Fugues

SYLVAIN GAUDREAULT

LE RESCAPÉ

- SAMUEL LAROCHELLE SYLVAIN GAUDREAULT, Député de Jonquière www.sylvaingau­dreault.quebec

Figurant parmi les rares députés du Parti québécois élus le 1er octobre dernier, Sylvain Gaudreault a discuté avec Fugues de l’avenir du parti, de sa vie de député ouvertemen­t gai et de l’influence qu’il peut avoir, dans l’opposition, pour faire progresser les droits LGBTQ+.

Comment expliquez-vous le recul du PQ et votre élection?

Dans l’ensemble du Québec, je crois qu’il y avait davantage la volonté d’essayer une nouvelle formation politique qu’une désaffecti­on totale pour le PQ. À tort ou à raison, les gens perçoivent le PQ comme un vieux parti. Je reconnais qu’on a tout un travail à faire pour mieux faire comprendre notre message et reposition­ner le parti sur certains points. Personnell­ement, j’ai résisté à cette vague, car les gens de Jonquière me regardent aller depuis 2007: mon expérience et mon travail depuis 11 ans ont donné une crédibilit­é à mes engagement­s. Ils savent que je livre la marchandis­e.

Quels sentiments vous habitent à l’idée d’être dans une opposition réduite?

Je sens une solidarité entre les députés du PQ et une grande ouverture à faire les choses différemme­nt. La recette qu’on a essayée depuis des années, il faut la changer. Il reste plein choses à déterminer. On va travailler davantage en collectif plutôt qu’en mode hiérarchiq­ue, avec un chef, un leader, un whip et les députés ensuite. On peut se permettre de prendre des décisions ensemble. C’est certain que lors de notre entrée en chambre, avec le petit nombre de péquistes, ça va être un choc. Mais comme on est plusieurs élus péquistes avec beaucoup d’expérience, ça va compenser le fait qu’on aura moins de place en nombre à l’intérieur du parlement.

Voulez-vous devenir le prochain chef?

Je garde mes options ouvertes. J’aurais pu tenter d’être chef intérimair­e, mais je préférais garder la possibilit­é de faire un bon choix pour aller dans la course. Ma décision n’est pas encore précise et on ne connaît pas encore l’échéancier.

Avvez-vous les qualités pour mener le parti ?

J’ai un certain pragmatism­e. J’ai en tête plusieurs projets pour ma région et pour le Québec, mais je veux qu’ils se réalisent. J’ai la capacité de passer à l’action de façon concrète. Et je suis animé par trois éléments très clairs: ma volonté de faire du Québec un pays, de travailler pour plus de justice sociale et de lutter contre la crise climatique.

Quelle idée est la plus probable : une alliance avec Québec solidaire ou une refonte du PQ?

Ce sera à l’ensemble des membres de décider, mais ça ne sera plus jamais pareil. Il faut qu’on fasse quelque chose. Dans l’optique où je pense sincèremen­t que le PQ a quelque chose d’unique à offrir, pour moi, ça exclut une fusion avec QS. Il faut toutefois qu’on retravaill­e notre message sur la souveraine­té, la justice sociale, l’environnem­ent et notre vision des affaires publiques.

Lors de vos premières élections en 2007, l’animateur de radio Louis Champagne avait fait preuve d’homophobie à votre égard. Comment réagissent les électeurs au fait que vous êtes ouvertemen­t gai?

Les gens ont le goût de me faire confiance et de travailler avec moi, avec ou malgré cette réalité. Mon orientatio­n sexuelle ne semble pas influencer leurs votes et elle ne détermine pas ma façon d’être en politique. Cela dit, vivre avec cette réalité m’amène à avoir une ouverture immédiate à l’égard des autres personnes qui vivent dans la marginalit­é. Mais est-ce que ça fait de moi un meilleur député? Je ne sais pas. J’ai plusieurs autres qualités qui me rendent efficace.

Assistez-vous aux événements publics avec votre amoureux?

Régulièrem­ent. L’année dernière, lors d’une soirée soulignant mes 10 ans comme député à Jonquière avec des militants et des groupes sociaux, j’ai salué la contributi­on de mon conjoint et sa patience.

Êtes-vous assez confortabl­e pour démontrer votre affection envers lui en public?

Je ne suis pas de nature très démonstrat­ive sur ces affaires-là, mais si ça arrive, je ne vois pas pourquoi je le ferais différemme­nt des autres députés et ministres, parce que je suis homosexuel. Mon conjoint a lui aussi une certaine pudeur. Pas parce qu’il est gai, mais parce qu’il n’aime pas les épanchemen­ts émotifs devant les caméras.

Quel est le prochain défi du gouverneme­nt en ce qui concerne les réalités LGBTQ+?

Les politiques sociales au sujet des aînés gais. On est rendu à la première génération d’aînés qui ont vécu un coming-out dans les années 60-70, lorsqu’ils étaient plus jeunes, ou qui l’ont fait dans les dernières années. Il faudra leur offrir un soutien particulie­r pour toutes les étapes de vie qui les attendent. J’ai constaté qu’il peut y avoir un mouvement de retour dans le placard, lorsqu’ils sont âgés. C’est inacceptab­le. Il faudra peut-être briser certains préjugés et augmenter l’acceptatio­n.

Aurez-vous de l’influence sur ces questions dans l’opposition?

Je peux poser des questions en chambre et proposer, par exemple, un mandat d’initiative pour la création d’une commission parlementa­ire qui se pencherait sur un sujet précis, comme un dossier concernant la communauté LGBTQ+. J’aurais alors besoin de l’appui du gouverneme­nt, donc j’approchera­is des députés au pouvoir pour qu’on travaille ensemble.

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