PERVERS
Portant le sous-titre très évocateur « », cet ouvrage de Jesse Bering avait tout pour piquer ma curiosité. L’auteur remporte le pari d’aborder la question du désir et de la libido avec brio puisqu’il marie avec élégance et sans fausse pudeur, dans un ensemble fort bien ficelé et vulgarisé, la science, la psychiatrie et l’humour (il nous révèle, par exemple, s’être masturbé sur des images de Néandertal poilu au début de l’adolescence)! La question fondamentale est la suivante : que se passe-t-il dans notre tête lorsque nous regardons ou lorsque nous pensons à l’autre? Pourquoi certains fantasment-ils sur les pieds alors que d’autres ne jurent que par les lobes d’oreilles ou certains autres, plus rares, sur les éternuements (je ne blague pas)? Pourquoi certains préfèrent-ils ceux du même sexe alors que d’autres sont orientés vers le sexe opposé? Pourquoi les hommes ont-ils une sexualité plus cristallisée et les femmes, plus fluide? L’ouvrage nous permet de découvrir que, fondamentalement, nous sommes tous pervers, mais que la différence entre ce qui est correct et ce qui ne l’est pas, s’explique avant tout par une courbe statistique : plus une paraphilie est partagée par un grand nombre et plus elle est considérée normale et vice versa. Certaines données sont particulièrement amusantes, en particulier le fait que de nombreuses études ont démontré que, très généralement, plus un homme est intolérant à l’endroit de l’homosexualité, plus forte est son érection lorsqu’il est confronté à de la pornographie gaie. Les exemples et cas d’espèce utilisés par l’auteur sont clairs et illustrent bien son propos et ses questionnements. «Questionnements » est le bon terme à utiliser pour décrire l’ouvrage puisqu’il ne prétend pas avoir toutes les réponses et que certaines interrogations demeurent donc sans réponse, mais il demeure fascinant d’examiner celles-ci et l’évolution du regard social porté sur la sexualité (après tout, il y a peu, l’homosexualité était encore considérée comme une perversion). Il faut lui rendre également justice d’aborder de front des questions extrêmement délicates comme celle de la pédophilie avec, cependant, un regard scientifique pour en comprendre l’origine et illustrer le cauchemar souvent vécu chez ceux animés par ce désir. Un ouvrage fascinant qui risque d’animer de nombreuses discussions et qui porte un regard frais et résolument neutre sur la zone croustillante et grivoise, souvent bien cachée, qui nous habite.
sexuels! Nous sommes tous des déviants
Auteur et personnage central de ce roman, qui se déroule le temps d’un week-end, Claude Éthier nous présente ici un alignement de planètes entre son narrateur homonyme et Dominique Fraser, au coeur d’une rencontre fortuite dans une gargote du parc Lafontaine pendant un mois de janvier particulièrement frisquet. Le premier est âgé de 20 ans et le second de 16 ans et le coup de foudre est instantané, ce qui les amène à consacrer un week-end entier à l’exploration de leurs corps respectifs, mais également à se découvrir, peu à peu, et à laisser tomber les masques et les faux semblants. Pour ajouter à la confusion entre la réalité et la fiction, il faut noter que le roman s’ouvre sur un prologue écrit par nul autre que Dominique Fraser qui nous explique que l’auteur cherche à y transposer l’embrasement des corps et de l’âme du Cantique des cantiques dans un contexte d’amours masculines. Réalité ou fiction? Difficile à dire comme il est également ardu de déterminer ce que leur réserve l’avenir à la clôture de ce week-end de reconnaissance en terrain étranger. Disponible en format électronique.