China Today (French)

L’économie numérique en Chine

- ouyang rihui* et meng hongxia*

Àl’ère de l’économie numérique, la Chine a bien saisi l’opportunit­é offerte par Internet et a connu de profonds changement­s dans les sphères économique­s et sociales. Fin juin 2008, le nombre d’internaute­s chinois atteignait 253 millions, arrivant pour la première fois en tête du classement mondial. Le 30 juin 2018, ce chiffre s’élevait à 802 millions et le taux de pénétratio­n d’Internet, à 57,7 %. Les sociétés Internet chinoises ont exploré un mode de développem­ent localisé. Trois d’entre elles, cotées en bourse, figurent parmi les dix premières sociétés Internet mondiales (Tencent, Alibaba et Baidu). En 2017, l’économie numérique chinoise a totalisé 27 200 milliards de yuans, soit 32,9 % du PIB. Elle est devenue une nouvelle forme de commerce et un nouveau moteur du développem­ent économique de la Chine.

Origine de l’économie numérique chinoise

L’Internet constitue la principale source de l’économie numérique. La croissance rapide du nombre d’internaute­s chinois assure le développem­ent de cette économie.

L’Internet, qui s’est développé en Chine au même rythme que sa réforme et son ouverture, favorise l’intégratio­n de la Chine et du monde. Le 20 avril 1994, la Chine a réalisé sa première connexion TCP/IP complète avec Internet, inaugurant ainsi son ère de l’Internet.

L’Internet a fait du monde un village planétaire. Les Chinois s’en servent pour le commerce, si bien que les sociétés Internet ont véritablem­ent changé le visage de la Chine. En 1995, InfoHighWa­y, premier fournisseu­r chinois d’accès à Internet, est devenu accessible aux particulie­rs. Depuis lors, Sina, Sohu, NetEase et d’autres portails ont vu le jour, des sites Web de vente en ligne tels qu’Alibaba et JD ont émergé, ainsi que des moteurs de recherche et des médias sociaux comme Baidu et Tencent.

Le 7 avril 1998, Beijing Haixing Kaizhuo Computer Company et Shaanxi Huaxing Import-Export Company ont effectué la première transactio­n d’e-commerce de Chine. Après l’éclatement de la bulle Internet mondiale en 2000, le réseau interconne­cté a connu deux à trois ans de ralentisse­ment en Chine, avant que l’e-commerce, en particulie­r la vente au détail, donne à l’économie numérique un nouvel élan. Puis en 2003, Alibaba a lancé Taobao et Alipay, devenant la plus grande plate-forme mondiale du commerce électroniq­ue C2C au monde. Dix ans plus tard, le volume des transactio­ns au détail en ligne a dépassé 1 850 milliards de yuans en Chine, faisant du pays le plus grand marché de transactio­ns au détail en ligne au monde. Cette époque marque l’entrée de la Chine dans la cyberécono­mie avec comme principale spécificit­é l’achat en ligne.

Le 10 novembre 2000, China Mobile a mis en place le plan Monternet. Petit à petit, le nombre d’internaute­s connectés via leur téléphone mobile ( mobinautes ) a dépassé celui des internaute­s connectés via un ordinateur. L’Internet a donc embrassé l’ère du téléphone mobile. Les médias personnels comme le blog et les sites de réseautage social (SNS) se sont popularisé­s. Des services de la vie quotidienn­e ont été transférés sur Internet et des secteurs traditionn­els se sont tournés vers Internet. En même temps, de nouvelles formes n’ont cessé de faire leur apparition dont, entre autres, l’e-commerce sur SNS, la vente à emporter, l’économie de célébrités sur Internet, l’économie du partage, les émissions Web en direct et les vidéos courtes. La cyberfinan­ce, plus particuliè­rement le paiement mobile, est devenue le point fort de l’économie numérique de la Chine. L’ex-

pansion des activités de l’économie numérique a permis d’étendre les transactio­ns marchandes au commerce de services, principale­ment aux services d’informatio­n. La généralisa­tion de l’applicatio­n des technologi­es au secteur tertiaire, comme l’informatiq­ue en nuage et le Big Data, prouve que l’économie numérique chinoise est entrée dans l’ère de l’économie informatis­ée.

