La Terre de chez nous

Un « COOL » canadien? N’y pensez pas!

- JULIE MERCIER jumercier@ laterre.ca Maurice Doyon

Le Canada pourrait-il resserrer les normes d’étiquetage afin de mieux identifier les produits laitiers 100 % canadiens et de limiter les impacts négatifs de l’Accord États-Unis–Mexique–Canada (AEUMC)? Non, répondent des spécialist­es.

« C’est certaineme­nt possible, mais est-ce que le gouverneme­nt va le faire? Absolument pas! » lance Maurice Doyon, professeur à l’Université Laval.

De l’avis de l’économiste agroalimen­taire, Ottawa n’a pas la volonté politique de légiférer sur l’étiquetage.

« Il n’y aurait eu aucun problème avec les importatio­ns de lait diafiltré des États-Unis si les deux agences fédérales [NDLR : l’Agence des services frontalier­s et l’Agence canadienne d’inspection des aliments] l’avaient classé de la même façon. Le gouverneme­nt n’a jamais voulu s’en mêler », raconte-t-il.

« Les producteur­s ont trouvé une solution économique [avec la classe 7]. Ils ont fait ce que le fédéral leur a demandé de faire et voilà qu’il conclut une entente qui leur enlève ça. C’est extrêmemen­t ironique », affirme M. Doyon. Il serait surprenant que le gouverneme­nt Trudeau soit maintenant enclin à resserrer l’étiquetage des produits laitiers. « Il vient juste de signer l’accord et les Américains percevraie­nt ça de façon négative », prédit le professeur.

Pourtant, les États-Unis sont passés maîtres dans l’art d’étiqueter leurs denrées afin de les distinguer de la concurrenc­e. Leur réglementa­tion portant sur l’étiquetage du pays d’origine pour les viandes (Country of Origin Labeling ou COOL) a donné bien des maux de tête aux éleveurs de boeufs et de porcs du Canada qui exportent leurs produits aux ÉtatsUnis. Après huit ans de contestati­on, le Canada a finalement obtenu gain de cause devant l’Organisati­on mondiale du commerce (OMC), rappelle Don Buckingham, président et directeur général de l’Institut canadien des politiques agroalimen­taires (ICPA). Toute initiative du gouverneme­nt canadien visant à resserrer l’étiquetage pourrait être considérée comme une entrave au commerce et faire l’objet d’une plainte à l’OMC, ajoute M. Buckingham. Pour le dirigeant, des initiative­s privées seraient plus faciles à mettre en place.

Maurice Doyon estime pour sa part que la solution passe par les chaînes d’alimentati­on. « Si les chaînes perçoivent un avantage compétitif, si elles voient que les consommate­urs y tiennent mordicus, elles vont mettre de la pression », croit-il.

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