Une cause qui rassemble
Cause Caron est suivie de près par la communauté franco-manitobaine, qui se rappelle de ses propres luttes. Roger Bilodeau, de passage au Manitoba, parle de l’importance du bilinguisme.
La Cause Caron a été entendue par la Cour suprême le 13 février dernier. Si les juges donnent gain de cause à Gilles Caron et son codemandeur, Pierre Boutet, les lois de l’Alberta et de la Saskatchewan pourront dorénavant être adoptées en français, et les anciennes lois traduites. Une décision qui pourrait conduire à l’obtention de plus de services en français en Alberta et en Saskatchewan.
Si cette cause rassemble les Franco-Manitobains, c’est qu’elle rappelle les affaires Forest et Bilodeau qui ont restauré le statut bilingue du Manitoba il y a plus de 30 ans. Roger Bilodeau (sur la photo), a profité de son passage à Winnipeg pour visiter le Musée canadien pour les droits de la personne, qui relate son combat pour les droits linguistiques du Manitoba. En attendant la décision de la Cour Suprême, il se dit toujours fier d’être Canadien « et de vivre dans un pays où on retrouve une grande diversité de communautés sur tous les plans ».
La Cour suprême du Canada a entendu, le 13 février dernier, la Cause Caron, affaire juridique sur laquelle les juges devront maintenant se pencher, afin de trancher sur le statut linguistique de l’Alberta, de la Saskatchewan et des Territoires du Nord-Ouest.
« Les avocats de Gilles Caron et de son codemandeur, Pierre Boutet, ont demandé spécifiquement que les lois de l’Alberta et de la Saskatchewan soient dorénavant adoptées en français et que celles qui l’ont été précédemment soient traduites en français, explique l’historienne Jacqueline Blay. À regarder cette demande, et les arguments avancés, je ne peux m’empêcher de constater les parallèles énormes entre la Cause Caron et ce qui s’est déroulé au Manitoba, avec les Affaires Forest et Bilodeau qui, respectivement, ont restauré le statut bilingue du Manitoba et occasionné l’adoption et la traduction des lois manitobaines.
« À ne regarder que ces parallèles, j’estime que la Cause Caron a de bonnes chances de réussir, poursuit Jacqueline Blay. D’autant plus que l’argumentation repose sur une documentation historique abondante, fruit de plusieurs années de recherche du politologue du Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta, Edmund Aunger. Ce chercheur a fait appel à l’Histoire et aux promesses faites aux Métis. C’est ce qui rend cette cause unique. »
Défenseur de la cause du français au Manitoba, Roger Bilodeau s’en remet à la Cour suprême qui devra statuer sur la décision. « Ce qu’on peut dire de façon objective c’est que c’est un dossier pour lequel, comme dans d’autres causes linguistiques avant, on a recours à l’Histoire, aux évènements du passé, et spécifiquement à l’histoire de l’Alberta et de la Saskatchewan, à savoir quel était le sens et le but de certaines déclarations et certains écrits par rapport au statut du français dans ces régions, confie-til. On reste en attente d’une décision de la cour. »
Pour sa part, la présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), Marie-France Kenny, estime qu’il s’agit d’un « moment historique pour les francophones ».
« Ces audiences marquent l’aboutissement d’une démarche qui a débuté en 2003 avec un citoyen franco-albertain qui, du moment qu’il a senti que ses droits linguistiques étaient lésés, a décidé d’aller jusqu’au bout pour les faire respecter, rappelle-t-elle. Je tiens à saluer la ténacité de Gilles Caron et de son codemandeur Pierre Boutet. »
Par ailleurs, Roger Bilodeau, qui réside désormais à Ottawa, assure que c’est toujours pour lui « une réelle fierté » de témoigner de la place du français au Manitoba. « Mais finalement, c’est aussi une fierté d’être Canadien, vivre dans un pays où on retrouve une grande diversité de communautés sur tous les plans, assure-t-il.
« C’est un fait, pas toujours connu par tous les Canadiens, qu’il y a une communauté francophone vigoureuse qui se défend toujours bien et qui a mis en place diverses institutions pour promouvoir l’idée que l’anglais et le français ont un statut au Manitoba et dans d’autres parties du Canada également, affirme Roger Bilodeau. Je persiste à croire, et le croyais en 1984, et de plus en plus ça se manifeste aujourd’hui, que l’avenir et le caractère bilingue du Manitoba dépend des francophones et beaucoup des francophiles. »