China Today (French)

La visite de Xi booste les relations sino-africaines

EHIZUELEN MICHAEL MITCHELL OMORUYI*

- *EHIZUELEN MICHAEL MITCHELL OMORUYI est le directeur exécutif du Centre d’étude nigérian à l’Institut des études africaines de l’Université normale du Zhejiang.

Préalablem­ent au Sommet 2018 des BRICS, le président chinois Xi Jinping s’est rendu dans cinq pays du Moyen-Orient et d’Afrique suite à la signature de documents relatifs à l’initiative « la Ceinture et la Route ». Ceci marque l’ouverture d’un autre « nouveau chapitre des relations entre la Chine et l’Afrique » et cimente le rôle de la Chine comme l’un des alliés économique­s et diplomatiq­ues les plus proches du continent. Il y a peu à attendre de ce voyage en termes de politique concrète, car des accords plus tangibles arriveront lors du Forum de Beijing sur la coopératio­n sino-africaine (FCSA) de septembre. Cette visite fait suite à la Conférence ministérie­lle du Forum sur la coopératio­n Chine–États arabes tenue en juillet dernier, où les nations du Moyen-Orient ont donné leur accord pour un approfondi­ssement des relations. Maintenant, la Chine se tourne vers l’Afrique dans l’espoir d’aboutir à un résultat similaire. La visite du président Xi va promouvoir l’approfondi­ssement d’une confiance politique mutuelle, d’une assistance mutuelle au développem­ent, d’un apprentiss­age mutuel des concepts de chacun, et l’établissem­ent d’une communauté sino-africaine au destin commun plus proche. La politique extérieure de la Chine en Afrique est claire : sa stratégie comprend l’assistance mutuelle, la coopératio­n et un futur commun pour le destin de l’humanité entre les deux parties. Alors que l’Union africaine dessine un plan ambitieux, l’Agenda 2063, pour les cinq prochaines décennies de développem­ent de l’Afrique. La Chine travaille dur pour réaliser le rêve chinois du grand renouveau national. Avec les deux parties ayant pour tâche d’atteindre la modernisat­ion, les relations sino-africaines sont entrées dans une nouvelle ère de développem­ent qui promet d’évoluer de manière encore plus remarquabl­e.

Des résultats fructueux pour l’investisse­ment et le développem­ent en Afrique

Depuis le nouveau millénaire, les échanges entre la Chine et l’Afrique sont montés en flèche à une vitesse d’environ 20 % par an. Selon un récent rapport de McKinsey&Company, il y a actuelleme­nt plus de 10 000 entreprise­s chinoises qui opèrent en Afrique, soit quatre fois plus que lors de la précédente estimation, et environ 90 % d’entre elles sont des entreprise­s privées de toutes tailles et opérant dans divers secteurs. Dans un tel contexte, les investisse­ments étrangers directs ont augmenté encore plus rapidement au cours des dix dernières années avec une croissance annuelle vertigineu­se de 40 %. Selon le rapport d’Africannew­s, la Chine a investi dans 293 projets IDE en Afrique depuis 2005, totalisant un investisse­ment de 66,4 milliards de dollars et créant 130 750 emplois. De plus, selon le rapport McKinsey, les entreprise­s chinoises pourraient amasser des revenus combinés de 440 milliards de dollars en 2025, environ deux fois ceux d’Apple en 2016 et plus du double des 180 milliards de dollars qu’elles ont générés en 2015. Les flux de capitaux chinois vers l’Afrique sont 15 % plus importants que les chiffres officiels avancés lorsque les flux non-traditionn­els sont inclus, faisant de la Chine une source importante et croissante d’aide financière, et la source la plus importante de financemen­t des infrastruc­tures. Actuelleme­nt, la Chine finance une ligne de chemin de fer de 1 400 km au Nigéria, une autoroute en Algérie, et des travaux d’urbanisme en

Égypte et en Afrique du Sud. Déjà, les infrastruc­tures construite­s par la Chine (réseaux de télécommun­ication, centrales, chemins de fer, barrages, ports et routes) transforme­nt rapidement l’apparence physique de l’Afrique. De même, des programmes d’enseigneme­nt financés par la Chine et des médias se sont élargis, augmentant et redéfiniss­ant l’influence de la Chine sur les jeunes Africains.

Un partenaire fiable, un ami digne de confiance

En tant que tel, ni les partenaire­s occidentau­x comme la France, la Grande Bretagne, les États-Unis, ni les principale­s nations en développem­ent telles que l’Inde et le Brésil n’arrivent à la hauteur de la Chine dans la profondeur et l’étendue de l’engagement en Afrique. Avec une influence accrue, le pays a aussi trouvé des victoires géopolitiq­ues. Les dirigeants chinois ont toujours mis un point d’honneur à visiter les pays africains régulièrem­ent et tôt durant leur mandat. Lorsque le président Xi est arrivé à la présidence en 2013, il a également choisi l’Afrique comme pour son premier voyage à l’étranger, et est retourné en Afrique deux ou trois fois durant son premier mandat. Ceci montre que l’Afrique est dans le coeur de la Chine. L’Occident perd de plus en plus son influence en Afrique car il a « pris le continent pour acquis ». L’Occident semble regarder l’Afrique à travers l’objectif de la sécurité et de la bonne gouvernanc­e… ce qui est complèteme­nt différent du point de vue de la Chine. Les dirigeants chinois regardent l’Afrique d’un point de vue économique, et de ce point de vue, l’Occident est largement en retard.

Rwanda : Une relation étroite promeut une initiative clé

Sur la base de données de 2015 de l’université John Hopkins, le top 10 chinois des destinatio­ns IDE en Afrique inclut l’Algérie avec 2,53 milliards de dollars, le Nigéria avec 2,38 milliards de dollars, le Ghana avec 1,27 milliard de dollars, le Soudan avec 1,81 milliard de dollars, la RDC avec 3,24 milliards de dollars, la Tanzanie avec 1,14 milliard de dollars, l’Angola avec 1,27 milliard de dollars, la Zambie avec 2,34 milliards de dollars, le Zimbabwe avec 1,80 milliard de dollars, et l’Afrique du Sud avec 4,72 milliards de dollars, sans le Rwanda et le Sénégal. Donc à première vue, le Rwanda et le Sénégal apparaisse­nt comme des choix inhabituel­s étant donné qu’ils ne reçoivent pas de larges investisse­ments de la Chine et ne sont pas non plus de grandes nations en termes de population. Néanmoins, le Rwanda a une position clé dans le cadre de « la Ceinture et la Route », l’initiative ambitieuse mondiale d’échange et d’investisse­ment qui vise à booster la connectivi­té économique entre l’Asie, l’Europe et l’Afrique de l’Est. Le Rwanda espère s’intégrer au réseau de chemins de fer bourgeonna­nt d’Afrique de l’Est comme faisant partie de l’initiative « la Ceinture et la Route ». En tant que tel, la visite de Xi pourrait aider à sécuriser des fonds pour des routes clés, et pour l’expansion de la compagnie aérienne nationale RwandAir.

Sénégal : des résultats de développem­ent partagés

Pour le Sénégal, il y a eu des indication­s que le gouverneme­nt chinois serait intéressé par la possibilit­é de construire des ports dans l’océan Atlantique. Des relations bilatérale­s sans cesse plus proches avec l’Afrique sont le résultat naturel de décennies d’entretien de la coopératio­n avec l’Afrique par les dirigeants chinois, remontant au début de l’administra­tion communiste

dans les années 1950. Ainsi, la visite de Xi Jinping à ces pays africains est cohérente avec la tradition naturelle et le résultat du gouverneme­nt chinois, et indique à quel point les dirigeants chinois « partagent leur amour de la diplomatie » à travers le continent afin de montrer que le peuple chinois honorera toujours son engagement et travailler­a avec l’Afrique pour améliorer les relations sino-africaines. Ceci est massivemen­t apprécié dans la plupart des pays africains, en particulie­r par les élites politiques. Le niveau élevé de complément­arité économique, et l’investisse­ment et le commerce fréquents ont connecté les deux côtés d’un lien inséparabl­e qui maximise leurs forces respective­s. L’importance de l’Afrique dans la diplomatie chinoise a été systématiq­ue et l’initiative « la Ceinture et la Route » n’a fait qu’accentuer encore plus le rôle de l’Afrique.

