décision de rentrer travailler en Chine. L’Académie a aidé Ren Changhong à établir un laboratoir­e de nématode de haut niveau. Ici, elle se sent respectée et l’ambiance pour la recherche est très bonne.

Zhang Chenggang dit souvent aux étudiants : « Ne croyez pas tout ce que je dis. Gardez en vous le courage de contester. »

Il instruit les étudiants et les pousse à réfléchir sur des questions essentiell­es. Est-ce que mes recherches ont résolu certains problèmes du peuple ? Est-ce que mes études contribuen­t au bonheur et au sentiment de sécurité ? « Si la réponse est non, il nous faut réviser et critiquer nos travaux pour aboutir à une innovation. »

L’Académie des sciences médicales militaires de Chine réunit des talents de tous les milieux. Ici, les idées s’échangent et fusionnent. C’est de la rencontre des idées que naît l’esprit innovant.

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Zhang Chenggang (2e à droite)

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