Échos vedettes

Alain Stanké: sur les traces des héros de la guerre

PASSIONNÉ PAR LES BELLES HISTOIRES ENTOURANT LA DEUXIÈME GUERRE MONDIALE, L’EX- ÉDITEUR ET AUTEUR ALAIN STANKÉ NOUS PRÉSENTE LE RÉSEAU SHELBURNE, SH COÉCRIT AVEC SON AMI D’ENFANCE JEANLOUIS MORGAN. RETRAÇANT LES ACTES DE BRAVOURE MÉCONNUS D’ESPIONS QUÉBÉC

- VICTOR-LÉON CARDINAL

DepuisD i qu’il ’il a quitté,itté en 2002 2002, le monde de l’édition dans lequel il a travaillé durant 42 ans, Alain Stanké a travaillé fort à écrire des livres et à réaliser des documentai­res mettant en lumière des héros de la guerre dont certains exploits ne sont pas toujours reconnus à leur juste valeur. Avec Le réseau Shelburne, qui a nécessité plus de deux ans de recherches, l’auteur nous parle de ceux qui étaient surnommés à l’époque les Étrangers de l’ombre. «Un jour, un ancien combattant est venu me voir pour me dire de me pencher sur l’histoire d’un ancien sous- officier, aujourd’hui décédé, prénommé Lucien Dumais. En fouillant, j’ai appris qu’après avoir survécu à la bataille de Dieppe et fui les Allemands en 1942, Dumais s’est retrouvé en Angleterre, où il a joint la Résistance française. C’est à partir de ce moment qu’il a intégré le réseau Shelburne, dont la mission était de rapatrier clandestin­ement des pilotes anglais ayant atterri d’urgence dans une France conquise par les Allemands. Son compatriot­e canadien Raymond Labrosse faisait aussi partie de ce réseau qui a permis de sauver durant la guerre jusqu’à 135 aviateurs ainsi que 307 Alliés des mains de l’envahisseu­r. De nos jours, les exploits de ces hommes sont étudiés en Europe, mais ils sont très peu connus ici, au Québec», résume-t-il.

SUR LES TRACES DES SURVIVANTS

Bien qu’il n’ait pas pu rencontrer en personne les officiers Dumais et Labrosse, décédés il y a quelques années, Alain Stanké a tout de même

«J’ai échappé plusieurs fois à la mort.»

réussi à retracer des témoins de l’époque. «Plusieurs sont morts aujourd’hui. Heureuseme­nt, j’ai la chance de travailler avec l’excellente recherchis­te Marie- Claude Dufour, qui est partie 10 jours en France cogner aux portes des gens concernés. Avec le temps, j’ai pu rencontrer le dernier pilote vivant qui a réussi à fuir grâce au réseau Shelburne. Il vit maintenant au Texas et se souvient d’avoir sauté de son avion en flammes comme si c’était hier. J’ai aussi rencontré Guy Hamilton, qui a réalisé quatre films de James Bond dans les années 1960 et 1970. Il est mort peu de temps après notre entretien. Durant la guerre, il était l’assistant d’un commandant de la Royal Navy, David Birkin, qui était à la tête du navire aidant les combattant­s de la France libre à rejoindre l’Angleterre. Lorsque mon équipe a approché sa fille, la chanteuse Jane Birkin, celle- ci a tout de suite accepté de signer la préface du livre. Elle voue une grande admiration à son père, et elle aimerait bien qu’un film soit fait un jour avec l’histoire de ce livre.»

DES SOUVENIRS D’UNE AUTRE ÉPOQUE

Né en 1934 en Lituanie et arrivé au Québec en 1951, Alain Stanké a lui- même vécu durant son enfance l’horreur des camps de concentrat­ion nazis lorsque sa famille a été déportée en Allemagne dans les années 1940. «C’est peutêtre parce que j’ai vu à quel point le monde pouvait être affreux que je me penche à présent sur les belles choses qui se sont passées à cette même époque. On nous montre beaucoup moins souvent les belles histoires de la guerre. Avec le temps, je me suis spécialisé là- dedans. C’est une manière que j’ai trouvée pour me réhabilite­r et me dire que les gens ne sont pas si méchants. En ce qui me concerne, j’ai échappé plusieurs fois à la mort. Je me suis même retrouvé, à l’âge de cinq ans, sur un peloton d’exécution. Je n’aime cependant pas en parler», dit-il.

Malgré ses mauvais souvenirs, l’auteur conserve chez lui deux objets lui rappelant cette période sombre de sa vie. « J’ai gardé le chapelet que j’avais le jour de ma première communion. Je me dis que c’est peut- être le Bon Dieu et toutes mes prières qui m’ont sauvé la vie. J’ai aussi conservé la fourchette que j’avais au camp de concentrat­ion. J’ai mangé du rat avec cette fourchette. Lorsque je la vois aujourd’hui, ça me rappelle le chance que j’ai eue et ça m’incite à vider toutes mes assiettes», souligne-t-il avec un clin d’oeil.

UNE PASSION POUR LA SCULPTURE

Après s’être départi, l’automne dernier, d’un terrain de 36 arpents qu’il possédait à SaintValér­ien-de- Milton, en Montérégie, Alain Stanké passe maintenant l’ensemble de son temps à Montréal. « C’était fou tout ce que nous avions accumulé dans notre maison de campagne. J’en ai donné la moitié à une société de Saint- Hyacinthe qui s’occupe des migrants, et j’ai vendu le reste dans un encan. Je n’ai toutefois plus d’atelier où faire mes sculptures. Je suis actuelleme­nt à la recherche d’un nouvel endroit.»

Par ailleurs, après avoir été victime il y a quelques années d’un infarctus, Alain Stanké affirme ne pas avoir d’ennuis de santé. «À la suite de mon incident, on m’a installé un pace

maker. Depuis ce temps, je me porte très bien.»

UN HOMME BIEN ENTOURÉ

L’artiste peut se vanter d’être bien entouré. «J’ai quatre enfants et cinq petits- enfants. J’ai une fille qui est orthophoni­ste, une autre qui travaille dans une bibliothèq­ue, et ma fille Sophie est journalist­e et a fait un peu de politique dans les dernières années. Elle est actuelleme­nt au Pérou avec Oxfam. Pour sa part, mon fils, Alexandre, continue à faire de la musique.»

L’auteur partage toujours sa vie avec sa conjointe, Josette, qui est psychothér­apeute et conférenci­ère. «Ma conjointe est française et elle écrit beaucoup. Nous sommes ensemble depuis 1972, mais nous avons connu des “récréation­s”. J’entends par là que nous n’avons pas vécu ensemble durant 14 ans. Notre histoire pourrait aussi faire l’objet d’un film!» s’exclame- t- il en terminant.

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