Difficile de vendre les bleuets en corymbe
La récolte de bleuets en corymbe s’annonce très bonne cette année, mais plusieurs producteurs ne réussissent pas à faire leur place sur les tablettes par rapport aux produits du New Jersey ou de la ColombieBritannique. Une partie des bleuets risque donc de pourrir dans les champs.
« C’est un problème récurrent. Toutes les chaînes se mettent à offrir des spéciaux incroyables pendant notre production. Avant que les bleuets d’ici arrivent sur le marché, les prix des autres producteurs sont plus élevés », estime Laurier Lussier, président de l’Association des producteurs de bleuets en corymbe de la Vallée-du-Haut-Saint-Laurent, qui regroupe une vingtaine de membres.
Il affirme que les chaînes d’alimentation se font offrir des prix « dérisoires » par les producteurs de l’extérieur au moment même où la récolte québécoise arrive. « Je pense qu’ils envoient leurs surplus ailleurs pour maintenir leurs prix sur leur propre marché », analyse celui qui ose qualifier la manoeuvre de dumping. Les prix sont plus élevés avant et après la production québécoise, quand la ColombieBritannique et le New Jersey sont déjà en production ou quand le Mexique et le Chili prennent le relais. « Ça nous coupe totalement l’herbe sous le pied », résume le président, qui possède la Bleuetière L& L à Saint-Antoine-Abbé.
L’Association fait un peu de promotion pour faire connaître aux consommateurs la saison du bleuet en corymbe (mi-juillet à fin août), qui diffère de celle du bleuet sauvage du Lac-Saint-Jean. « J’aimerais bien qu’on réunisse tous les producteurs de bleuets du Québec », ajoute Laurier Lussier, signalant qu’une table de concertation est prévue fin octobre avec l’appui de l’Union des producteurs agricoles (UPA). Des discussions pour un plus grand regroupement ont par ailleurs déjà eu lieu en Montérégie au sein du clubconseil pour les producteurs de bleuets en corymbe, mais rien de plus large n’a vu le jour pour le moment.
Épiciers mal informés
« Il faut appeler chaque épicerie pour faire une offre », insiste Florent Gravel, président de l’Association des détaillants en alimentation du Québec (ADAQ). Ce dernier refuse d’accuser les épiciers de bouder les produits du Québec. Il estime au contraire que des efforts ont été faits ces dernières années pour offrir d’avantage de produits locaux, notamment dans le secteur des fraises. Il rappelle cependant que les circulaires des chaînes sont préparées trois ou quatre semaines d’avance. Même pour les achats des épiciers propriétaires, on doit faire une offre une semaine avant la livraison.
« Il faut avoir une équipe des ventes dont le rôle est de joindre tous les détaillants », affirme Florent Gravel, faisant valoir que des entreprises comme Agropur, Parmalat ou les grandes brasseries font des appels tous les trois jours. Il faut aussi des volumes constants pour que les épiciers puissent compter sur la marchandise. Pour une annonce en circulaire, on doit disposer d’encore plus de volumes puisque les grandes chaînes ne veulent pas décevoir les clients et manquer d’un produit en cours de semaine.
« Le gouvernement n’en fait pas assez », avance par ailleurs Florent Gravel, qui pense que la promotion des aliments du Québec pourrait être plus importante, notamment pour annoncer le moment où certains produits d’ici sont prêts.