Fugues

JEAN FORTIN

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- ANDRÉ C. PASSIOUR passiour@videotron.ca

Le 21 octobre dernier, à quelques jours de son 55e anniversai­re, Jean Fortin a été emporté par des complicati­ons cardiaques dues à une crise précédente. Cofondateu­r de la Galerie Dentaire, galeriste, collection­neur d’art et organisate­ur d’événements artistique­s, Jean Fortin a appuyé plusieurs organismes et artistes en arts visuels par des exposition­s, etc. Originaire d’Alma, Jean Fortin était reconnu comme le «mentor» de bien des jeunes gais.

«Jean avait une manière incroyable de cultiver l’amitié chez les gens, de dire Jean-Guy Faubert, un ami de longue date venu de Vancouver spécialeme­nt pour les funéraille­s de Jean Fortin. À l’époque, lorsque je lui ai dit que j’avais des problèmes avec ma famille suite à mon coming out, il m’a dit ‘’je serai ton frère, je suis ta famille’’ et, cela n’a jamais cessé depuis ce temps-là. Il a toujours été là pour moi. Il avait cette qualité-là d’entretenir des liens étroits avec les gens. Jean était quelqu’un de très insécure, mais lorsqu’il liait des liens d’amitié avec les gens, c’était pour longtemps et c’était honnête. Il va me manquer terribleme­nt. […]»

Ayant été marié à lui, le Dr Marc Raper, chirurgien dentiste et cofondateu­r de la Galerie Dentaire, s’est confié à nous. «Ce décès était complèteme­nt inattendu, c’est survenu si soudaineme­nt, que personne n’y croyait au début. Par contre, il s’est battu jusqu’à la fin», explique Dr Marc Raper qui a rencontré Jean Fortin il y a plus de 30 ans maintenant. Après quelques années dans la police, Jean Fortin quitte le corps policier, au début des années 1990, pour s’installer à Vancouver. C’est là qu’il fait la connaissan­ce du Dr Marc Raper. «Il a travaillé à l’entrepôt du magasin Le Château, il ne parlait pas anglais, c’est comme ça aussi qu’il a fait la connaissan­ce de plusieurs employés francophon­es de la chaîne et un petit clan d’hommes gais s’est ainsi formé, évoque le Dr Marc Raper. Puis, lorsque l’union civile des conjoints de même sexe a été votée, nous avons été parmi les tout premiers couples de Vancouver à nous unir. Nous sommes restés ensemble dix ans. Par la suite, même après notre séparation, nous sommes demeurés très, très proches l’un de l’autre.»

Plusieurs années plus tard, Jean Fortin et le Dr Marc Raper ouvrent la Galerie Dentaire, une clinique de dentiste et une galerie d’art, c’était en 2003. «Jean était passionné par l’art et les artistes, poursuit le Dr Raper. C’était un temps magique pour les arts à Montréal. Jean a fait un travail fantastiqu­e à organiser des exposition­s, à aider les artistes, à faire des lancements et vernissage­s si bien que, maintenant, on comptabili­se au-delà de 175 artistes qui ont été ainsi exposés à la Galerie !»

Lorsqu’un des organisate­urs de ACCM (Sida Bénévoles Montréal), Chris Elliott, vient voir Jean Fortin pour mettre sur pied quelque chose en lien avec le VIH et amasser des fonds pour l’organisme, Jean Fortin embarquera immédiatem­ent dans l’aventure qui s’appellera par la suite ARTSIDA. «La toute première exposition et vente à l’encan se fera d’ailleurs à la Galerie Dentaire, se remémore le Dr Raper. Jean tenait à ce qu’on participe et encourage des événements artistique­s, tel que le Festival Mtl en Arts, par exemple. […]»

D’ailleurs, à l’annonce du décès de Jean Fortin, de nombreux artistes ont tenu à lui rendre hommage sur les réseaux sociaux, de Cédric Taillon à France Parenteau, de Jean Chaîney à Jaber Lutfi en passant par Dominique Bouffard, etc., la communauté artistique n’a cessé de louanger la personnali­té affable, amicale et énergique de Jean Fortin. Mais il y avait aussi le côté familial de Jean Fortin et ses liens avec sa famille qui en étonnait plusieurs. «J’ai vu la différence chez les parents de Jean, comment ils le traitaient, comment ils agissaient avec leur fils gai, ce lien fort qu’ils avaient, c’était tout à fait différent avec mes parents qui n’acceptaien­t pas tout à fait mon homosexual­ité, note le Dr Raper. Jean et ses parents étaient exemplaire­s, ils me faisaient sentir comme un membre à part entière de la famille. Les parents de Jean l’aimaient beaucoup et cela paraissait aussi. Encore là, c’était totalement différent avec mes parents […]» Ce côté transpirai­t aussi dans le mentorat qu’il exerçait «avec les jeunes gais qui vivaient des difficulté­s d’acceptatio­n ou autre. C’est quelque chose que bien des gens ignoraient, mais Jean a contribué à aider bien des jeunes dans leur vie», conclut le Dr Marc Raper.

Les funéraille­s de Jean Fortin ont été célébrées le dimanche 1er novembre à Alma, au Lac Saint-Jean, en présence de sa famille et de quelques amis.

L’équipe de Fugues tient à offrir ses plus sincères et profondes condoléanc­es à la famille et aux proches de Jean Fortin.

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