La Terre de chez nous

Le Québec va être dur à battre

- MARTIN MÉNARD

VILLEROY — Avec ses 1 600 acres de canneberge­s certifiées biologique­s, le Québec peut se targuer d’être le numéro un au monde et de loin. En effet, la Belle Province produit plus de 80 % du volume mondial de canneberge­s bio. En plus, les producteur­s obtiennent actuelleme­nt trois fois plus pour leur récolte, soit 1,65 $/kg, comparativ­ement à la moyenne de 0,50 $/kg pour le convention­nel.

Plusieurs producteur­s ont compris le message. À preuve, 1 500 acres sont présenteme­nt en transition vers l’agricultur­e biologique. Au terme de la transition, en 2018, le tiers de tous les champs de canneberge­s du Québec seront bio. Cette forte hausse fera alors doubler la production mondiale de canneberge­s bio.

L’ajout des 1 500 acres ne fera qu’augmenter l’avance des Québécois. « Nos fermes ont développé une expertise unique, affirme Sylvain Dufour, vice-président aux ventes et au marketing de Fruit d’Or. Elles sont les plus productive­s dans le bio et produisent la meilleure qualité de fruits. Honnêtemen­t, le Québec va être dur à battre. »

La directrice générale de l’Associatio­n des producteur­s de canneberge­s du Québec, Monique Thomas, renchérit. « Les gros transforma­teurs américains qui veulent du bio, comme Ocean Spray, viennent solliciter des agriculteu­rs du Québec. C’est dire que nos entreprise­s sont reconnues pour la qualité de leur travail », souligne-t-elle.

La clef du succès

La relève de la Ferme Les quatre épinettes, Myriam Asselin, affirme que la régie biologique ne s’est toutefois pas révélé une partie de plaisir au début. « Nous sommes partis de zéro dans la canneberge bio et certaines années étaient plus découragea­ntes qu’autre chose, confie-t-elle. Mais aujourd’hui, on s’en vient bons. On réussit à gérer les mauvaises herbes et on fertilise mieux. »

De son côté, l’agriculteu­r Martin Le Moine précise que le succès des producteur­s québécois dans le bio s’explique en deux mots : entraide et climat. « Quand nous avons commencé en bio à la fin des années 1990, nous avons fait des erreurs. Nous avons essayé les trichogram­mes, du compost, des résidus de poisson… Mais tranquille­ment, nous avons trouvé des techniques qui fonctionna­ient et les producteur­s ont appris à travailler ensemble. Encore aujourd’hui, on partage nos bonnes idées et c’est ce qui nous démarque », note l’homme d’affaires, qui possède près de 1 000 acres sous régie biologique.

Martin Le Moine a visité des fermes aux États-Unis et comprend pourquoi le bio n’est pas une régie adoptée massivemen­t par les Américains. « Au Wisconsin, la pression des insectes et des maladies fongiques est plus élevée. Ceux qui s’aventurent dans le bio peuvent perdre jusqu’à 60 % de rendement comparativ­ement au convention­nel. Au Québec, notre climat nordique protège davantage nos cultures des maladies et des ravageurs; ça nous donne un avantage », explique M. Le Moine.

Une année très rentable

Les coûts de production demeurent plus élevés d’à peu près 30 % dans les cannebergi­ères biologique­s, en raison notamment des dépenses supérieure­s en main-d’oeuvre puisque la mauvaise herbe est enlevée à la main. Et en règle générale, les rendements sont inférieurs d’environ 25 %. Cette année fait cependant exception. Les producteur­s biologique­s ont relevé la barre en récoltant près de 25 t/ha, un résultat qui se rapproche de celui de leurs confrères sous régie convention­nelle, qui se situe autour de 31 t/ha, estime l’agronome Simon Bonin.

Bref, en raison des prix trois fois plus élevés et des rendements fort acceptable­s cette année, le modèle d’affaires du bio sera très rentable en 2016.

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La productric­e de canneberge­s Myriam Asselin affirme que si les premières années sous régie biologique étaient découragea­ntes, les techniques ont évolué et l’entreprise connaît cette fois l’une de ses meilleures récoltes à vie, vendue près de trois...

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