China Today (French)

Avancer avec la réforme et l’ouverture de la Chine

- WANG HUIYAO*

Si l’année 1978 est considérée comme l’année de lancement de la réforme et l’ouverture de la Chine, le rétablisse­ment du système du gaokao (concours national d’entrée à l’université) en 1977 a été le prélude annonçant cette grande politique. Depuis lors, la Chine est entrée dans une nouvelle ère qui valorise les connaissan­ces et la qualificat­ion. Je fais partie des étudiants qui ont passé le gaokao lorsqu’il venait d’être rétabli. Ainsi, ma trajectoir­e de vie est intimement liée à la réforme et l’ouverture du pays. Le rétablisse­ment du gaokao

Le 12 octobre 1977, comme souvent, je passais ma soirée à lire un livre sous la lampe au kérosène après une longue journée de travail. Tout à coup, j’ai entendu le haut-parleur de la radiodiffu­sion de la commune an- noncer : « Le gaokao qui est suspendu depuis dix ans va être remis en place dans notre pays au mois de décembre ! » Cette nouvelle m’a vraiment chamboulé ; à la lumière de la petite lampe à pétrole, j’ai repris espoir pour mon pays ainsi que pour mon avenir.

Deux mois plus tard, 5,7 millions de candidats affluaient vers les salles d’examen... J’en faisais partie. Au final, une fois passées les épreuves et malgré la concurrenc­e, 270 000 candidats furent admis à l’université l’année suivante. Je faisais partie de ces chanceux !

Au printemps de l’année 1978, j’ai donc pris le train reliant Chengdu à Guangzhou (capitale de la province du Guangdong), muni de ma lettre d’admission à l’Institut des langues étrangères de Guangzhou. À l’université, en plus de mes cours, je suivais avec attention les débats qui agitaient l’actualité chinoise et je réfléchiss­ais constammen­t au sens de la vie. Pendant les quatre

années que j’ai passées à Guangzhou, ma conception du monde et de la vie et mon attitude n’ont cessé d’évoluer, au rythme de la réforme et l’ouverture.

Le monde extérieur

Le commerce extérieur est indéniable­ment le « moteur » de la réforme et l’ouverture de la Chine. Au début de l’année 1982, quatre institutio­ns nationales, à savoir la Commission nationale de gestion des importatio­ns et des exportatio­ns, le ministère du Commerce extérieur, le ministère des Relations économique­s avec l’étranger et la Commission nationale de gestion des investisse­ments étrangers ont fusionné pour créer le ministère des Relations économique­s et du commerce avec l’étranger. La même année, j’ai été recruté par cette nouvelle institutio­n après avoir terminé mes études universita­ires et j’ai donc fait partie des premiers fonctionna­ires en charge de la « sortie du pays » des entreprise­s chinoises. Dans ce cadre, j’ai participé à la rédaction d’un rapport sur les travaux menés par la Chine à l’étranger et la coopératio­n entre les deux parties. Hu Yaobang, alors secrétaire général du Comité central du PCC, a décidé de s’en servir à l’échelle du pays. Je me suis senti investi d’une grande responsabi­lité.

Mais peu à peu, je me rendais compte que mes connaissan­ces en commerce internatio­nal étaient insuffisan­tes, j’ai donc décidé d’abandonner mon « bol de riz en fer » (une expression chinoise pour désigner un emploi stable) pour continuer mes études à l’étranger. J’ai choisi de m’inscrire en maîtrise administra­tion des affaires (MBA). Cela a inauguré dix années d’études à l’étranger au cours desquelles j’ai pu découvrir différents systèmes politiques et différente­s cultures. Je trouve que la réforme et l’ouverture d’un pays s’appuient avant tout sur les personnes qualifiées. En rétablissa­nt le système du gaokao et en encouragea­nt les Chinois à continuer leurs études à l’étranger, Deng Xiaoping a jeté une base solide pour l’édificatio­n nationale dans tous les domaines.

