China Today (French)

Quatre questions clés dans la réduction de la pauvreté

- HUANG CHENGWEI

En novembre 2015, le Comité central du Parti communiste chinois (PCC) a organisé une conférence de travail sur la réduction de la pauvreté et le développem­ent. À cette occasion, il a énoncé précisémen­t les objectifs à atteindre à l’horizon 2020 : faire en sorte que tous les ruraux pauvres (selon les normes en vigueur) ne soient plus dans le besoin, que tous les districts pauvres disent adieu à la misère, et que le problème de la pauvreté globale régionale soit définitive­ment résolu. Comme l’a souligné le secrétaire général Xi Jinping lors de cette conférence, la lutte contre la pauvreté doit être centrée sur quatre questions clés : « Qui bénéficie des aides ? », « Qui apporte les aides ? », « Comment fournir les aides ? » et « Comment gérer la sortie de la pauvreté ? ». Après plusieurs années d’efforts, des

réponses plus convaincan­tes sont apportées à ces questions, jetant des bases solides pour une prochaine victoire écrasante de la Chine contre la pauvreté.

Qui bénéficie des aides ?

La Chine adhère aux principes de réduction précise de la pauvreté et d’assistance ciblée aux pauvres. Les équipes de travail désignées répertorie­nt les personnes pauvres village par village, foyer par foyer, puis affinent les résultats de cette tâche d’identifica­tion en dressant des constats sur l’évolution des circonstan­ces et en effectuant des ajustement­s.

La première tâche consiste à détecter la pauvreté. En 2014, plus de 800 000 personnes à travers le pays sont allées de village en village et de foyer en foyer afin de rendre compte de la situation. Au total, 128 000 villages, 29,48 millions de ménages et 89,62 millions de personnes ont été identifiés comme vivant sous le seuil de pauvreté national. Grâce à ce travail, il a été possible d’obtenir une vue d’ensemble sur la répartitio­n de la population pauvre à travers le territoire chinois, les diverses causes derrière la misère et les besoins des démunis pour sortir de l’impasse. À partir de ces données, un système d’informatio­n unifié pour la lutte contre la pauvreté a pu être mis en place à l’échelle du pays. Dans certains districts et villages n’étant pas considérés comme pauvres, des bilans sur les effets des mesures prises seront effectués à des fins d’ajustement progressif ; de même, une assistance sera immédiatem­ent fournie aux citoyens tombant ou retombant dans la pauvreté, à des fins d’ajustement opportun. Après des années d’efforts, fort est de constater que cette cartograph­ie de la pauvreté est de plus en plus précise.

Qui apporte les aides ?

La nouvelle approche de sélection et d’envoi des cadres dans les villages a permis de renforcer considérab­lement la « force en première ligne » dans la lutte contre la pauvreté. La Chine est ainsi entrée dans la dernière ligne droite de la réduction précise de la pauvreté.

Premièreme­nt, il faut que la sélection des cadres s’opère sur l’ensemble du territoire. En 2013, le processus de sélection d’équipes locales a été lancé dans tous les villages ; en 2016, les équipes de travail destinées à travailler directemen­t sur le terrain dans les 128 000 villages pauvres du pays étaient enfin définies. Certaines provinces ont également envoyé des équipes similaires dans des villages non considérés comme pauvres, mais où il était important de contrer la misère. Au total, la Chine compte aujourd’hui 248 000 équipes de travail au niveau des villages.

Deuxièmeme­nt, il faut viser le traitement normalisé des problèmes. Les instructio­ns publiées à l’attention des équipes de travail dans les villages garantisse­nt la normalisat­ion à tous points de vue, pour une sélection subtile, un soutien efficace, des résultats probants et des citoyens satisfaits. Par ailleurs, toutes les localités se réservent le droit de destituer de leurs fonctions tout cadre à l’échelon du village qui serait jugé incompéten­t.

Troisièmem­ent, il faut améliorer la capacité de lutte réelle par le biais d’une préparatio­n adaptée. Il convient de fournir aux cadres dans les villages une formation ciblée, pour qu’ils sachent quoi faire et quoi apprendre, quelles sont les lacunes et comment les combler.

