Les éleveurs de veaux craignent l’invasion néerlandaise
L’arrivée massive de viande de veau européenne au Québec par l’entremise de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne inquiète les éleveurs d’ici.
Les premiers producteurs de veau de l’Union européenne, les Néerlandais, ont d’abord conquis la France et le reste du Vieux Continent. Ils se préparent maintenant à traverser l’Atlantique. En 2016, les Pays-Bas ont exporté au Canada près de 28 000 kg de veau. Pour les six premiers mois de 2017, leurs envois atteignent déjà presque 25 000 kg, même si le veau européen est actuellement frappé d’un tarif de près de 30 %! « Les importations vont doubler », estime Pierre-Luc Nadeau, président du comité de mise en marché veaux de lait aux Producteurs de bovins du Québec. « Les Néerlandais produisent 20 fois ce qu’ils consomment. Ils sont dans le mood de conquérir le monde », ajoute LouisJoseph Beaudoin, président du comité de mise en marché veaux de grain.
En visite en France à la fin d’avril pour le symposium mondial sur le veau, les deux dirigeants ont constaté que leurs cousins français éprouvent de la difficulté à se faire imposer le modèle néerlandais d’intégration verticale. Le joueur dominant, le groupe Van Drie, possède tous les maillons de la chaîne, de la fabrication de la poudre de lait à l’usine de tannage des peaux, en passant par la transformation de la viande.
Inégalité
Les producteurs québécois ne se battent pas à armes égales. Ainsi, les éleveurs européens utilisent deux antibiotiques interdits au Canada. Il s’agit de la doxy- cycline et de la colistine. Cette dernière serait particulièrement efficace pour le traitement de la Salmonella Dublin, une maladie qui cause de la mortalité chez les veaux. L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) précise qu’elle analyse les produits importés pour la détection de résidus de doxycycline. « La colistine ne fait pas partie de nos activités de surveillance. Notre personnel de laboratoire et nos chimistes sont en train d’étudier diverses approches d’analyse », indique à La Terre la porteparole de l’Agence, Lisa Murphy.
La réglementation européenne sur le transport, qui interdit le déplacement des veaux de moins de 14 jours, confère aussi un avantage aux producteurs néerlandais. Le taux de mortalité 0-30 jours y est deux fois moins élevé qu’au Québec. Les coûts liés à la santé en Europe tournent autour de 14 $/veau comparativement à quelque 50 $/veau ici.
S’ils ne peuvent rivaliser avec le coût de production de la viande européenne, les producteurs d’ici comptent cependant sur la qualité et la notoriété du veau du Québec pour conserver leurs parts de marché.