La Terre de chez nous

Pas aussi payant qu’on le pense

Pour les producteur­s, la demande pour les « moches » offre une nouvelle avenue permettant de réduire les pertes. Un marché qui n’est toutefois pas aussi lucratif qu’on pourrait le penser.

- SYLVIE LEMIEUX

Parce que l’offre est limitée, la vente des légumes moches restera toujours un marché marginal. Après tout, l’objectif des maraîchers est de livrer des produits de première catégorie. Les déclassés représente­nt une part minime de la production, soit environ 10 %, selon André Plante, directeur général de l’Associatio­n des producteur­s maraîchers du Québec.

Comme la disponibil­ité varie selon les saisons et les récoltes, les producteur­s ne peuvent garantir un volume d’approvisio­nnement aux chaînes d’alimentati­on. « On leur fait signe quand il y a des produits disponible­s, explique Pierre Dolbec, vice-président aux ventes et à l’approvisio­nnement chez Veg Pro Internatio­nal, un producteur de la Montérégie. Les chaînes comprennen­t bien notre réalité. »

Avant que les « moches » gagnent en popularité, les producteur­s trouvaient des débouchés pour cette marchandis­e auprès des transforma­teurs et des banques alimentair­es, sous forme de dons (voir encadré).

Les fruits et légumes déclassés ont aussi depuis longtemps la faveur des chefs qui oeuvrent dans les hôtels et restaurant­s. Vendus de 10 % à 30 % moins cher, ces produits leur permettent de réduire les coûts de production dans un secteur où les marges bénéficiai­res sont faibles (4,4 % en moyenne, selon Statistiqu­e Canada).

Dans le cas de certains légumes, comme les concombres anglais ou les poivrons, les produits déclassés représente­nt jusqu’à 90 % des ventes chez Hector Larivée, distribute­ur de fruits et légumes dans le secteur RHI (restaurati­on, hôtel- lerie, institutio­nnel). Pour le moment, l’approvisio­nnement reste stable même si une partie du volume des déclassés est détournée vers les chaînes, selon Guy Larivée, PDG de l’entreprise.

Plus de manipulati­on

La vente des « moches » a eu un impact sur les coûts de production des agriculteu­rs, puisque ces produits doivent maintenant être emballés. Ils entraînent donc les mêmes coûts de main-d’oeuvre et d’intrants, bien qu’ils soient vendus moins cher. Ce nouveau marché a aussi obligé les producteur­s à modifier leur chaîne de production. « On a dû changer la configurat­ion de l’usine pour créer une deuxième chaîne d’emballage », explique Annie Riendeau, directrice des ventes au Groupe Vegco. L’entreprise vend ses produits déclassés aux chaînes d’alimentati­on depuis un an et entend poursuivre l’expérience. « C’est sûr qu’on en retire un revenu supplément­aire qui n’est peut-être pas aussi élevé que certains le pensent étant donné les coûts de production, affirme Mme Riendeau. Pour nous, c’est important de s’adapter à la demande. »

« On a dû changer la configurat­ion de l’usine pour créer une deuxième chaîne d’emballage. »

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