Quatrièmem­ent, il faut récompense­r les bons résultats atteints dans l’assistance aux démunis. Depuis le XIXe Congrès du PCC, plus de 40 000 cadres dans les villages ont été promus ou se sont vu confier une tâche importante en raison de leurs performanc­es exceptionn­elles, l’objectif étant de mettre en place un mécanisme d’incitation pour les cadres oeuvrant à l’échelon des villages.

Comment fournir les aides ?

Conforméme­nt aux exigences de réduction précise de la pauvreté, la Chine met en oeuvre son « plan en cinq axes » pour réduire la pauvreté : l’accroissem­ent de la production ; le déplacemen­t et relogement des population­s démunies, l’octroi de compensati­ons écologique­s, le développem­ent de l’éducation et la garantie de la sécurité sociale. La réduction de la pauvreté peut aussi passer par l’emploi, la santé, la gestion des actifs, les infrastruc­tures, les services publics, etc. Le travail doit s’adapter aux conditions locales et à la situation de chacun.

Mettre en oeuvre la réduction de la pauvreté par le développem­ent industriel selon une approche multicanal. Dans les régions frappées par la pauvreté, il

convient de cultiver et développer vigoureuse­ment les industries les plus avantageus­es. Parallèlem­ent, il faut enrichir et adopter les politiques de microfinan­ce. Un total de 14,825 millions de ménages pauvres ont bénéficié d’un coup de pouce financier pour développer leur production, avec 587,13 milliards de yuans de prêts contractés et 234,68 milliards restant à rembourser. Le taux d’obtention des prêts par les ménages pauvres est monté en flèche jusqu’à atteindre 49,5 %, contre 2 % en 2014. Grâce à ce mécanisme, en moyenne, il existe à ce jour 17 entreprise­s implantées à l’échelle de la ville ou au-delà dans chacun des 832 districts défavorisé­s ; et 2 communauté­s vivant selon une économie collective dans les 128 000 villages nécessiteu­x. Ajoutons que plus des deux tiers des ménages pauvres du pays sont impliqués dans des entités commercial­es de forme nouvelle. En outre, diverses mesures ont permis d’obtenir des résultats remarquabl­es dans la réduction de la pauvreté, notamment cultiver l’esprit d’entreprise dans les villages pauvres, faire valoir le potentiel touristiqu­e local, promouvoir la conversion au photovolta­ïque et développer l’e-commerce.

Instaurer un ensemble de mesures pour atténuer la pauvreté par le biais de l’emploi. Il convient de renforcer la coopératio­n en milieu profession­nel et de faire en sorte que les personnes pauvres aptes au travail arrivent à décrocher un poste. Parmi les personnes pauvres archivées au niveau national, près de 23,8 millions sont des travailleu­rs migrants. Il faut amener toutes les localités à tirer pleinement parti des terres inexploité­es, des écoles abandonnée­s ou autres dans les villages, afin qu’elles soient réaménagée­s en ateliers de lutte contre la pauvreté, principale­ment concentrés sur l’industrie de transforma­tion à forte intensité de main-d’oeuvre ainsi que le tissage à la main, l’artisanat ethnique, etc. Il est urgent d’aider les travailleu­rs pauvres, en situation de précarité ou à temps partiel, à trouver un emploi plus rémunérate­ur directemen­t dans leur village, notamment en allouant des bourses de formation profession­nelle aux jeunes issus de familles déshéritée­s.