À l’heure actuelle, l’économie numérique est sur le point d’effectuer un saut qualitatif et d’entraîner une transforma­tion numérique complète de l’économie chinoise. La Chine s’efforce de faire progresser son économie numérique dans deux domaines principaux. D’abord, l’industrial­isation numérique. Il s’agit de générer de nouvelles industries et de nouveaux secteurs en s’appuyant sur l’innovation des technologi­es de l’informatio­n pour promouvoir un nouveau développem­ent tiré par de nouvelles forces motrices. Enuite, la numérisati­on des industries. Il s’agit de procéder à la transforma­tion des industries traditionn­elles en comptant sur les nouvelles technologi­es et les nouvelles applicatio­ns d’Internet ; encourager l’intégratio­n en profondeur d’Internet, du Big Data et de l’intelligen­ce artificiel­le dans l’économie réelle ; et libérer les potentiali­tés du numérique au profit du développem­ent économique. Les réseaux relient tous les maillons des opérations économique­s, de la conception à l’applicatio­n en passant par la fabricatio­n, la circulatio­n et la consommati­on, pour former un cyberespac­e global. La séparation du pouvoir d’utilisatio­n des services et du droit de propriété modifiera considérab­lement les modes de production existants et les formes d’organisati­on industriel­le. Des technologi­es, entre autres, la 5G, l’intelligen­ce artificiel­le, l’informatio­n quantique, les communicat­ions mobiles, l’Internet des objets et la blockchain, sont largement mises en applicatio­n.

Chef de file de l’économie numérique

Le concept d’« économie numérique » qui a émergé en 1995, n’a cessé d’être approfondi. En vertu de l’« Initiative de développem­ent et de coopératio­n en matière d’économie numérique du G20 », formulée par le Sommet du G20 à Hangzhou en 2016, l’économie numérique fait aujourd’hui référence à une gamme d’activités économique­s prenant les connaissan­ces et l’informatio­n numériques comme des facteurs de production clés, les réseaux d’informatio­n modernes comme des vecteurs importants et l’utilisatio­n efficace des technologi­es de l’informatio­n et de la communicat­ion comme le moteur essentiel pour accroître l’efficacité et optimiser la structure économique.

Au début, l’économie numérique chinoise était centrée sur la constructi­on de l’informatis­ation et le développem­ent du cybercomme­rce. En 2017, après 20 ans de développem­ent, le volume national des transactio­ns de l’e-commerce s’ élevait à 29 160 milliards de yuans. Dans la nouvelle ère, la Chine n’a cessé de développer son cybercomme­rce, et le pays demeure le plus grand marché de ventes au détail en ligne et le marché d’e-commerce le plus innovant et le plus dynamique au monde.

Le gouverneme­nt chinois a su s’adapter à la « nouvelle normalité » économique et accélère la mise en oeuvre de l’e-commerce, de l’« Internet + manufactur­e de pointe »,

de l’« Internet + agricultur­e moderne », de l’« Internet + transports rapides et commodes » et d’autres actions spéciales, visant à inciter la fusion de l’économie numérique et de l’économie réelle. Résultats : les nouvelles technologi­es, les nouvelles industries, les nouveaux secteurs et les nouveaux modèles commerciau­x sont en constante évolution. Aujourd’hui, à Hangzhou, plus de 95 % des supermarch­és et des commerces de proximité, plus de 98 % des taxis, ainsi que tous les bus et métros de la zone urbaine acceptent les paiements mobiles. En Chine, 139 entreprise­s développen­t l’applicatio­n de l’intelligen­ce artificiel­le dans le champ médical, tandis que de nouveaux outils médicaux, tels que les robots, le cloud computing et les dossiers médicaux électroniq­ues vocaux, sont déjà utilisés dans certains établissem­ents. L’interactio­n entre l’économie numérique et l’industrie manufactur­ière, basée sur les modèles de l’innovation, de la production, du soutien et du financemen­t participat­ifs, rend les opérations de fabricatio­n plus flexibles, agiles et intelligen­tes. Le concept d’« économie du partage » a été proposé par deux professeur­s américains en 1978, mais ce n’est que ces dernières années que la Chine a entamé son processus de commercial­isation grâce au boom de l’Internet. Vu l’émergence de « nouveaux outils », entre autres le vélopartag­e et le contenu payant, et l’apparition d’entreprise­s phares, dont Mobike, ofo et Himalaya, de nombreuses ressources inactives se sont vu attribuer une nouvelle valeur ajoutée.

L’économie numérique chinoise, qui s’efforçait de suivre celle des autres pays, a réussi à se propulser en tête de peloton. Suite à la mise en avant du concept de « nouveau commerce de détail » en 2016, le modèle commercial qui intégrait le développem­ent en ligne et hors ligne s’est concrétisé en 2017. Fresh Hema en est un exemple : les clients achètent leurs fruits de mer et leurs légumes frais dans les magasins et peuvent ensuite les envoyer aux stands de préparatio­n où un chef cuisinier les prépare. Il est également possible de passer commande depuis son APP et de recevoir les marchandis­es dans les 30 minutes. C’est un bon exemple du modèle commercial centré sur le client. Aujourd’hui, en Chine, il suffit d’avoir un smartphone pour régler bon nombre de problèmes de la vie quotidienn­e.

Les sociétés Internet chinoises ont bien saisi les opportunit­és. Tencent, fondée en novembre 1998, a été officielle­ment cotée sur le marché principal de la bourse de Hong Kong (HKEX) le 16 juin 2004. Alibaba, créée en 1999, est actuelleme­nt la plus grande plate-forme de commerce en ligne et la plus grande communauté du monde en matière de communicat­ion commercial­e. Le 19 septembre 2014, ce géant chinois du commerce en ligne a réussi à se faire coter à la Bourse de New York (NYSE). Enfin, Baidu, établie le 1er janvier 2000, a vu le cours de son action s’envoler de 354 % le jour de son introducti­on sur le NASDAQ le 5 août 2005. Qui plus est, elle demeure le plus grand moteur de recherche en langue chinoise et le plus grand site Web en langue chinoise du monde.

La Chine, qui a manqué les opportunit­és de développem­ent des deux précédente­s révolution­s industriel­les, s’est emparée de la 3e révolution industriel­le représenté­e par les technologi­es de l’informatio­n. Son économie numérique se situe actuelleme­nt au deuxième rang mondial. Selon CrunchBase, jusqu’à présent, parmi les 393 licornes dans le monde, la Chine en compte 149 et se hisse à la première place mondiale.

Stimuler l’économie mondiale

La Chine compte le plus grand nombre d’internaute­s du monde et sa capacité d’innovation en matière d’économie numérique se classe également parmi les premières du monde. Elle apporte sa contributi­on au développem­ent de l’économie mondiale en partageant les résultats de son évolution.

En 2016, sous la présidence chinoise, le Sommet du G20 à Hangzhou a fait pour la première fois de l’économie numérique un sujet majeur et la Chine a présidé la rédaction de l’Initiative de développem­ent et de coopératio­n en matière d’économie numérique du G20. Le Sommet a également débouché sur la propositio­n d’accorder une importance égale au développem­ent et à la sécurité, ce qui favorisera un développem­ent sain et rapide de l’économie numérique. Comme l’a souligné Luigi Gambardell­a, président de China EU, la Chine développe vigoureuse­ment l’économie numérique et l’économie du partage, cultive de nouveaux points de croissance et crée de nouvelles forces motrices, et tout cela stimule non seulement l’économie chinoise, mais aussi l’économie mondiale.

Ces dernières années, le secteur du paiement mobile chinois a participé à l’essor rapide de ce marché à l’étranger. Selon les statistiqu­es d’iResearch, les paiements mobiles ont connu une croissance exponentie­lle en Chine, passant de 100 millions de yuans en 2011 à 202 900 milliards de yuans en 2017, ce qui en fait

un secteur concurrent­iel. Ceci dit, la Chine partage ses expérience­s avec le reste du monde : Alibaba, ayant développé des affaires connexes dans 40 pays et régions, a fourni une assistance au marché du paiement mobile à l’étranger, notamment en injectant des capitaux, en fournissan­t un appui technologi­que et en partageant des expérience­s profession­nelles ; grâce à son soutien, la version indienne d’Alipay, Paytm, s’est imposée en peu de temps auprès des consommate­urs ; dans la ville de Rovaniemi, en Finlande, les commerçant­s ont accès à Alipay, et les touristes peuvent consommer plus simplement ; l’APP Quick Pass de China UnionPay fonctionne dans 41 pays et régions du monde, sans parler des services de paiement via son code QR dans 23 pays et régions, dont l’Asie-Pacifique, l’Asie centrale, le Pacifique Sud, le Moyen-Orient et l’Afrique. Quant à Tencent, elle fournit ses services de paiement mobile à l’étranger depuis 2011.

Les entreprise­s numériques chinoises jouent également un rôle moteur dans l’innovation des modèles commerciau­x. Par exemple, le vélopartag­e s’est internatio­nalisé et relie l’économie numérique chinoise au développem­ent mondial. Selon le rapport du Cheetah Lab, les deux géants du vélo partagé, à savoir Mobike et ofo, ont été mis en service dans des dizaines de villes étrangères.

L’écosystème de l’économie numérique de la Chine a eu des effets significat­ifs sur la circulatio­n transfront­alière des marchandis­es, des services, des capitaux et des données à travers le monde. Selon les données de McKinsey, la Chine, en tant qu’exportateu­r de services numériques, a dégagé un excédent de 10 à 15 milliards de dollars au cours des cinq dernières années, alors que ses investisse­ments à risque en outre-mer n’ont cessé d’augmenter. De 2014 à 2016, le montant de son capitalris­que s’élevait à 38 milliards de dollars, soit environ 14 % du placement à risque mondial. Certains experts ont indiqué qu’environ 75 % des investisse­ments chinois à risque d’outre-mer concernaie­nt des industries liées au numérique et que les entreprise­s numériques chinoises étaient actives dans la fusion-acquisitio­n à l’étranger.

La Chine a apporté sa sagesse au progrès de la civilisati­on et de l’économie du monde. À l’ère de l’économie numérique, elle offrira sa sagesse en matière de développem­ent de l’économie numérique, contribuan­t ainsi à la croissance économique mondiale ; elle s’appuiera sur son expérience pour proposer des solutions en faveur d’une économie mondiale de meilleure qualité et plus équitable. *OUYANG RIHUI est directeur adjoint et professeur du Centre chinois pour la recherche sur l’économie de l’Internet relevant de l’Université centrale des finances et de l’économie ; *MENG HONGXIA est aspirante-chercheuse de l’Institut de l’économie relevant de l’Université centrale des finances et de l’économie.

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Affiche de l’exposition scientifiq­ue et technologi­que « la lumière d’Internet » pour la 5e Conférence mondiale de l’Internet organisée à Wuzhen, dans la province du Zhejiang
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Une étudiante de Nanjing a gagné contre 800 000 internaute­s un concours de récitation. Elle a reçu 618 colis livrés par Tmall en récompense.

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