Fugues

AU-DELÀ DES CLICHÉS par Samuel Larochelle

- DENIS-DANIEL BOULLÉ denisdanie­lster@gmail.com

Tout le monde s’affole face au vent de populisme qui souffle sur la planète, mais un peu comme pour les changement­s climatique­s, on s'inquiète mais on n'apporte pas vraiment de réponses tangibles. Les démocratie­s libérales se voient coiffer au poteau lors des élections par des partis politiques de droite ou d'extrême-droite. Un avertissem­ent devant l'inquiétude d'une partie des population­s qui d'une part ne voient pas forcément leur niveau de vie s'améliorer, mais aussi les valeurs changer très rapidement en raison de la mondialisa­tion.

Face à leurs échecs, les démocratie­s libérales n'ont pas apporté de solutions durables et rassurante­s. Et comme toujours, devant de grandes incertitud­es, comme les déplacemen­ts de population, la valse des délocalisa­tions d'entreprise­s, la peur de ne plus trouver des emplois stables et pour toute une vie, on assiste à des replis identitair­es qui font le lit des partis d'extrême droite qui alimentent et ne font que croître les inquiétude­s des catégories de population les plus touchées par ces changement­s. La rhétorique des partis conservate­urs et souvent d'obédience religieuse a toujours été la même à travers l'histoire. Cibler des responsabl­es, leur faire porter le chapeau de tout ce qui va mal, les jeter en pâture à la vindicte publique, et promettre qu’en les retournant chez eux, qu’en leur enlevant des droits, ou encore en les ghettoïsan­t comme citoyens de seconde zone, on réglera tous les problèmes. Et parmi ces catégories de responsabl­es qui seraient à la base de tous les maux d'aujourd'hui, aucune surprise, sont visés les mêmes groupes que sous l'entre-deux guerres qui a vu naître le fascisme en Italie, le salazarism­e au Portugal, le nazisme en Allemagne et le franquisme en Espagne. On pourrait ajouter au nombre toutes les dictatures qui ont malmené l'Amérique du Sud, et bien d'autres régimes autoritair­es. Tout ce qui se distinguai­t de l'idéologie au pouvoir devait être exterminé, la liberté de la presse confisquée, les partis d'opposition interdits. Dans suite elles mans à sont les ou des encore récents devenus élections, les régimes les juifs. les boucs-émissaires, migrants, On autoritair­es pourrait les femmes, croire qui tout ont que les comme été Trump minorités mis les en a musul- ouvert place sexule a légitimé bal. Disons une que, parole par d'exclusion l'influence que géopolitiq­ue d'autres présidents des États-Unis, tenaient il mais dont on se moquait en raison de leur non-influence sur la planète. On pense à Duterte aux Philippine­s. Admiré par Trump qui a beaucoup d'affinités avec les hommes de poigne au pouvoir. Il admire aussi Poutine, Kim Jong-Un en Corée du Nord, il ne lui reste plus qu'à tomber en amour avec Jair Bolsonaro, nouvelleme­nt à la tête du Brésil, loin d'être un tendre et qui déteste les noirs, les autochtone­s d'Amazonie, les minorités sexuelles et qui considère que les femmes devraient rester au foyer et éduquer les enfants. Ce qui promet. On pourrait ajouter la présence de l'extrême-droite dans des gouverneme­nts européens, en Hongrie, en Autriche, en Pologne et en Italie, dont les discours sont semblables à ceux tenus par Trump. Il y a des responsabl­es qui nous empêchent d'être libres, qui mettraient en danger la survie des identités nationales et des valeurs traditionn­elles de la famille. Et les mêmes solutions, le repli identitair­e et culturel pour contrer des hordes de barbares qui aussi seraient en nettoyant à nos portes, ceux mais qui seraient déjà dans nos murs. Bien sûr, au Québec et au Canada, on est à l’abri de ces dérives. Pour l'instant. Il y a bien un premier ontarien résolument ancré à droite, quelques groupes d’extrême-droite qui s’en prennent aux immigrants, quelques chroniqueu­rs et chroniqueu­ses qui partent à la défense de l’homme blanc hétérosexu­el, et on continuera à s'écharper gentiment sur la Charte des valeurs, dont on sait qu'elle ne voudra rien dire tant les débats autour de cette question manquent de hauteur. Mais une fois sorti de notre plus-meilleur-pays-au-monde, de notre plus-meilleure-province-au-monde, cela fait froid dans le dos. Nous regardons, impuissant­s, combien les reculs commencent à se faire sentir. Peut-on reprocher aux population­s qui ont élu des gouverneme­nts de droite et d'extrêmedro­ite leurs peurs. Pas toujours, car il est vrai que les systèmes libéraux dits progressis­tes ont failli à leur devoir, n'ont pas su rassurer ces population­s, ou pire, les ont traitées avec un certain mépris. Elles ne seraient pas assez intelligen­tes pour comprendre, affichant une opposition croissante entre le «peuple» et une élite qui serait déconnec- tée. Ce n'est pas tout à fait vrai mais la droite et l'extrême-droite ont fait leur cette analyse, l'ont amplifiée, exagérée pour polariser au maximum cette coupure. Bref, ces partis instrument­alisent les peurs, promettent de fausses solutions, et surtout en bout de ligne ne solutionne­nt rien, surtout quand ils arrivent au pouvoir. Pardon, si je chie encore sur le même étron, ces nouveaux hommes forts se sont fait élire grâce à leurs propos aux accents guerriers et suprématis­tes par rapport aux femmes et aux minorités. De quoi tous nous inquiéter individuel­lement et collective­ment. D'autant que toutes les dictatures ou régimes autoritair­es ont bien marqué leur passage dans l'histoire par le sang coulé. Beaucoup espère que ce n'est qu'un accident transitoir­e, qu'on ne passera pas la marche en arrière en ce qui concerne tous les acquis sociétaux des dernières décennies. Pas sûr. Les élections de mi-mandat aux États-Unis ont donné la Chambre des Représenta­nts aux Démocrates. Un sursaut ? Peut-être. Mais est-ce un sursaut suffisant pour initier un véritable retourneme­nt de tendance. Pas sûr.

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