La Terre de chez nous

Les vertus inexplorée­s du gras laitier

- RACHEL GERVAIS, PH. D., AGR. Professeur­e au Départemen­t des sciences animales, FSAA, Université Laval

La matière grasse laitière représente une part significat­ive de la haute valeur nutritive du lait. On identifie aujourd’hui, dans le gras laitier de vache, tout près de 400 acides gras présents en concentrat­ions variables, la majorité de ceux-ci produits par la glande mammaire ou dérivés de l’alimentati­on de l’animal.

Abondantes dans le rumen, les bactéries sont aussi une source d’acides gras qui peuvent, après avoir été digérés par la vache, être incorporés à la matière grasse laitière. Or, les bactéries ont le potentiel de synthétise­r des acides gras bien particulie­rs : les acides gras à chaîne ramifiée. Bien que cette petite modificati­on de structure puisse paraître anodine, il n’en demeure pas moins que les acides gras à chaîne ramifiée ont un rôle essentiel à jouer dans la santé du nouveau-né.

Comment?

Les acides gras à chaîne ramifiée sont aussi présents dans le vernix, cette matière cireuse qui recouvre et protège la peau du bébé pendant la grossesse et qui, tranquille­ment, se dissout dans le liquide amniotique à l’approche de l’accoucheme­nt. De récentes études ont démontré que pendant le dernier tiers de la grossesse, le bébé consomme le liquide amniotique riche en acides gras à chaîne ramifiée, ce qui favorisera­it l’établissem­ent d’un microbiote intestinal sain et, par conséquent, contribuer­ait au développem­ent et à la santé du système digestif du nouveau-né.

Des études chez un modèle de rongeurs ont d’ailleurs montré que l’ajout d’acides gras à chaîne ramifiée à la diète du nouveau-né prématuré prévient l’apparition de l’entérocoli­te nécrosante. Ainsi, cette maladie grave fréquemmen­t rencontrée chez les bébés prématurés pourrait être liée au fait que ces nouveau-nés sont privés de la consommati­on de liquide amniotique, celle-ci s’accentuant normalemen­t à l’approche du terme de la grossesse.

Parmi les autres bénéfices associés à la consommati­on d’acides gras à chaîne ramifiée, on rapporte des effets anticancér­igènes et l’atténuatio­n des symptômes de certaines maladies neurologiq­ues tels la leucinose, mieux connue sous le nom de « maladie du sirop d’érable », et l’autisme, par exemple. À l’âge adulte, le gras laitier est de loin la principale source d’acides gras à chaîne ramifiée dans notre alimentati­on.

Nos travaux de recherche au Départemen­t des sciences animales de l’Université Laval ont par ailleurs montré que l’alimentati­on de la vache influence la compositio­n en acides gras à chaîne ramifiée du lait. Vu les effets bénéfiques associés à ces acides gras laitiers, nos efforts de recherche se poursuiven­t afin d’identifier les stratégies d’alimentati­on de la vache qui maximisent les concentrat­ions de ces acides gras aux vertus encore inexplorée­s.

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L’alimentati­on de la vache influence la compositio­n en acides gras à chaîne ramifiée du lait.

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