La Liberté

Citation DE LA SEMAINE

- Elisabeth VETTER presse7@la-liberte.mb.ca

« Le français, au même titre que l’allemand, et que toutes les autres langues d’ailleurs, c’est un outil formidable que nous aurons pour communique­r. » Elisha Corsiga fait partie des jeunes francophon­es de la Loi 5. La jeune fille d’origine philippine élève en immersion a développé une vraie passion pour la langue française.

À 17 ans, Elisha Corsiga fait partie des jeunes francophon­es de la Loi 5. En immersion à Sisler High, la jeune fille d’origine philippine partage son temps entre ses études, son engagement au conseil étudiant et sa passion pour la langue française.

Elisha Corsiga, c’est la vision moderne de la Loi 5. L’incarnatio­n d’une génération prodigue, affamée de découverte­s et captivée par le monde. À 17 ans, c’est depuis 14 ans déjà qu’elle s’imprègne de la langue française. Une idée de ses parents, arrivés des Philippine­s au courant des années 1990. Son père y pose bagages en 1993, suivi quatre ans plus tard par son épouse. Alors à la maison, ce n’est pas l’anglais ni le français qui rythme le quotidien, non. Mais la langue de sa terre natale, le tagalog. En s’intégrant, le couple intègre ses deux enfants, Elisha l’aînée, et Jamuel, le benjamin. Elisha l’assure : « C’était le choix de mes parents que nous allions en école d’immersion. Ils ont suivi le parcours de mon cousin, maintenant à l’Université de Saint-Boniface. Pour eux, c’était évident. »

Une évidence devenue ordinaire pour Elisha. D’abord à l’école primaire Lansdowne, c’est maintenant à Sisler High qu’elle poursuit son cursus en 12e année. Après une semaine d’examens, elle souffle enfin. D’ici la fin juin, elle obtiendra son double diplôme francoangl­ais. Elle complète dans un parlé plus que déterminé : « Le français est une langue si belle, qui permet de communique­r avec tant de gens! Je suis très fière de ce diplôme mais aussi de pouvoir m’exprimer en français ».

En plus de ses études, l’élève se mobilise pour se faire étendard de la francophon­ie. Présidente du conseil étudiant du départemen­t de français de son école, elle est aussi conseillèr­e secondaire au Conseil jeunesse provincial depuis septembre 2016. Simultaném­ent, les deux conseils planifient les évènements qui rythmeront tout au long de l’année la communauté étudiante manitobain­e. Elle tempère : « C’est une manière d’améliorer mon français, comme celui de mes camarades, parfois un peu timides. Même si nous faisons des fautes, il faut que nous nous rassurions! ».

Pour se rassurer, elle progresse sur tous les fronts. Chaque vendredi, c’est un mot, une expression nouvelle en français qui est diffusée sur les ondes de la radio de l’école à l’ensemble des étudiants lors du French Friday. Elle pétille : « cette semaine c’était : Bon travail, à la SaintValen­tin : J’aime ton sourire et pour Noël : Joyeux Noël! »

Mais c’est à la maison aussi qu’elle s’entraîne. Comme nombre de jeunes de sa génération, c’est en parcourant les réseaux sociaux qu’Elisha se découvre. Youtube et ses portes drapeaux outre-Atlantique. Elle liste : « J’adore Norman qui déjà à ses débuts, était très drôle! Mais aussi d’autres youtubeurs gamers comme Squeezie ou Cyprien. »

De sa bibliothèq­ue, elle a exploré les mondes du Petit Prince d’Antoine de SaintExupé­ry et l’Étranger d’Albert Camus. Et comme les étudiants français, elle ne savait trop où se positionne­r après avoir lu ce chef-d’oeuvre de l’absurde. « Je pense que je l’ai aimé. Mais je ne sais pas comment me sentir face au personnage principal.» Comme en France. Et sûrement pour tous ceux qui auraient bouquiné Camus.

Avec le temps, ces découverte­s deviennent munitions pour l’avenir de la jeune femme. Plus tard? C’est le droit qu’elle veut exercer. Celui de la famille. Mais Elisha brocarde : « J’ai peur d’être beaucoup trop sensible pour le social! » Ses demandes déjà parties, elle patiente. Rêve de voyage. D’explorer son île natale, la France, l’Italie peut-être.

Ainsi, c’est courir le monde qu’elle souhaite. S’imprégner des autres pour mieux revenir chez les siens. Elle le garantit : « Je veux voyager et rentrer à Winnipeg par la suite. Il y a ma famille, mes amis bien sûr, mais aussi toute la francophon­ie manitobain­e. Les personnes les plus gentilles possibles. Et je veux leur rendre ce qu’elles m’ont donné. »

Comme un juste retour des choses. Elle renchérit : « Je trouve ça dommage que si peu de gens parlent français! Ils devraient en avoir des notions dès le plus jeune âge. Lorsque je siège au conseil étudiant et que j’entends de l’anglais je stoppe net. Et je dis : Ici, on parle français! » Une règle à laquelle elle se plie quotidienn­ement. Tant et si bien que parfois, la jeune femme se surprend à ne plus trouver ses mots ni en tagalog, ni en anglais. Mais bien en français.

Face à l’hésitation, elle pianote sur son téléphone. Si vite, le mot juste est tout trouvé. Une habitude dont elle se défait bien vite tant son vocabulair­e s’étoffe au fil des rencontres. Sa dernière entrevue reste virtuelle. Elisha retrace : « Dans l’histoire de France, c’est Jeanne d’Arc que j’admire. Une femme vraiment confiante, forte, capable de diriger les autres. Ça m’inspire. »

Un jour, peut-être, Elisha Corsiga en inspirera d’autres. Cette troisième langue, c’était son défi. « Parler une autre langue, c’est un outil d’avenir. Le français, au même titre que l’allemand, et que toutes les autres langues d’ailleurs, c’est un outil formidable que nous aurons pour communique­r.» Cette troisième langue, c’est maintenant l’une de ses réussites. Et grâce à elle sûrement, elle est devenue citoyenne du monde.

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Photo : Elisabeth Vetter Elisha Corsiga.

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