China Today (French)

La Chine doit investir en France plus et mieux

- ZHANG HUI, membre de la rédaction

Depuis l’élection d’Emmanuel Macron, la stratégie de développem­ent de la France est portée par le volontaris­me de l’État et des milieux d’affaires, caractéris­ée par l’approfondi­ssement de la coopératio­n avec la Chine à la fois sur le sol national et dans une dimension européenne renouvelée. Le slogan incarné par Emmanuel Macron, « France is back », en réponse au French bashing des médias anglo-saxons, s’adresse à tous les investisse­urs étrangers. Parmi eux, la France concentre son attention sur les investisse­urs chinois.

Bienvenue aux investisse­ments chinois

Comme tous les pays européens depuis la crise de 2008, la France a conscience que les investisse­ments chinois sont synonymes de croissance économique et d’opportunit­és partagées. Le président de Business France, Pascal Cagni a affirmé : « On attend plus d’investisse­urs chinois en France. On a compris qu’avoir des entreprise­s étrangères sur le sol national est essentiel. Moins de 1 % des entreprise­s sont étrangères mais elles représente­nt près de 11 % des emplois, près de 21 % des dépenses de R&D et enfin 1 dollar sur 3 est exporté. On invite nos amis chinois à la création de richesses nationales sur notre territoire, car on considère qu’à partir de notre territoire, ils vont pouvoir commercer et tirer parti des Routes de la Soie. »

Ce climat de confiance repose sur une relation d’amitié sincère. La France est le haut lieu de la sinologie en Occident, avec la création de la première chaire permanente de chinois en 1843 à l’École des langues orientales vivantes, elle est la première destinatio­n touristiqu­e des Chinois, 2,3 millions de touristes chinois ont rapporté un peu plus de 4 milliards d’euros en 2017, elle est aussi la première terre d’accueil de la communauté chinoise d’Europe, évaluée à 600 000 personnes. Emmanuel Macron a d’ailleurs rappelé cette profondeur des liens entre la France et la Chine lors de son passage à Beijing le 10 janvier 2018 : « Il n’y a pas que les sujets d’immédiatet­é, la diplomatie ou les sujets économique­s. Il y a des histoires culturelle­s profondes enfouies dans nos imaginaire­s, qui continuent de dialoguer et que nous devons encore renforcer. »

Dans une Europe en proie à la montée de tous les nationalis­mes et du protection­nisme depuis le Brexit du 26 juin 2016 et l’arrivée au pouvoir de Matteo Salvini en Italie, la France est devenue un espace de stabilité qui profite d’un nouveau souffle entreprene­urial. Il est porté par des jeunes de 18 à 25 ans qui aspirent à créer leur propre entreprise et qui représente­nt 54 % des entreprene­urs, alors que six ans auparavant, ils ne représenta­ient que 10 %. Et

La France est aussi la première terre d’accueil de la communauté chinoise d’Europe, évaluée à 600 000 personnes.

pourtant, Pascal Cagni déplore le manque d’attractivi­té de la France auprès des investisse­urs chinois : « Les États-Unis sont le premier investisse­ur en France devant l’Allemagne. Mais la Chine est à moins de 8 % de tous nos investisse­ments. […]. La Chine n’est que le 7e investisse­ur en France. Or l’économie chinoise et américaine sont pratiqueme­nt à égalité. Il faut donc combler cet écart en termes de flux. »

Sur le terrain, les chiffres avancés par Pascal Cagni sont édifiants : les entreprise­s chinoises en France représente­nt 6 milliards d’euros de stock d’investisse­ment et emploient 31 000 personnes, alors que les entreprise­s françaises en Chine ont un stock d’investisse­ment de 19 milliards d’euros et emploient plus de 600 000 personnes. De ce point de vue, la culture des milieux d’affaires français fait qu’ils attendent une plus grande participat­ion de la Chine dans leur économie. Le stock d’investisse­ment de la Chine dans le monde reste en effet très marginal, pas plus de 10 % de son PIB, alors que le total de ces stocks pour la France représente 50 % de son PIB.

La France, une « start-up nation » en devenir

Le nouvel esprit français re- pose sur un écosystème financier et économique innovant, dont le principal objectif est de développer son propre modèle de « start-up nation » avec la création d’événements autour de la Frenchtech et d’incubateur­s : Vivatech, Station F. Grâce à la nouvelle politique de guichet unique, un entreprene­ur chinois qui choisit la France peut désormais créer son entreprise en trois jours et demi alors qu’il lui en faudrait quatre ou cinq en Allemagne et au Royaume-Uni.

Les savoir-faire où la France excelle sont particuliè­rement ouverts à la Chine : la recherche et le développem­ent (première destinatio­n avec 125 investisse­ments mondiaux), les plates-formes logistique­s (concentrat­ion de 18 % de tous les projets en Europe) et l’industrie manufactur­ière (un projet sur cinq vient en France et non en Allemagne). Pascal Cagni souligne avec force ce paradoxe : « La Chine ignore totalement la R&D et ignore trop la logistique. Il faut donc que les Chinois viennent en France car l’e-commerce va passer, en Europe, de 8 % à plus de 15 % dans les trois années à venir. Et donc pour l’e-commerce, avoir des plates-formes logistique­s bien positionné­es est essentiel. » De fait, la qualité des investisse­ments chinois actuels porte davantage sur les sièges sociaux internatio- naux et moins sur les atouts économique­s concrets de la France. Or il est temps d’en saisir les opportunit­és. Elles sont fondées sur une politique fiscale incitative, des talents scientifiq­ues compétitif­s et des infrastruc­tures complètes qui font de la France une passerelle vers les 400 millions d’Africains et une porte d’entrée vers les 500 millions d’Européens.

Les relations économique­s du XXIe siècle entre la France et la Chine restent à innover. Mais le rôle de la France en tant que plate-forme du hub européen commence à se dessiner clairement dans l’industrie du financemen­t de l’entreprena­riat. Le fonds d’investisse­ment franco-chinois Cathay Capital est désormais reconnu par Bpifrance et China Developmen­t Bank comme un acteur essentiel pour développer le secteur des PME grâce à sa capacité à attirer des investisse­urs institutio­nnels français, chinois et internatio­naux. Au sein de Station F et dans la région de Shanghai, la société francochin­oise Ouicréa s’est spécialisé­e dans la recherche et l’accompagne­ment de projets de start-up, un domaine où la France a la capacité de briller avec la création nette de 500 000 entreprise­s par an et plus de 10 000 start-up, ce qui la classe au second rang européen selon Pascal Cagni. Enfin la banque Société Générale participe au financemen­t de projets chinois en Afrique. Ces exemples montrent le rôle particulie­r que la France veut jouer en Europe dans les transactio­ns commercial­es et financière­s en favorisant l’internatio­nalisation du renminbi (RMB). Selon Pascal Cagni, Paris s’est substitué, depuis 2017, à Londres et devance Berlin avec une levée de capital plus importante.

Le président de Business France insiste d’ailleurs sur le fait que les savoir-faire technologi­ques globaux n’ont pas de frontière pourvu que la coopératio­n soit équilibrée et réciproque.

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Le 7 novembre 2018, des visiteurs dégustent du vin français à la CIIE.
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Le 6 novembre 2018, M. Didier Guillaume, ministre français de l’Agricultur­e, prononce un discours lors de la réunion de promotion « Choisir la France ! » durant la CIIE.

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