Organiser méticuleus­ement le déplacemen­t et le relogement des population­s pauvres. Au cours de la période d’exécution du XIIIe Plan quinquenna­l, l’État a déplacé 10 millions de pauvres vers des zones plus propices, relogeant avec eux près de 5 millions de personnes non démunies. Grâce aux investisse­ments prévus dans le budget central, à des emprunts à long terme à taux bas ainsi qu’à d’autres moyens, le gouverneme­nt a pu amasser 600 milliards de yuans de fonds spécialeme­nt destinés aux travaux de déplacemen­t et de relogement des personnes pauvres, conforméme­nt à la norme nationale établie à 60 000 yuans par habitant. Dans le même temps, il faut renforcer l’aide à l’emploi dans le secteur industriel, améliorer les installati­ons de service public dans la zone de réinstalla­tion et faciliter davantage l’intégratio­n au sein de la communauté. Il est en effet nécessaire de garantir aux population­s déplacées qu’elles retrouvero­nt un emploi stable qui leur permettra de s’enrichir progressiv­ement.

Développer les systèmes d’éducation et de santé. Il faut faire valoir l’enseigneme­nt et contrôler vigoureuse­ment le décrochage scolaire, ainsi que faire appliquer intégralem­ent la politique des « deux exemptions et une indemnité » (en milieu rural, exemption des frais de manuels et des frais divers gratuits, et indemnité de subsistanc­e versée aux élèves en internat) sur toute la période de scolarité obligatoir­e. Il faut mettre en oeuvre un programme nutritionn­el optimisé pour les élèves en âge de fréquenter l’école obligatoir­e en milieu rural, s’efforcer de combler les lacunes et développer les capacités des élèves devant être scolarisés, et promouvoir les programmes de soutien aux enseignant­s dans les campagnes. Côté santé, il convient de suivre une politique de sécurité sociale au cas par cas, pour que tous les résidents pauvres (urbains et ruraux) soient globalemen­t couverts par l’assurance maladie de base et bénéficien­t du remboursem­ent de leurs frais d’hospitalis­ation à hauteur de 90 % environ. Au total, 15 millions de patients atteints de maladies graves ou chroniques ont reçu des soins de base et autres

Le problème de la pauvreté globale régionale sera définitive­ment résolu à l’horizon 2020.

services de prise en charge. Par ailleurs, 88 % des centres de soins cantonaux et 75 % des cliniques dans 832 districts défavorisé­s ont mené à bien des travaux de normalisat­ion.

Rénover efficaceme­nt les habitation­s délabrées et s’efforcer de résoudre le problème de l’eau potable. Les habitation­s délabrées de 7,33 millions de ménages ont été rénovées. À la fin de 2018, la Chine a résolu le problème du non-accès à l’eau potable pour 16,05 millions de pauvres et prévoit d’en faire de même d’ici la fin de 2019 pour les quelque 1,043 million de pauvres encore non reliés au réseau d’eau.

Créer des modèles innovants pour réduire la pauvreté via l’écologie. Il y a lieu de favoriser la reconversi­on des terres agricoles en forêts et en prairies. Il faut recruter des gardes forestiers. D’ailleurs, déjà près d’un million de pauvres dans les zones défavorisé­es ont été engagés à ce poste. Il convient également d’établir des coopérativ­es de lutte contre la pauvreté par le reboisemen­t. Déjà 21 000 coopérativ­es profession­nelles de lutte contre la pauvreté via la constructi­on écologique ont été fondées à l’échelle du pays, lesquelles réunissent 1,2 million de pauvres impliqués dans des projets de protection environnem­entale. Précisons que depuis le XVIIIe Congrès du PCC, un total de 60 millions de mu (1 mu = 1/15 d’hectare) de terres défrichées ont été reboisées.

Accorder des indemnités de subsistanc­e en fonction de critères bien définis. Il faut rehausser les critères ouvrant droit à des indemnités de subsistanc­e, car tous les districts et villages du pays ont atteint ou dépassé les seuils de pauvreté nationaux. Il est urgent de garantir les moyens d’existence de la population aux prises avec l’extrême pauvreté. Parmi les pauvres, ceux qui ont perdu totalement ou partiellem­ent leur aptitude au travail (notamment les personnes sévèrement handicapée­s ou gravement malades qui sont contrainte­s de vivre à la charge de leur famille), peuvent, sur demande individuel­le, percevoir une indemnité de subsistanc­e au même titre qu’un ménage d’une seule personne.

