ENFANTS BRANCHÉS, PARENTS CYBERFUTÉS
L’UTILISATION DE L’INTERNET ET DES RÉSEAUX SOCIAUX N’EST PAS SANS RISQUE POUR NOS JEUNES NAVIGATEURS. CONSEILS D’EXPERTS POUR LES PROTÉGER ET ASSURER NOTRE TRANQUILLITÉ D’ESPRIT.
Nés dans la marmite du virtuel, nos rejetons? Ça oui! Sont-ils toutefois équipés pour éviter certains pièges, comme la cyberintimidation ou la sextorsion? Les TIC (technologies d’information et de communication) n’ont pourtant rien de diabolique. C’est la combinaison de deux facteurs, soit le manque de compétences numériques de bien des parents et la navigation pratiquée souvent en solo par les jeunes, qui aurait davantage lieu de nous inquiéter, soutient Jean-François Sauriol, conseiller en sécurité informatique et conférencier: «Dans le cadre des ateliers que j’anime au primaire et au secondaire, je pose toujours les deux questions suivantes: «Qui d’entre vous se considère meilleur internaute que ses parents?» et «Qui se trouve souvent seul dans sa chambre, branché sur internet?» Dans un cas comme dans l’autre, les trois quarts des élèves interrogés lèvent la main.»
Parents 3.0
D’où l’importance d’être sur la même longueur d’onde que nos hyperconnectés, en acquérant des connaissances numériques et en étant au courant de leurs activités en ligne. On leur transmet nos valeurs, «mais à la mesure de l’internet», précise M. Sauriol. Le civisme, le respect de soi et celui des autres, ça s’applique aussi en ligne. Comme ce n’est pas toujours évident pour eux de transposer, sur le web, ce qu’ils ont appris à la maison, on gagne à les habituer le plus tôt possible à bien utiliser les technologies et à interagir correctement avec les autres sur les réseaux sociaux, recommande Cathy Tétreault, fondatrice et directrice générale du centre Cyberaide: «Ils sont bombardés d’applications pouvant les amener à commettre des gestes qu’ils ne poseraient pas en temps normal. Par exemple, sur Yellow, site de rencontre du genre Tinder, mais pour les 13 à 17 ans, ça vire rapidement au sexe! Poussés à se trouver un chum ou une blonde, de jeunes filles et garçons se vendent à l’aide de photos osées. Or ils ne sont pas prêts pour ça.» »»
S.O.S., cyberméchants
Même s’ils ont appris à distinguer le bien du mal, nos enfants ne font pas toujours preuve de jugement critique. En quête d’identité et de valorisation, certains tombent dans les pièges tendus par des prédateurs ou des arnaqueurs, qui ont le don de repérer et de manipuler les plus timides ou les plus gauches socialement. Ils sont aussi nuisibles et menaçants sur le web que dans la réalité. Nos jeunes ont donc besoin de nous pour leur offrir un encadrement rassurant, comme dans la vraie vie. À nous de leur rappeler que des images ou des mots mis en ligne peuvent être vus par tout le monde, de dire à celui qui va sur Instagram, par exemple: «Ne tape pas là-dessus» ou «N’accepte pas cette amitié», de répéter à notre YouTubeur enthousiaste qu’une vidéo gênante pourrait se retrouver au Japon ou, à notre ado, que son amie virtuelle pourrait être en réalité un maquereau quinquagénaire. La prévention est de mise!
Une équipe du tonnerre
Se connecter à notre jeune ne signifie pas jouer au policier, mais plutôt dialoguer avec lui, dit M. Sauriol. «Il y a quelques années, j’ai aperçu le mot “bestialité” dans l’historique de navigation de l’ordi familial. Sachant que mon fils avait lancé la recherche, j’ai entamé une discussion franche avec lui.» Des questions du genre «Pourquoi veux-tu télécharger cette application?», «Communiques-tu avec des utilisateurs que tu ne connais pas?», «Reçois-tu des demandes qui te mettent mal à l’aise?», «M’en parlerais-tu si cela se produisait?», ça se pose, assure Mme Tétreault. «Si notre jeune est victime, témoin ou auteur de propos intimidants, la collaboration parent-enfant est essentielle.»
«MÊME S’ILS ONT APPRIS À DISTINGUER LE BIEN DU MAL, NOS ENFANTS NE FONT PAS TOUJOURS PREUVE DE JUGEMENT CRITIQUE. EN QUÊTE D’IDENTITÉ ET DE VALORISATION, CERTAINS TOMBENT DANS DES PIÈGES.»
Elle ajoute qu’heureusement, les enfants sont de plus en plus capables de dénoncer et d’aller chercher l’aide nécessaire lorsqu’ils sont pris dans un conflit sur un réseau social. «Les écoles outillent les élèves et font un grand travail de prévention.»
Pour sa part, le fils de M. Sauriol est désormais plus enclin à le consulter quand quelque chose le trouble sur le web. «Parce qu’il sait que je m’intéresse à lui et à ce qui se passe dans sa vie. Si l’on n’est pas là, quelqu’un d’autre ayant de mauvaises intentions le sera à notre place.»