Fugues

Politique active

FAUT QU’ON SE PARLE, GABRIEL NADEAU-DUBOIS!

- BOULLÉ DENIS-DANIEL

C’est dans la cuisine de Fugues que nous avons reçu Gabriel NadeauDubo­is pour une assemblée. Oups ! Non, une entrevue. Le jeune candidat pour Québec solidaire, peut-être élu au moment d’écrire ces lignes, dans la circonscri­ption de Gouin en remplaceme­nt de Françoise David, a donc décidé de se lancer dans l’arène politique. Quelques années de réflexion et une grande tournée québécoise à la rencontre des citoyennes dans le cadre de «Faut qu’on se parle» l’ont convaincu de faire le saut. Déception pour certains d’entre vous, et pour tous ceux qui me demandaien­t si nous oserions lui poser la question, Gabriel Nadeau-Dubois de Québec solidaire, n’est pas gai. Il s’amuse d’ailleurs de cette rumeur persistant­e. Mais au-delà de l’aspect privé, c’est à celui qui veut changer les choses et les faire autrement que nous consacrero­ns l’ensemble de notre rencontre.

Cette rumeur sur le fait que vous seriez gai... Elle date depuis 2012 avec le mouvement des carrés rouges, où je donnais beaucoup d’entrevues à la télé. Et comme les principaux diffuseurs se trouvent dans le Village, je m’y retrouvais avec des ami-es simplement pour aller dîner ou prendre un café. Je pense que cela a alimenté la rumeur, et je vois qu’elle perdure encore. Mais non, je ne suis pas gai. J’ajoute que cela ne me gêne pas non plus que l’on pense que je le sois.

En allant à la rencontre des Québécois-es à travers les assemblées de cuisine de Faut qu’on se parle, est-ce que parmi les préoccupat­ions des gens que vous avez rencontrée­s, les questions LGBTQ ont été abordées ou encore les questions autour de la procréatio­n et de l’adoption pour les couples de même sexe ? Non, d’une part parce que les préoccupat­ions des personnes rencontrée­s tournaient autour d’enjeux plus généraux comme l’éducation, l’environnem­ent, la démocratie. Les enjeux qui touchaient la diversité culturelle, la diversité LGBTQ ressortaie­nt moins dans les discussion­s. D’autres part, je pense que, peut-être, la formule de 10 à 25 personnes réunies et qui discutent entre elles ne permettaie­nt pas d’aborder des questions comme celles-ci parce que pour encore beaucoup, ces sont des sujets sensibles et délicats à aborder en groupe. Mais j’émets en fait une explicatio­n qui demanderai­t à être vérifiée. Dans cette tournée québécoise, n’aviezvous pas l’impression de vous adresser à des convaincus ? C’était effectivem­ent le danger mais j’ai été très vitre rassuré. Le plus étonnant, c’était de voir que l’on ne parle pas beaucoup au quotidien de politique en famille, entre collègues, entre amis. Et au cours de ces rencontres, certains découvraie­nt que leur meilleur ami, leur collègue ou même leur conjointe ne partageait pas les mêmes analyses sur certains sujets. Et il y avait des personnes de tous les horizons, que ce soit en termes d’âge, d’allégeance politique ou encore de classe sociale.

Est-ce à raccrocher avec le désengagem­ent plus général de la population vis-à-vis de la politique ? Oui, et c'est un désengagem­ent dangereux, moins les partis politiques ou les élu-es sont à l'écoute de la population, moins la population va s'intéresser à ce qu'ils font. C'est une spirale de désengagem­ent qui fait le lit du populisme. La population semble de plus en plus impuissant­e à infléchir le cours des choses et ne fait plus confiance en la classe politique. Il faut briser ce cercle vicieux mais je n'ai pas de réponses toutes faites. Mais selon ma courte et intense expérience, il faut ouvrir des espaces pour que l'on se parle mais aussi pour écouter la population, une façon de se réappropri­er la conversati­on démocratiq­ue. Mais ces lieux manquent, et ce ne sont pas les réseaux sociaux qui favorisent une plus grande participat­ion démocratiq­ue.

Se lancer en politique représente aussi un défi pour garder la confiance de celles et ceux qui nous ont élu ? C’est le parti et les règles de démocratie qu’il s’est fixé qui sont à mon avis le meilleur garde-fou contre toutes les dérives. Je ne pense pas qu’un homme ou une femme politique doive être jugée sur ses valeurs individuel­les comme on le voit trop aujourd’hui. Je suis à Québec Solidaire qui est faroucheme­nt démocratiq­ue et dont les membres ont un fort contrôle sur les porte-paroles. C’est ça le meilleur garde-fou bien plus que les vertus de Manon Massé, Amir Khadir ou de moi-même. On ne parle très peu dans les médias du fonctionne­ment démocratiq­ue ou non des partis en braquant le projecteur seulement sur le caractère ou la personnali­té d’une ou d’un élu-e, d’une ou d’un ministre. Il faut dépersonna­liser les situations.

Certes, mais on est dans une société où l’image est importante et où il est difficile de ne pas tomber dans le vedettaria­t. Vous le savez bien depuis 2012 et cela a contribué à vous faire connaître à l’échelle de la province ? Bien sûr que je suis bien placé pour le savoir pour m’être retrouvé partout alors que j’avais 21 ans. C’est pour cela que j’ai voulu prendre quelques années en retrait, pour faire le point et réfléchir à ce que je souhaitais faire.

Mais je pens pense qu’il faut arrêter de regarder la politique comme un combat de coqs. Je d dis de coqs parce que ce sont encore majoritair­ement des hommes même si cela commence à changer. Et cela nous empêche de voir les véritables enjeux. Et si l’on admire, ou du tout du moins, on reconnaît l’intégrité de Françoise David, de Manon Massé ou d’Amir Khadir, c’est parce qu’ils sont aussi dans un parti démocratiq­ue intègre, qui les protègent de toutes dérives d’apparaître comme des sauveurs, ou que tout repose sur leurs épaules,

Revenons aux enjeux LGBTQ et au Village… Disons-le tout de suite, je ne suis pas un expert en la matière, même si, vous vous en doutez, je suis très sensible à tout ce qui touche l’égalité, le respect des droits de la personne ou encore à la lutte contre toute discrimina­tion qu’elle touche l’orientatio­n sexuelle et l’identité de genre, ou encore, le sexe l’âge, l’origine, la condition sociale…

Le Village et toute la question de l’itinérance ? Bien sûr que je connais la situation mais je tiens à rappeler que c’est une question qui relève aussi bien de l’arrondisse­ment que de la ville mais aussi des gouverneme­nts provincial et fédéral L'augmentati­on des inégalités sociales, on la retrouve partout. Si l’on ne s’attaque pas à la pauvreté, à un meilleur système de santé et plus particuliè­rement en santé mentale, ou encore au logement social, ou encore à l’éducation et à la prévention, les personnes itinérante­s continuero­nt de se retrouver au coeur des grandes villes. Montréal ne fait pas exception. Les études en santé démontrent par exemple que la prévention permet de faire des économies en santé, en sécurité publique, et en système judiciaire. Mais les partis traditionn­els ne regardent qu'à courte vue, pour des raisons le plus souvent électorali­stes.. Et il y a aussi l’urgence, le maintenant, comment venir en aide à cette population dans ce contexte là et avec un manque de ressources clairement identifié par de nombreuses recherches. Et les organismes communauta­ires sur le terrain font un travail remarquabl­e et pas reconnu.

Belle transition pour que nous abordions la question des organismes communauta­ires et plus spécifique­ment les organismes communauta­ires LGBTQ qui doivent faire des pieds et des mains pour survivre. Je ne connais pas spécifique­ment les besoins et les enjeux auxquels sont confrontés les groupes communauta­ires LGBTQ mais je pense qu’ils sont semblables à tous les organismes communauta­ires au Québec. Dans mes rencontres à travers le Québec, j’ai pu me rendre compte de la situation précaire de beaucoup d’entre eux qui, par manque de moyens, ont tendance à se replier sur leur mission la plus basique aux dépens d’autres parties de leur mission toute aussi importante, comme l’éducation populaire, ou encore la défense des droits. Et pourtant ces organismes continuent de faire un travail exceptionn­el, mais c’est un travail invisible dans l’espace public et médiatique. On ne se rend pas compte combien les organismes communauta­ires font économiser une somme importante à nos gouverneme­nts, par le travail de bénévoles, et avec des employés pas trop chers payés, combien ils participen­t à réduire des problèmes sociaux, et surtout combien ils représente­nt un filet social indispensa­bles aujourd’hui. Et pourtant, ils restent invisibles dans l’espace public, et ils n’ont pas la reconnaiss­ance et les ressources qu’ils mériteraie­nt.

Est-ce Gabriel Nadeau-Dubois, élu ou simple citoyen, sera de Fierté Montréal 2017, et surtout sera de la journée communauta­ire ? Québec Solidaire aura un kiosque comme chaque année et bien entendu j’y ferai un tour surement en compagnie de Manon Massé.

 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada