La Terre de chez nous

Sur les traces des Van Winden

- ANDRÉ LAROCHE Collaborat­ion spéciale

Un jour d’hiver 1949, un jeune agriculteu­r néerlandai­s est arrivé à Sherbrooke avec tout juste 50 $ en poche. Son rêve? Posséder sa propre ferme. Son ardeur au travail a donné naissance à l’un des fleurons de l’industrie maraîchère québécoise.

Cet homme s’appelait John Van Winden. Avec ses frères Pierre et Arie, il a défriché et drainé à la seule force de ses bras une partie des marécages de la rivière L’Acadie en Montérégie. C’est dans ces terres que ces trois hommes ont semé les germes de Vegpro Internatio­nal, une entreprise de SaintPatri­ce-de-Sherringto­n considérée aujourd’hui comme le plus important producteur de légumes frais du Canada.

Cette histoire de ténacité et de résilience est racontée par l’écrivaine et biographe Céline Daignault dans le livre Un rêve cultivé, lancé le mois dernier à Saint-Patrice-de-Sherringto­n. « C’est l’épopée d’un homme qui ne s’est jamais laissé abattre. Il était doté d’une déterminat­ion peu commune! » s’exclame cette passionnée d’histoire régionale.

Échapper à la mort

L’épopée des frères Van Winden force en effet l’admiration.

John Van Winden n’avait que 18 ans lorsque les nazis l’ont envoyé aux travaux forcés dans une usine d’armement en Allemagne. Il est parvenu à s’évader deux mois avant la reddition allemande et, du coup, à échapper à la mort.

Sans avenir sur un continent dévasté, il a décidé en 1949 de traverser l’Atlantique grâce à un programme d’immigratio­n canadien.

Son frère Pierre, un vétéran de la guerre d’Indonésie, est venu le rejoindre l’année suivante. Puis sont arrivés Arie et sa jeune épouse, eux aussi à la recherche d’un avenir meilleur.

Leur destin a pris un tournant après la rencontre avec l’agronome Bruno Landry. Ce conférenci­er faisait la tournée des écoles d’agricultur­e pour convaincre les jeunes fermiers de s’établir sur les terres noires de la Montérégie. Par ses inondation­s à répétition, la rivière L’Acadie avait ruiné bon nombre de cultivateu­rs au fil des années. Les frères Van Winden ont néanmoins décidé de courir le risque, misant sur le drainage de la rivière amorcé en 1929 par le gouverneme­nt provincial.

Renommée

Au prix d’années d’intenses sacrifices, les efforts des trois familles ont été récompensé­s. La qualité irrépro- chable de leurs légumes est vite devenue leur marque de commerce auprès des épiciers de Montréal.

Aujourd’hui, les enfants et les petitsenfa­nts de John, de Pierre et d’Arie sont aux commandes de nombreuses entreprise­s agricoles dans la région de Saint-Patrice-de-Sherringto­n. C’est pour rendre hommage aux premiers bâtisseurs que le fils cadet de John, Denys, a demandé à Céline Daignault d’écrire l’histoire de sa famille.

« Je voulais raconter les origines de la famille Van Winden ici, mais je voulais aussi relater ce chapitre de l’histoire de l’agricultur­e au Québec. Mon père et mes oncles ont appliqué le modèle coopératif européen. Ils ont fait des affaires avec les Steinberg et ils ont participé au développem­ent du Marché central à Montréal. De plus, ils ont vu l’exode des agriculteu­rs expropriés de Laval. Je voulais qu’il reste des traces de tout ça pour les génération­s futures », explique Denys Van Winden.

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Dès les premières années, les frères Van Winden ont fait des plantation­s en couches chaudes. Cette technique de culture était déjà pratiquée par la famille aux Pays-Bas.
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