« Les multimillionnaires vont passer Noël quand même »
– PIERRE PARADIS, MINISTRE DE L’AGRICULTURE
Pierre Paradis verse de l’huile sur le feu et provoque la colère du milieu agricole. En réponse à la mise en demeure expédiée par l’Union des producteurs agricoles (UPA) au sujet de sa réforme du Programme de crédit de taxes foncières agricoles (PCTFA) en début de semaine dernière, le ministre de l’Agriculture a insulté les agriculteurs le 14 décembre.
« J’ai quelques cas, des multimillionnaires; ils vont passer Noël quand même », a-t-il ironisé devant la presse parlementaire. Il a répété que les changements toucheront 1 % des agriculteurs avec une perte moyenne de 113 $, disant s’appuyer sur des projections du ministère des Finances « vérifiées et revérifiées ».
Le président de l’UPA, Marcel Groleau, a qualifié cette déclaration d’insultante, précisant que le ministre s’est lui-même « disqualifié » pour représenter les producteurs. Il fait notamment valoir que le revenu net moyen par entreprise agricole est de 34 900 $ au Québec et que la dette moyenne dépasse le demi-million. « Les agriculteurs québécois méritent mieux », conclut Marcel Groleau.
Rappelons que l’UPA, appuyée par la Fédération québécoise des municipalités, demande le report d’un an de la réforme. Selon l’organisation, près de 80 % des entreprises agricoles subiront une hausse de leur facture de taxes variant de 30 à 40 %.
Selon l’UPA, Québec se place dans l’illégalité en apportant des modifications au Programme. « Le gouvernement contourne le Parlement », précise Marcel Groleau au sujet des mises en demeure conjointes expédiées la semaine dernière aux ministères de l’Agriculture et des Affaires municipales. Québec, estime l’UPA, n’a pas procédé aux changements législatifs requis avant d’envoyer aux municipalités le nouveau taux.
Réactions
« C’est la goutte qui fait déborder le vase », a également réagi le président de la Fédération de l’UPA du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Mario Théberge. Celui-ci dit avoir annulé une rencontre qui devait avoir lieu avec le ministre Paradis, le 15 décembre.
« Ce ministre est nuisible à l’agriculture du Québec et nous ne voulons plus faire affaire avec lui », a ajouté le président de la fédération régionale. Il conviait d’ailleurs les agriculteurs à manifester leur mécontentement devant les bureaux du premier ministre et député de la région, Philippe Couillard, le 19 décembre. D’autres manifestations étaient prévues le lendemain à Montréal et en région.
Du côté de l’opposition, tant le Parti québécois (PQ) que la Coalition avenir Québec (CAQ) dénoncent les propos du ministre Paradis. Le porte-parole du PQ en matière d’agriculture et député de Berthier, André Villeneuve, juge que Pierre Paradis fait preuve d’arrogance et de mépris à l’endroit des agriculteurs. Si ces derniers possèdent des actifs de valeur élevée, reconnaît-il, ils supportent également une énorme dette. « M. Paradis utilise l’arme des faibles, déclare André Villeneuve. Le ministre aurait intérêt à être plus à l’écoute. »
La députée de Mirabel et porte-parole de la CAQ en agriculture, Sylvie D’Amours, considère qu’il s’agit de la marque de commerce du Parti libéral du Québec, « qui regarde le monde de haut ». Elle trouve les propos du ministre Paradis « insultants » et préfère en rire. « S’il me voit comme Mme Douglas des Arpents verts, lui, c’est le cirque libéral. C’est bien dommage, parce que l’agriculture est un métier auquel on devrait redonner ses lettres de noblesse. C’est un privilège d’avoir des produits sains, de qualité et respectueux de l’environnement et du bien-être animal. »
Le ministre Paradis n’avait pas répondu à l’appel de la Terre au moment de mettre sous presse.