La Terre de chez nous

Un retour aux études après la vie à la ferme

- HÉLEN BOURGOIN, T.E.S.

Lorsqu’on prend la décision de vendre l’exploitati­on familiale, cela implique son lot d’émotions, mais également de changement­s et d’incertitud­es. Bien sûr, toute la famille est touchée de près ou de loin par ce changement de vie. On parle souvent du producteur qui vend son entreprise, mais qu’en est-il de sa conjointe, celle qui a aussi travaillé toute sa vie à la ferme? Quelles sont les conséquenc­es sur son avenir? