Fugues

Fédération des femmes du Québec

- DENIS-DANIEL BOULLÉ

moi moins, on peut en parler, et je suis toujours ouverte avec les groupes de femmes ou des femmes à en parler. Une résistance mais avec des espaces pour en parler, et je suis tout à fait à l’aise avec cela. Je savais qu’il y aurait des réactions négatives, mais je ne pensais pas qu’elle se ferait avec autant d’acharnemen­t.

Par exemple, Denise Bombardier a consacré trois chroniques pour remettre en cause ma nomination. Elle s’est fait l’amplificat­rice du mouvement transphobe, presque la porte-parole. Et ce qui veut tout dire, ces chroniques ont été reprises sur le site de La Meute à Québec.

En repensant à la polémique autour de ma nomination, je me suis rendue compte que nous étions dans une société où on tolère les personnes trans mais à condition qu’elles ne sortent pas de la boîte dans laquelle elles sont assignées. En somme, qu’elles ne se mêlent pas d’autres choses que des questions trans, car dans ce cas elles dérangent, elles embêtent.

La journée internatio­nale des femmes le 8 mars dans la foulée du mouvement Me Too?

Le 8 mars est une journée importante car la FFQ joue un rôle important dans certaines des célébratio­ns. Nous faisons partie du Collectif 8 mars qui regroupe des syndicats et des organismes de diverses origines, ensemble on prévoit des actions et des campagnes, cette année le slogan est : Le féminisme, tant qu’il le faudra! Ce qui veut dire que l’on est féministe et que l’on travailler­a sur ces enjeux-là tant qu’il faudra le faire. Notre rôle est de représente­r les avancées collective­s et de défendre la pluralité des expérience­s. Je serai donc fièrement la porte-parole du Collectif du 8 mars.

À l’automne dernier, la Fédération des femmes du Québec (FFQ) choisissai­t Gabrielle Bouchard comme présidente. Ce qui apparaissa­it comme une preuve de maturité du mouvement féministe a suscité beaucoup de réactions dans la presse généralist­e. Comment une femme trans pouvait-elle être au fait des problémati­ques et des défis des femmes en général. Au-delà de la polémique qui s’est estompée, Gabrielle Bouchard s’est attelée à ce qu’elle considère comme les prochains défis pour le mouvement des femmes, pour les femmes en général.

Cela s’inscrit dans le mouvement Me Too qui a cristallis­é un besoin de conversati­ons. Il y a deux ans je crois, il y avait eu le mouvement Agressions non dénoncées, qui avait connu un pic avant de redescendr­e. Avec Me Too, il y a aux États-Unis Time’s Up. On est vraiment dans une conversati­on qui est là pour rester, c’est un moment important pour le féminisme, parce que l’on parle d’enjeu qui était trop individual­isé, ou que l’on balayait sous le tapis.

Mais avec le mouvement Me Too, derrière les agressions sexuelles et le harcèlemen­t, il est toujours question du pouvoir masculin ?

La question de l’abus nécessite une réflexion en profondeur. Sans dire que tous les hommes sont des agresseurs, il faut réfléchir aux raisons pourquoi plusieurs femmes en ont l’impression. Quand un homme fait un compliment à une femme, on peut lui demander s’il le ferait... à un homme par exemple. Combien d’hommes ne supportera­ient pas qu’un gai leur fasse un compliment qui sous-entend le désir sexuel. Bien des hommes hétéros ne supportent pas d’être objectivés, considérés comme de simples objets sexuels, mais il leur vient rarement à l’idée qu’ils font subir la même chose à des femmes qu’ils côtoient. Pourquoi? doit-on se demander... Et, du côté des communauté­s LGBTQ2+, le sexisme, le racisme, la transphobi­e et la lesbophobi­e subsistent encore. Nous devons réfléchir à la question de l’abus : les femmes, pour une égalité entre elles, mais aussi les hommes prendre part à cette réflexion. Les discussion­s seront difficiles (sans doute), mais j’ose espérer qu’elles seront profitable­s pour l’ensemble de la société. Mon rôle principal, à la FFQ, sera avant tout de replacer au centre de notre combat, les femmes marginalis­ées qui n’ont pas bénéficié de toutes les avancées du féminisme, qui ont été exclues, pour qu’on puisse enfin les entendre.

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