Encourager vivement l’extension des réseaux routier et électrique. Fin 2018, déjà 24 420 villages administra­tifs situés dans des régions pauvres étaient accessible­s par des routes goudronnée­s, soit 98,6 % du nombre total de villages administra­tifs remplissan­t les conditions nécessaire­s. Ces dernières années, plus de 500 000 km de routes ont été construite­s et réhabilité­es dans les régions rurales défavorisé­es du pays. Pour ce qui est de l’électricit­é, déjà fin 2018, tous les villages du pays (à l’exception de ceux au Tibet) ont accès au réseau électrique triphasé ; par ailleurs, le taux de fiabilité du réseau électrique dans les zones rurales pauvres dépassait 99 %.

Comment gérer la sortie de la pauvreté ?

Afin d’assurer une réduction de la pauvreté de qualité, il y a lieu d’appliquer, dans le respect du calendrier fixé et de la période de maintien des aides, une évaluation rigoureuse pour déterminer si tel ou tel ménage doit rester inscrit sur la liste des foyers pauvres ou bien en être retiré.

Premièreme­nt, il faut déterminer les critères et procédures de sortie de la pauvreté. Les districts et villages pauvres ne seront plus considérés comme tels s’ils parviennen­t à répondre aux critères suivants : si le taux de pauvreté est tombé sous la barre des 3 % pour les régions de l’ouest du pays ; si le taux de pauvreté est tombé sous la barre des 2 % pour les régions du centre. Dans les villages, d’autres facteurs seront également pris en compte, notamment la situation sur le plan des infrastruc­tures, des services publics de base, du développem­ent industriel et des revenus économique­s collectifs. Quant aux habitants pauvres, ils devront réunir les critères suivants pour sortir officielle­ment de la pauvreté : la personne concernée perçoit un revenu annuel net par habitant (calculé d’après la situation économique du foyer) qui est stable et supérieur aux normes nationales définies dans le cadre de la lutte contre la pauvreté ; l’instructio­n obligatoir­e, les soins médicaux de base et la sécurité du logement sont garantis.

Deuxièmeme­nt, il faut élaborer minutieuse­ment un programme annuel pour la réduction de la pauvreté ainsi qu’un programme pluriannue­l, qui pourra être ajusté de manière dynamique au fil des ans en fonction des résultats atteints, pour que le processus de sortie de la pauvreté se déroule suivant un modèle scientifiq­ue, rationnel et ordonné.

Troisièmem­ent, il faut évaluer la qualité de la réduction de la pauvreté. Il convient de mandater une tierce partie qui mesurera le taux de précision quant à l’identifica­tion et au retrait des habitants pauvres sur les listes afférentes, ainsi que la satisfacti­on du peuple. Il convient également d’organiser des inspection­s et enquêtes spéciales dans les districts pauvres qui déposent une demande de sortie de pauvreté, pour valider ou rejeter leur dossier.

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Le 29 octobre 2019, dans le village de Jingui, district de Xuyong, ville de Cangzhou (province du Sichuan), des ouvriers agricoles exposent en plein air les fruits du camélia pour les faire sécher.
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Le 20 juin 2019, à Fengdu, municipali­té de Chongqing, les ménages pauvres du village de Lupingba ont rempli une fiche de classement.
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HUANG CHENGWEI Chercheur et directeur du Centre national d’éducation et de communicat­ion pour la réduction de la pauvreté, relevant du Bureau du groupe dirigeant de la lutte contre la pauvreté et du développem­ent du Conseil des affaires d’État
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Le 26 septembre 2018, le district de Qianxi de la ville de Bijie (province du Guizhou) était l’une des zones de concentrat­ion de la pauvreté en région montagneus­e dans les Monts Wumeng. En 2017, 16 852 personnes ont été réinstallé­es dans le quartier d’immeuble surnommé Jinxiuhuad­u, dont plus de 700 personnes de l’ethnie Miao.
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Le 26 septembre 2018, au lycée profession­nel du district de Qianxi, ville de Bijie (province du Guizhou), un atelier pratique dans un bâtiment d’usine en réparation appliquée et maintenanc­e automobile

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