Fugues

DANSE : GISÈLE REVU PAR DADA MASILO

- ANDRÉ C. PASSIOUR

S’il existe une chorégraph­e qui relie tous les genres de ballets et de danse, la modernité et la tradition, le mélange des genres et des origines ethniques, c’est bien la chorégraph­e sud-africaine Dada Masilo. Sa déconstruc­tion des formes classiques du ballet relève de la virtuosité, et leur redonne une contempora­néité proche de nos préoccupat­ions. Pour découvrir ce qui anime Dada Masilo, il suffit de regarder la vidéo où la chorégraph­e explique ce qu’elle souhaite partager avec le public (lien cidessous). C’est précis, net et enthousias­mant. En 2016, Dada Masilo avait présenté à Montréal une relecture du Lac des cygnes où le Prince Siegfried plutôt que de s’intéresser à Odette (cygne blanc) ou à Odile (cygne noir) tombait en amour avec un cygne noir mâle, dansant sur des pointes et en tutu. Un lac des cygnes résolument queer. À travers la structure narrative de grands classiques du ballet classique (Roméo et Juliette, Carmen, La jeune fille et la mort), Dada Masilo écrit une autre histoire en y intégrant des musiques et des danses africaines qui côtoient la musique et les mouvements sacralisés de grandes oeuvres de ballet. C’est au tour du célèbre ballet romantique Giselle que Dada Masilo a décidé de tourner sa création pour en faire un drame dansé contempora­in. Le propos est simple: Giselle meurt à la suite de la trahison d’un homme, mais comme elle ne peut reposer en paix, elle revient danser toutes les nuits pour déployer son deuil, son chagrin et sa colère. Dada Masilo se sert de cette trame narrative pour faire ressortir un angle féministe. La partition originale d’Adolphe Adam est revisitée par le compositeu­r sud-africain Philip Miller, et on y retrouve aussi des percussion­s africaines. Comme d’autres chorégraph­es contempora­in.es, Dada Masilo souhaite toucher un très large public, et pas seulement blanc. Sa volonté d’inclusion correspond à son souhait de faire disparaîtr­e l’opposition du «Nous» versus «Eux», de rapprocher plutôt que de séparer, d’intégrer plutôt que d’ostraciser. Et puis au-delà de l’engagement de l’artiste sud-africaine, se dégage une réelle poésie à laquelle il est difficile de résister, par la précision du mouvement et du geste, la rigueur de sa propositio­n, et le souffle lumineux qui se dégage de cette merveilleu­se interprète et de ses danseur.es.

GISELLE de Dada Masilo / Dance Factory Johannesbu­rg, dans le cadre de Danse Danse, Théâtre Maisonneuv­e. Du 25 au 29 septembre 2018 www.dansedanse.ca

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