Une histoire à raconter
L’histoire des Noirs en est une riche et émouvante, faite de violations de droits humains et de luttes pour leur respect. Cette histoire qui, selon certains se poursuit à plusieurs endroits de façon différente, est célébrée tout au long du mois de février
Depuis quelques années, février est un mois de célébration pour l’histoire de la communauté noire du monde entier. Même s’il est beaucoup plus commémoré en Amérique du Nord, il n’en demeure pas moins que l’histoire de l’esclavage, de l’oppression, du racisme et autres violations des droits du peuple noir touchent un grand nombre de personnes, de toutes les couleurs et de toutes origines.
Des films qui en
disent long
Sorti en décembre 2014, Selma, un film américain réalisé par Ava DuVernay et scénarisé par Paul Webb, est l’un des nombreux films qui montre un pan de l’histoire de la communauté noire dans le monde. Se déroulant en Alabama aux États-Unis, ce drame historique retrace la lutte qu’a menée Martin Luther King dans les années 1960, pour garantir le droit de vote à tous les citoyens majeurs, en particulier aux Noirs. Plusieurs ont payé de leur vie le prix de ce militantisme qui toutefois a abouti à la signature du droit de vote en 1965 par le président américain du temps, Lyndon Johnson.
« Je connais très bien les évènements qui sont décrits dans ce film, lance le professeur d’histoire des Noirs à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et originaire des États-Unis, Greg Robinson. Mes parents étaient impliqués dans le mouvement. C’était très cher à leur coeur.
« Ma mère avait été manifestante à New York pour intégrer l’école publique, mais aussi pour la déségrégation, et enfin pour l’emploi des Noirs à la foire mondiale à New York », raconte le professeur. Ce sont d’ailleurs des évènements qui avaient encouragé sa mère à étudier afin de « devenir avocate et de lutter pour l’égalité pour tous », se rappelle Greg Robinson.
C’est toute cette histoire de la lutte de Selma et bien d’autres, comme celle de l’esclavage, qui ont donné lieu à la célébration du mois de l’histoire des Noirs.
Célébrer avec fierté
L’histoire des Noirs, « est fondamentale, assure Greg Robinson. Elle est intrinsèquement liée à celle des États-Unis ». D’autres pays en occident et ailleurs dans le monde, s’identifient aussi à cette histoire dont les principales racines sont liées à l’esclavage. Le professeur Greg Robinson se rappelle en particulier qu’aux ÉtatsUnis, dans le temps, « il y a une partie de la population qui a été marginalisée, reléguée au statut inférieur ». Heureusement que cette communauté n’est pas restée silencieuse note Greg Robinson. « Les luttes ont payé! lance-t-il.
« La guerre de sécession, les amendements constitutionnels comme le droit de vote des Noirs, tout ça, c’est grâce à leur lutte », soutient Greg Robinson.
« En tant que Noir, c’est vraiment une fierté pour moi de célébrer cette histoire, lance pour sa part un africain d’origine camerounaise, Serge Tamba. Je suis noir, c’est mon identité. Même si un jour j’obtenais la citoyenneté canadienne, mes origines ne changeront pas. Je ne pourrai jamais le changer et c’est toute une fierté pour moi d’afficher mon identité. » Une fierté que partage aussi cette autre africaine venue du Sénégal, Aminata Sene. « C’est important de se rappeler de notre histoire », lance-t-elle.
Et, pour Aminata Sene, la célébration de cette histoire est encore plus importante. D’autant plus que les traces de l’esclavage qu’a connu la population noire est encore bien présente au Sénégal, à l’île de Gorée, une côte d’où ont été embarqués de nombreux esclaves. « Jusqu’à présent, il y a des conséquences de cette histoire, note-t-elle.
« Un jour, on te prend, on te vend, on te donne un autre nom, tu perds une partie de toi », déplore-telle. Le Béninois, Élysée Dansou a, lui aussi, à maintes reprises, revisité cette histoire dont l’un des symboles marquant est « la porte du non retour », érigée à Ouidah, la ville du pays d’où partaient les embarcations remplies d’esclaves. « C’est une histoire qu’il faut raconter à toutes les générations », martèle-t-il.
Des histoires qui se répètent
« C’est clair qu’il y a encore des injustices », confirme Greg Robinson qui se réfère à certains évènements comme ceux survenus à Ferguson dans l’État du Missouri aux États-Unis, le 9 août dernier au cours duquel, un jeune Noir, Mike Brown âgé de 18 ans et non armé a été tué par un policier. L’autopsie avait révélé qu’il avait été atteint par six balles.
Ailleurs dans le monde,Aminata Sene constate « l’influence négative de l’occident » dans les affaires des pays en voie de développement. « Tu vois parfois des pays qui sont riches en Afrique mais qui ne se développent pas parce que leurs ressources sont exploitées par les pays occidentaux », déplore-t-elle.
Triste réalité que condamne aussi Greg Robinson pour qui, il est important « de connaître son histoire ».