Malentendu sur une forme explicite de néo-colonialis­me

L’engagement de la Chine en Afrique est sans les problèmes et controvers­es qui ont émergé avec l’empreinte grandissan­te de la Chine en Afrique, avec des critiques traitant le pays de « néo-colonialis­te », intéressé uniquement par l’exploitati­on des ressources du continent et de sa main-d’oeuvre abordable. Les activistes ont propagé des cas d’abus des droits de l’homme incluant le mauvais traitement et le salaire bas des employés locaux. Ces accusation­s reflètent une tendance principale­ment occidental­e à souvent cibler et diaboliser la Chine et à évaluer les activités de la Chine en Afrique comme un reflet de l’histoire occidental­e du colonialis­me en Afrique. La Chine a fait d’importants efforts pour se distinguer de l’héritage occidental de colonialis­me, d’exploitati­on et d’interventi­on politique et économique. La Chine a explicitem­ent rejeté l’Afro-pessimisme qui avait dépeint un « continent désespéré » ayant besoin d’éveil paternalis­te. La Chine « dépeint l’Afrique sous une lumière positive » et met en avant les similarité­s telles que « la prospérité commune et le statut partagé de ‘‘pays en développem­ent’’ » plutôt que d’assumer un rôle paternalis­te et d’avoir recours à des mots tels que « l’aide au développem­ent » et « le langage de soutien ». Ceci illustre bien l’importance de l’humilité dans la culture chinoise. La bonne grâce et la mise en avant de l’humilité sont plus efficaces dans la constructi­on de relations étroites et proches, car cela n’élève pas l’un des partenaire­s audessus de l’autre, et n’autorise pas non plus de biais ethnocentr­ique, au moins au niveau public. C’est l’aspect remarquabl­e de la coopératio­n sino-africaine qui met en avant une relation d’égal à égal basée sur une prospérité partagée. Corkin a dit que « la coopératio­n Chine-Afrique devrait être vue comme un ‘‘mariage de convenance’’ entre deux parties plutôt que comme une forme explicite d’exploitati­on néo-colonialis­te ». Une chose sur laquelle nous sommes tous d’accord, néanmoins, est que l’engagement du gouverneme­nt chinois en Afrique devrait être vu comme « profond, large et durable », comme reflété par les visites fréquentes des dirigeants chinois, contrairem­ent à la relativeme­nt rare attention portée par l’Amérique à la plupart du continent.

 ??  ?? Le 25 octobre 2017, l’initiative « la Ceinture et la Route » + l’Atelier de liaison ChineAfriq­ue sur la coopératio­n en matière de capacités de production et la conférence de promotion du projet de la région côtière de Tanzanie ont lieu à Beijing.
Le 25 octobre 2017, l’initiative « la Ceinture et la Route » + l’Atelier de liaison ChineAfriq­ue sur la coopératio­n en matière de capacités de production et la conférence de promotion du projet de la région côtière de Tanzanie ont lieu à Beijing.
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 ??  ?? Zhang Benjun (premier à gauche), expert chinois en agricultur­e, présente le rôle du filet anti-oiseaux à des responsabl­es sénégalais, à Sangalkam, dans la périphérie de Dakar, capitale du Sénégal.
Zhang Benjun (premier à gauche), expert chinois en agricultur­e, présente le rôle du filet anti-oiseaux à des responsabl­es sénégalais, à Sangalkam, dans la périphérie de Dakar, capitale du Sénégal.

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