Quand les poules pondent trop…
MONT-LAURIER — Valérie Campeau s’est lancée dans un tout nouveau projet permettant de vendre directement aux consommateurs les oeufs provenant d’un maximum de 500 poules pondeuses. Elle a transformé une ancienne porcherie en un sympathique poulailler, comprenant une cour extérieure privée.
Ses 260 poules apprécient cet élevage en liberté, mais elles pondent trop! « Mes ventes en début de saison ont été plus lentes que prévu, alors je me retrouve avec un réel surplus d’oeufs. Les poules pondent beaucoup, et évidemment, elles n’arrêtent pas! » explique la propriétaire des Jardins Bio du Solstice, à Mont-Laurier.
Nombreux défis
« L’un des défis avec les oeufs consiste à les laver, car les poules ne pondent pas toujours dans les couvoirs comme prévu. Et je ne veux pas les tremper dans l’eau afin de faire comme en Europe où les oeufs peuvent être conservés à la température de la pièce. Sauf que les laver à la main demande du temps », assure l’agricultrice.
L’autre défi concerne la mise en marché. La réglementation lui interdit de vendre ses oeufs aux supermarchés et aux restaurants. L’hiver venu, l’agricultrice ne pourra plus miser sur ses paniers bio, ni sur le marché public local pour les écouler. « Je vais faire du porte-à-porte, une espèce de run d’oeufs où j’effectuerai la livraison directement aux clients. Les gens aiment mes oeufs avec leur jaune plus foncé. Je suis confiante; un jour, je pourrai tous les vendre », affirme-t-elle.
De la compétition
En Outaouais, les frères Bertrand ont également démarré cette année un projet de vente directe d’oeufs aux consommateurs. Ils ont été surpris par le changement de réglementation du ministère de l’Agriculture, qui autorise depuis juin tout producteur agricole dûment enregistré à vendre des oeufs non classés dans les marchés publics. « Ça nous rentre dedans. Avant, nous étions les seuls à vendre des oeufs dans le marché public; maintenant, nous sommes cinq. Nos ventes ont baissé de 30 % en moyenne. Faut faire avec », se résout Samuel, de la Ferme aux Saveurs des Monts.
Tout comme Valérie Campeau, ils connaissent des surplus d’oeufs. « Les poules ne prennent pas de break! On a 500 oeufs par jour à vendre. Il y a des matins où c’est stressant de voir toutes les douzaines d’oeufs qu’il faut sortir », mentionne-t-il. Ils ont complètement réaménagé une ancienne écurie, en installant même un plancher chauffant pour le confort de leurs 560 poules.
À Rivière-du-Loup, Jean-Mathieu D’Amour possède l’une des trois fermes bénéficiant présentement de ce prêt de quotas. Et il arrive à vendre les oeufs de ses 560 poules sans surplus. « Ce sera par contre plus difficile cet hiver. On misera encore sur notre kiosque à la ferme, où nous vendons aussi notre propre lait, mais nous réfléchissons à d’autres stratégies pour remplacer nos ventes aux marchés publics », explique M. D’Amour.
La réalité de la mise en marché directe fait réfléchir l’agriculteur Pascal Genest-Richard, un des candidats retenus en 2016 qui n’a pas démarré son projet. « Ça prend beaucoup d’investissements que tu ne peux rentabiliser que durant six mois. Aussi, payer 5 $ par poule par année à la Fédération en cotisation, sans pouvoir
« On s’y attendait. Faut se donner le temps de développer nos marchés. Pour l’instant, on transforme une partie de nos surplus en quiches et autres. » – Samuel Bertrand
bénéficier de ses services de mise en marché, on trouve ça beaucoup pour rien », souligne-t-il. Un candidat retenu cette année, Benoît Daviau, testera quant à lui dès cette année les possibilités de mise en marché en commençant avec une centaine de poules.