NOS HISTOIRES AU FÉMININ / QUEERING THE SCRIPT
Du 22 novembre au 1er décembre se tiendra la 32e édition du festival de films LGBTQ de Montréal. Si Image + Nation peut se targuer d’être le plus ancien festival de films LGBT au Canada, il bénéficie aussi d’une programmation riche et diversifiée. Nous vous proposons ici quelques suggestions de films mettant en scène les femmes LGBTQ+.
De nombreux films proposés cette année ont tous une saveur hispanique, pour ne pas dire exotique, afin que les spectateurs de la métropole habitués aux durs hivers et à leur sport national trouvent un peu de chaleur... Excepté le film italien ZenintheIceRift (2018), qui se passe sur la glace, dans l’univers du hockey, les autres film que j’ai visionnés revisitent cette douce chaleur d’un rayon de soleil sur la peau. De la Colombie à l’Espagne, l’Espagne en passant par le Venezuela, Venezuela on met en scène des histoires de femmes de la diversité sous le soleil. À commencer par la réalisatrice espagnole Ruth Caudeli qui, après avoir visité Image + Nation l’an dernier avec son premier long-métrage Eva&Candela est de retour avec un second long-métrage nommé SecondStarontheRight. Le film débute lors d’un party de piscine, en période estivale, où des adolescentes s’amusent sous le soleil. Rapidement, nous retrouvons ces mêmes amies des années plus tard. Désormais, certaines sont mariées, avec ou sans enfants, mais toutes semblent « stables » et « heureuses », sauf Emilia, une actrice bisexuelle qui ne soutient guère la comparaison. Vis-à-vis de ce monde parfait, en apparence, toutes ont un jardin secret et des carences. Produit en Colombie, le film met une fois de plus en scène les actrices Silvia Varón et Alejandra Lara, qui incarnaient respectivement Eva& Candela dans le premier film de la réalisatrice Ruth Caudeli. À noter que cette dernière y va aussi d’un caméo en fin de film.
Si cette dernière produisait ici son second long-métrage, il en est de même pour Patricia Ortega. Avec Beingimpossible(Yoimpossible), elle met en scène l’intersexualité (et son incompréhension) de façon troublante, à travers le parcours d’Ariel. Le jour, cette jeune femme pieuse est couturière dans une usine de vêtements, alors que le soir, elle court voir sa mère à l’hôpital qui est atteint d’un cancer en phase terminale. De cette situation déjà éprouvante, son corps souffre tout autant. Lorsque son premier rapport sexuel avec son copain s’avère extrêmement douloureux, elle comprend que quelque chose ne tourne pas rond et demande à consulter un médecin, celle qui la suit depuis sa
naissance. Ariel découvre ainsi qu’elle est née différente : encore bébé, elle fut soumise à différentes chirurgies de féminisation des organes génitaux, de par sa condition intersexuée. Le film explore de façon troublante les effets sur le corps, la psychologie et le monde d’Ariel. CarmenandLola fut récipiendaire de plusieurs prix et présenté dans divers festivals de cinéma à travers le monde, notamment en lice pour la Queer Palm à Cannes en 2018. Réalisé par Arantxa Echevarria, le film se situe en Espagne, dans le monde gitan, alors que deux adolescentes tentent de fuir les traditions familiales, largement marquées par la religion. Lors d’une journée de travail typiquement gitane, à vendre des produits au marché, Lola, 16 ans, rencontre Carmen, d’un an son ainée. Pour Lola, la vue de Carmen lui procure un sentiment étrange, proche du coup de foudre. Cependant, la main de Carmen est promise à son fiancé et toute la famille se réjouit de voir la belle enfin promue à un brillant avenir en étant mariée. Lorsque Carmen découvrira que Lola aime les femmes, elle la repoussera, lui fera des remarques lesbophobes : «Comment la personne que j’aime la plus au monde peut-elle me faire autant de mal?», pensera alors Lola. Puis, un jour, les deux femmes s’embrassent, pour «essayer», mais Carmen tombe en amour avec Lola, au point de rompre son mariage. Lorsque le père de Lola apprend l’idylle, on pousse presque la jeune femme vers une thérapie de conversion pour taire la honte familiale.
Réalisé par Margherita Ferri, ZenintheIceRift, nous mène dans les Alpes italiennes, afin de suivre l’ambition de Maia, alias Zen, une tomboy qui rêve de jouer au hockey dans les ligues majeures. Pour l’instant, Zen pratique avec les garçons, où ce loup solitaire ne fait que se bagarrer, victime d’intimidation. Lorsque Vanessa, la copine du capitaine de l’équipe, s’enfuit de chez elle pour trouver refuge chez Zen, tout
change. S’en suit, pour les deux protagonistes, une remise en question des rôles sociaux, de leurs orientations et identités sexuelles, à l’image de la découverte identitaire qui accompagne l’adolescence.
Dans tous les films, la relation lesbienne se retrouve en toile de fond, tout en étant comme le fondement des identités. Dans SecondStaronthe Right, Emilia est dans une relation lesbienne avec sa copine, mais elle se définit comme bisexuelle, alors que son amie réfute l’existence de la bisexualité. Dans Beingimpossible, Ariel est intersexuée et c’est le point central du film, bien que sa relation lesbienne avec une collègue de travail lui permette de confirmer son orientation sexuelle. Dans ZenintheIceRift, les prémices d’une relation lesbienne se dessinent entre Zen et Vanessa, bien qu’aucune ne s’identifie comme lesbienne. Si Zenica se fait traiter de lesbienne, elle semble plutôt questionner son identité de genre et finit par décider de se faire appeler Zen. Finalement, Carmen&Lola, met nécessairement en scène une relation lesbienne, mais les deux femmes n’en sont pas à se définir, mais bien aux prémices de comprendre cet amour qui chamboulera leurs vies à jamais. Bien que la relation lesbienne existe pour elle-même, nommer le lesbianisme est encore chose difficile. À tout le moins, il est montré, dans toute sa diversité.