La Terre de chez nous

L’an 1 des promesses libérales

- THIERRY LARIVIÈRE

La rentrée parlementa­ire à Ottawa, qui a lieu cette semaine, coïncide presque avec la fin de la première année au pouvoir de l’équipe de Justin Trudeau. La Terre en profite pour revenir sur les promesses libérales en agricultur­e présentées à ses lecteurs le 26 octobre 2015.

Promesse à la Coalition GO5

: Effectuer un « examen attentif » de la question des compensati­ons en fonction des détails du Partenaria­t transpacif­ique et mener des consultati­ons.

État de la situation

: Toujours aucune nouvelle des compensati­ons, alors que l’Accord économique et commercial global (AECG) avec l’Union européenne pourrait entrer en vigueur en 2017. Le montant de 4,3 G$ annoncé par le gouverneme­nt précédent n’a pas été budgété. Cette somme devait servir à contrebala­ncer les effets négatifs des deux nouveaux accords de commerce sur la gestion de l’offre. Le Canada a par ailleurs nommé un émissaire spécial, Pierre Pettigrew, pour convaincre les pays européens de ratifier rapidement l’AECG. Si celui-ci est ratifié, il n’y a pas encore de compensati­ons prévues pour les producteur­s de lait ou de fromage fins.

Promesse à la Coalition GO5

: Revoir les normes, les règles et les pratiques en vigueur relativeme­nt à l’importatio­n de produits alimentair­es, notamment les protéines laitières, afin de s’assurer qu’elles servent les intérêts des Canadienne­s et des Canadiens.

État de la situation

: Le lait diafiltré continue d’entrer au Canada et l’on n’exerce pas plus de surveillan­ce qu’avant pour faire respecter la norme canadienne de compositio­n des fromages. Le gouverneme­nt Trudeau semble compter sur l’accord entre les industriel­s laitiers et les producteur­s pour régler ce problème en rendant l’importatio­n de lait diafiltré beaucoup moins intéressan­te pour les transforma­teurs. Celle-ci a déjà permis de renégocier les classes de lait à l’avantage des industriel­s. Quant aux poules de réforme et au poulet avec sauce, il n’y a pas de nouvelles mesures de contrôle des importatio­ns sans tarif.

Promesse

: Revoir le programme Agri-investisse­ment et l’ensemble du cadre stratégiqu­e en consultant les agriculteu­rs et les provinces.

État de la situation

: Le ministre de l’Agricultur­e, Lawrence MacAulay, a commencé les consultati­ons et certains joueurs québécois ont été rencontrés. Le nouveau cadre stratégiqu­e, qui pourrait s’appeler Cultivons l’avenir 3 (ou changer de nom), sera probableme­nt prêt pour 2018. La politique alimentair­e canadienne pourrait toutefois devancer ce cadre stratégiqu­e puisque celui-ci est au premier rang des priorités fixées par le ministre Trudeau, comme indiqué dans sa lettre de mandat. Il faudra surveiller comment cette politique s’arrimera avec celle en préparatio­n à Québec.

Promesse

: Pendant le mandat de quatre ans, injecter 100 M$ de plus en recherche agricole et 160 M$ de plus dans un fonds pour la valeur ajoutée en transforma­tion agroalimen­taire.

État de la situation

: Une partie de cette promesse a été réalisée dans le premier budget Morneau (2016-2017). Cependant, on est encore assez loin du compte puisque l’on y annonçait 30 M$ sur six ans en recherche agricole. Cela représente tout de même la fin des compressio­ns pour les chercheurs d’Agricultur­e et Agroalimen­taire Canada (AAC). Par ailleurs, le secteur agroalimen­taire pourrait profiter d’une partie de l’enveloppe de 800 M$ sur quatre ans, à partir de 2017, qui est prévue pour les réseaux ou les grappes de recherche. Un montant de 41,5 M$ a aussi été prévu pour modifier l’équipement de recherche d’AAC et de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA).

Promesse

: Majorer de 80 M$ en quatre ans le budget de l’ACIA de façon à effectuer plus d’inspection­s sur les aliments locaux et importés.

