La Liberté

DES COUPURES VUES D’UN MAUVAIS OEIL

Dans deux lettres adressées au gouverneme­nt, les médecins de l’hôpital Misericord­ia de Winnipeg ont fait part de leurs inquiétude­s face à l’annonce de la fermeture du service des urgences de l’établissem­ent. L’une des lettres est signée par Jennifer Rahma

- Valentin CUEFF presse2@la-liberte.mb.ca

Dr Jennifer Rahman est ophtalmolo­giste. Comme beaucoup de médecins, elle s’inquiète de la fermeture des services d’urgence à l’hôpital Misericord­ia. L’établissem­ent est connu pour la qualité de ses soins en ophtalmolo­gie et les locaux des urgences ont été rénovés il ya à peine cinq ans. Des rénovation­s complétées grâce à l’argent de donateurs. Dr Rahman s’inquiète donc pour les patients mais aussi pour le signal envoyé aux donateurs.

Sur les 39 000 personnes acceptées chaque année aux urgences de Misericord­ia, 4 500 viennent pour des problèmes liés aux yeux. « Nous avons un centre de soin pour les yeux ici, avec du personnel qualifié et un très bon équipement. Les gens viennent spontanéme­nt à Misericord­ia quand ils ont un problème de vue », explique Jennifer Rahman, qui travaille dans cet hôpital depuis 2005.

Elle a appris en avril 2017 la décision du gouverneme­nt de fermer le service des urgences situé au 99 avenue Cornish à Winnipeg. Aucun médecin du centre de soins n’aurait été consulté avant cette déclaratio­n. « C’est venu de nulle part. Cette fermeture aurait dû être discutée avec nous. Nous l’avons découvert à la télévision. » Une fermeture qui prendrait effet à l’automne 2017.

Cependant, selon un communiqué de presse du parti néo-démocrate, une note de service du directeur médical à l’urgence de Misericord­ia, le Dr John Reda, spécifie que « la qualité du service pourrait presque être impossible à assurer dès le 19 juin ».

Le 30 mai, une première lettre écrite et signée par les médecins de Misericord­ia venait contester la fermeture. Jennifer Rahman a souhaité apporté son grain de sel en accentuant sur le travail du centre de soins pour les yeux, peut-être le plus important de la région.

Le 7 avril, le ministre de la santé du Manitoba Kelvin Goertzen et l’Office régional de la santé de Winnipeg ont annoncé une réforme du système de santé, axée sur l’optimisati­on des services d’urgence dans les hôpitaux. Le but était de réduire les temps d’attente et de répartir de façon plus efficace les différents services à travers la ville. Cette réforme, basée sur un compte-rendu du docteur David Peachey de Health Intelligen­ce Inc., prévoyait la modificati­on ou la fermeture des services des urgences de plusieurs centres de soins de la ville.

Durant la conférence de presse, ni Kelvin Goertzen, ni le président de l’Office régional de la santé, Milton Sussman, n’ont précisé le coût que représente­rait ces modificati­ons, ou encore le nombre de postes qui pourraient être supprimés.

Les raisons de cette décision du gouverneme­nt sont encore inconnues pour Jennifer Rahman. « On ne répare pas ce qui n’est pas cassé. Cet établissem­ent a un bon rapport coût-rendement comparé à d’autres endroits. » Elle ajoute qu’une fermeture des urgences de Misericord­ia n’est pas mentionnée dans le rapport de David Peachey, qui servait de feuille de route à l’ORSW pour sa réforme.

Les locaux des urgences de l’hôpital ont, en outre, été rénovés il y a moins de cinq ans, grâce à l’argent de donateurs. Ces aménagemen­ts avaient coûté 1,5 million $. L’ophtalmolo­giste craint que cette fermeture envoie un mauvais message aux personnes qui font des dons. « L’ORSW ne paye pas tout. Cette fermeture, c’est comme si l’ORSW disait aux donateurs : “Votre argent n’a pas d’importance”. »

Jennifer Rahman souligne également la difficulté, pour les patients, de se déplacer dans des hôpitaux loin de chez eux. « Dans le rapport de David Peachey, il compare le nombre de services des urgences de Winnipeg à celles de Montréal ou Vancouver, qui en ont moins. Mais ces villes disposent de transports en commun plus efficaces. Et si la comparaiso­n tient en terme de population, Winnipeg reste une ville très étalée, sur un large territoire. »

Elle attend du gouverneme­nt qu’il explique son choix et entame un dialogue avec l’équipe de Misericord­ia. De son côté, le ministre de la santé Kelvin Goertzen n’a pas pu se prononcer sur les déclaratio­ns de Jennifer Rahman en raison des élections partielles du 13 juin dans la circonscri­ption de Point Douglas, qui exigent le silence.

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Photo : Valentin Cueff
 ?? Photo : Valentin Cueff ?? Dr Jennifer Rahman, ophtalmolo­giste, s’inquiète du signal envoyé par le gouverneme­nt aux patients et aux donateurs de l’Hôpital Misericord­ia.
Photo : Valentin Cueff Dr Jennifer Rahman, ophtalmolo­giste, s’inquiète du signal envoyé par le gouverneme­nt aux patients et aux donateurs de l’Hôpital Misericord­ia.
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