L'Argenteuil

Lachute-O-Coton avec Mario Joannette

- STÉPHANE LAJOIE stephane.lajoie@eap.on.ca

L’écrivain Éric Fottorino a un jour dit que « nous sommes des êtres de tissu ». Pour le marchand Mario Joannette de Lachute-OCoton, le monde du tissu est intimement lié aux grandes histoires de sa vie, autant celles de grandes réussites que celles plus sombres.

« Dans les années 1990, mon beau-père avait la Grange du tissu à Saint-Hermas et c’est lui qui a aidé ma femme et moi à décoller dans le domaine, a-t-il indiqué.

Dans le temps, j’étais camionneur, rien à voir avec les femmes et la couture! J’ai décidé de me lancer et j’ai eu la piqûre.»

En 1994, Mario Joannette a donc délaissé

les camions pour les patrons en ouvrant un magasin sur la rue Principale à Grenville. À l’époque, les clientes étaient quelque peu scrupuleus­es à l’idée d’avoir un homme à la table à découper. Mais rapidement, l’humour de Mario Joannette et son expertise les ont conquises.

« Les clients attendaien­t en ligne pour du tissu pour coudre des t-shirts et des bobettes, s’est-il rappelé. Le monde du tissu a bien changé depuis, tout comme les habitudes des gens.»

Bien qu’achalandé, le local vieillot de Grenville n’était pas idéal pour le commerce. Une vraie fournaise l’été, un frigidaire l’hiver et un loyer trop salé, il était temps de passer à autre chose.

« Nous étions bien connus et nous avons donc décidé de déménager sur la Main à Hawkesbury en 2003, a-t-il dit. Mais l’industrie était en changement et lorsque l’usine Duplate a fermé, tout s’est effondré.»

L’arrivée des fibres chinoises au pays a bouleversé l’industrie, qui a également vu la grande majorité de ses manufactur­iers plier bagage pour l’Asie. «Quand il n’y a plus eu de quotas, les compagnies de Montréal ont arrêté de coudre pour la mode. Avec les vêtements pas chers qui rentraient par conteneur, les dames ne voyaient plus la nécessité de faire leurs propres vêtements.»

Une conjonctur­e économique défavorabl­e et une part de marché qui s’effrite, le magasin Tissus Centre-Ville ne roulait pas sur l’or sur une rue principale vidée de ses consommate­urs. Ce trou noir économique, Mario Joannette et sa conjointe l’ont affronté ensemble, et ce, malgré la

fermeture de leur commerce. «C’était difficile et ma femme est retournée travailler avec son père, à la Grange du tissu de Saint-Jérôme. Les contrainte­s d’argent nous ont éloigné et même que les gens ont parti des rumeurs que nous étions séparés, a-t-il expliqué. Mais c’est faux. Je suis retourné travailler dans le milieu du transport, dans la location de remorques. Nous avions chacun notre travail de notre côté et ça n’a pas été facile. Ironiqueme­nt, c’est la maladie qui nous a rapprochés.»

Durant le temps des Fêtes en 2013, Mario Joannette est passé à un cheveu de la mort à la suite de troubles hépatiques. Après 65 jours à l’hôpital, il a finalement vu la lumière au bout du tunnel, en obtenant son congé. Si son séjour à l’hôpital n’a pas été de tout repos physiqueme­nt, il a repris goût à la vie grâce à la présence constante de sa femme à son chevet. Après une longue convalesce­nce et un bref retour dans le transport, il a pris la décision de suivre sa passion. Avec une énergie renouvelée, il alors décidé de replonger dans l’industrie du tissu en ouvrant

Lachute-O-Coton, en septembre 2014, sur la rue Principale à Lachute. «Mon commerce, c’est quelque chose que j’adorais et que j’ai perdu, a-t-il dit. Quand je me suis lancé à Lachute, je savais que je pouvais peut-être me

casseravai­t des la possibilit­és. gueule, mais Quandje voyais nous qu’il avionsy le magasin à Hawkesbury, nous habitions à Lachute. J’aime la Principale et ses activités.»

S’il était «au coton» à cause de la maladie, Mario Joannette aime bien le jeu de mot pour le nom de son magasin, dont la future enseigne dépeignera une chute au coton. Depuis l’ouverture, il a revu d’anciens clients de Grenville et Hawkesbury, qui ont toujours l’aiguille aussi fine. Même si le marché est en perpétuel changement, il croit que le tissu à la verge aura toujours sa place et que, comme l’industrie du livre, le toucher demeure le meilleur allié des couturiers.

« Les vêtements d’adulte et la décoration ont pris le bord avec le tout-fait, a-t-il conclu. Le polar est très populaire, tout comme le coton pour les courtepoin­tes.

Heureuseme­nt, aussi, j’ai remarqué que les jeunes cousent beaucoup. J’aime encore voir la passion qu’il y a entre les gens et le tissu. Il y a toujours une fierté de créer quelque chose soi-même et c’est un plaisir d’aider les gens à faire cela en leur dénichant le bon tissu.»

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 ??  ?? Le marchand de tissus Mario Joannette à son magasin LachuteO-Coton, ouvert depuis septembre dernier sur la Principale.
Le marchand de tissus Mario Joannette à son magasin LachuteO-Coton, ouvert depuis septembre dernier sur la Principale.

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