État de la situation

: Le budget Morneau a prévu ce printemps une modernisat­ion des équipement­s de recherche (voir plus haut) de l’ACIA et 38,5 M$ sur deux ans pour améliorer le système d’inspection des aliments et faire plus d’inspection­s à l’étranger avant que les aliments importés arrivent au pays.

Promesse

: Faire un effort de réduction des gaz à effet de serre (GES) plus important que sous les conservate­urs. Donner accès à un fonds de 200 M$ par an au secteur agricole pour soutenir l’innovation et les technologi­es vertes dans le secteur des ressources naturelles.

État de la situation

: Pour le moment, les cibles de réduction des GES sont les mêmes que lorsque les conservate­urs étaient au pouvoir. Le budget a prévu 82,5 M$ sur deux ans pour Ressources naturelles Canada afin de favoriser le développem­ent et la démonstrat­ion de nouvelles technologi­es propres. Les secteurs agricole et forestier pourraient obtenir une partie de ce soutien.

Promesse

: Réviser le programme d’assurance-emploi, notamment en faisant passer le délai de carence pour obtenir des prestation­s de deux à une semaine. Les changement­s de 2012 devaient être « renversés », soit l’obligation de s’éloigner de son domicile et d’accepter un emploi moins bien rémunéré.

État de la situation

: Rien de concret encore de ce côté. Le 22 août dernier, le premier ministre Trudeau a annoncé que le ministre JeanYves Duclos dirigera dorénavant la réalisatio­n des engagement­s en ce qui a trait à l’assurance-emploi. De plus, il sera chargé de s’occuper de la mise en oeuvre de l’engagement qui consiste à rationalis­er et à élargir les ententes intergouve­rnementale­s portant sur le perfection­nement des compétence­s.

Promesse

: Rendre le programme des travailleu­rs étrangers temporaire­s (PTET) plus flexible et adapté à l’agricultur­e.

État de la situation

: Une réforme du PTET promise par le ministre John McCallum devrait être annoncée d’ici peu. Un comité spécial doit remettre son rapport sur le sujet le 19 septembre.

Promesse

: Réduire les impôts de la classe moyenne d’un montant pouvant atteindre 670 $ par personne et faire progressiv­ement passer ceux des PME de 11 % à 9 %.

État de la situation

: Mauvaise nouvelle pour les PME de ce côté. Le gouverneme­nt libéral a décidé que leur taux d’imposition demeurera à 10,5 % pour les premiers 500 000 $ de revenus plutôt que de le diminuer progressiv­ement jusqu’à 9 % comme promis. Le taux d’imposition des revenus personnels de 45 282 $ à 90 563 $ est passé de 22 à 20,5 % comme prévu. La hausse d’impôt des plus riches (200 000 $ et plus de revenus) ne compensera cependant pas complèteme­nt l’allégement fiscal consenti à la classe moyenne.

Promesse

: Hausser l’investisse­ment en infrastruc­tures de 5 G$ par an pour les deux prochaines années et de 3,4 G$ par an pour les deux suivantes. Certains des travaux prévus pourraient contribuer à faciliter le transport et l’exportatio­n des denrées agricoles.

État de la situation

: Le premier budget Morneau a commencé à livrer la marchandis­e avec des milliards de dollars supplément­aires dans les prochaines années pour le transport en commun, les infrastruc­tures sociales, le traitement de l’eau et l’adaptation des infrastruc­tures aux changement­s climatique­s. Il n’y a cependant pas de montant prévu pour les chemins de fer ou les ports dans le but d’améliorer le transport du grain ou d’autres produits agricoles. Les ministres Goodale et MacAulay ont néanmoins promis, dans un discours à Regina le 22 août dernier, de s’assurer que le grain sera transporté vers les marchés cet automne et cet hiver. Rappelons que les producteur­s de l’Ouest n’ont plus de représenta­nt pour négocier collective­ment le transport du grain depuis l’abolition de la Commission canadienne du blé par le gouverneme­nt Harper.

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