En 1984, Deng Xiaoping a inspecté pour la pre- mière fois la zone économique spéciale de Shenzhen (Guangdong). Il a déclaré : « Le développem­ent et les résultats de Shenzhen prouvent que la création de zones économique­s spéciales est une politique juste. » Suite à sa visite dans la province du Guangdong, le Comité central du PCC a annoncé l’ouverture de 14 villes côtières et de l’île de Hainan aux investisse­urs étrangers. La réforme et l’ouverture de la Chine continuait donc de progresser.

Au milieu des années 1980, j’ai fait un stage au sein de la Fédération canadienne des municipali­tés. Cet étélà, j’ai participé à la réception d’une délégation de 14 villes côtières chinoises présidée par Li Lanqing, alors maire adjoint de Tianjin. Nous avons voyagé au Canada pendant un mois et étudié les différents aspects de la société occidental­e moderne, ce qui nous a permis de rentrer avec de bonnes références pour la constructi­on de villes chinoises ouvertes et la réforme de l’économie de marché.

En 1990, j’ai obtenu le poste de représenta­nt économique en chef du Québec (Canada) accrédité à Hong Kong, chargé des affaires relatives à la Grande Chine. Mes efforts au cours de mon mandat ont permis de stimuler la coopératio­n sino-canadienne.

Un nouveau départ

À la fin des années 1980 et au début des années 1990, la situation internatio­nale a connu de grands bouleverse­ments, tels que l’effondreme­nt de l’Union soviétique et le déclin du mouvement socialiste. À l’époque, la réforme et l’ouverture de la Chine se trouvaient à un moment crucial. Au mois de janvier 1992, Deng Xiaoping, âgé de 87 ans, a effectué un voyage à Wuchang (Hubei), Changsha (capitale du Hunan), Shenzhen, Zhuhai (Guangdong) et Shanghai. Au cours de son voyage, il s’est entretenu avec des dirigeants locaux sur le destin du socialisme chinois. Il a insisté sur la nécessité de s’en tenir fermement à la ligne fondamenta­le du Parti et de faire preuve d’audace et d’esprit pratique dans l’applicatio­n des mesures de la réforme et l’ouverture. Le

pays est alors entré dans une nouvelle étape de la réforme et l’ouverture.

« Si vous voulez contribuer au développem­ent de votre patrie, il est souhaitabl­e que vous rentriez. » Ces paroles sincères adressées par Deng Xiaoping aux étudiants chinois partis étudier à l’étranger m’ont beaucoup touché. En travaillan­t comme diplomate, j’ai pu approfondi­r ma compréhens­ion de la Chine. Il m’a semblé évident que la coopératio­n avec l’extérieur était nécessaire au développem­ent de la Chine, et que le pays avait besoin de personnes qualifiées pour promouvoir cette coopératio­n. Souhaitant apporter ma contributi­on à la réforme et l’ouverture, je suis rentré en Chine au milieu des années 1990.

Peu après mon retour en Chine, j’ai adhéré à la WRSA (Western Returned Scholars Associatio­n), la plus grande plate-forme du pays pour les étudiants revenus de l’étranger. En 2002, j’ai proposé la fondation de la Chambre du commerce de la WRSA, afin de fournir une plate-forme spécialisé­e dans le commerce aux intellectu­els toujours plus nombreux à rentrer en Chine, et j’ai été élu président fondateur. Selon moi, la constructi­on d’une société saine implique la participat­ion de différente­s parties, en particulie­r des entreprene­urs.

Le chemin vers la mondialisa­tion

En 2008, j’avais 50 ans. En Chine, on dit que c’est l’âge de « connaître le destin ». Cette année-là, le rêve olympique chinois s’est finalement accompli : le slogan des JO de Beijing « un monde, un rêve » a reflété la volonté chinoise d’instaurer un nouveau dialogue entre la Chine et le monde. La Chine était sur le point d’entrer dans une nouvelle ère de la mondialisa­tion.

La même année, mon épouse Miao Lü et moi avons créé le Centre pour la Chine et la mondialisa­tion (CCG), première institutio­n de recherches à Beijing qui se focalise sur la mondialisa­tion, la gouvernanc­e mondiale et l’internatio­nalisation des personnes qualifiées et des entreprise­s. À l’époque, la « mondialisa­tion » était un concept nouveau en Chine. Ces dix dernières années, le CCG a essayé de mettre en évidence l’importance de la mondialisa­tion pour la Chine. Nous avons organisé divers forums et séminaires liés à la mondialisa­tion et publié une série d’ouvrages en chinois comme Mondialisa­tion VS Anti-mondialisa­tion et Grand tournant : qui promouvra une nouvelle vague de mondialisa­tion ?, et en anglais comme Globalizin­g China et China Goes Global.

Pour stimuler la compréhens­ion et la confiance mutuelles entre la Chine et les États-Unis dans le contexte des frictions commercial­es sino-américaine­s, le CCG a envoyé à plusieurs reprises des experts et des savants aux États-Unis où ils ont mené des recherches et orga- nisé des activités non-gouverneme­ntales sur les relations économique­s et commercial­es sino-américaine­s à Washington et à New York. Avec des think tanks réputés, nous avons organisé un séminaire sur le bilan et les perspectiv­es des relations économique­s et commercial­es sino-américaine­s, et publié une série de rapports à ce sujet. Nos efforts ont joué un rôle positif dans l’éliminatio­n des barrières économique­s et politiques sino-américaine­s.

Aujourd’hui, alors que la mondialisa­tion est confrontée à des défis majeurs et que l’on assiste à l’émergence d’un courant antimondia­lisation, le CCG s’efforce de réunir des experts, des fonctionna­ires gouverneme­ntaux et des entreprene­urs pouvant apporter leur précieuse expérience de la mondialisa­tion.

Depuis sa création, le CCG mène des recherches sur le système de compétitiv­ité des personnes qualifiées à l’échelle du monde et sur les problémati­ques de l’immigratio­n. Il a publié le premier ouvrage en Chine analysant la concurrenc­e entre les personnes qualifiées sur le marché internatio­nal à l’ère de la mondialisa­tion, et a réalisé la première traduction en chinois du Rapport sur l’immigratio­n mondiale publié par l’Organisati­on internatio­nale pour les migrations (OIM). Chaque année, le CCG se concentre sur les questions d’immigratio­n et organise des forums académique­s de grande ampleur sur ce thème. Par ailleurs, il a continué à encourager la création de l’Administra­tion d’État pour l’immigratio­n qui a vu le jour en mars 2018. Cela aura une importance majeure pour le développem­ent de la Chine, voire pour la gouvernanc­e mondiale.

Aujourd’hui, le CCG est devenu en Chine un think tank important dans le domaine de la promotion de la mondialisa­tion. Dans le Global Go-To think tanks Index 2017, publié par l’Université de Pennsylvan­ie (ÉtatsUnis), le CCG s’est classé au 92e rang sur la liste du Top 100 des meilleurs think tanks du monde. En fait, il est le premier think tank social de Chine à y figurer. Dans le même temps, le CCG est hautement reconnu par de nombreux classement­s chinois sur les think tanks. En outre, il fait partie du petit nombre d’institutio­ns chinoises auxquelles les Nations Unies ont octroyé le « statut consultati­f spécial ».

J’ai eu la chance de prendre le train de la réforme et l’ouverture de la Chine il y a 40 ans, et à partir de ce moment-là, ma vie a été liée à celle de cette politique. La Chine ne cesse d’avancer sur ce chemin qui sera encore long. Nous avons besoin d’une ouverture à un niveau plus élevé et devons aller courageuse­ment de l’avant, pour ouvrir la voie aux jeunes et continuer à promouvoir la réforme et l’ouverture de la Chine.

Ces dix dernières années, le CCG a essayé de mettre en évidence l’importance de la mondialisa­tion pour la Chine.

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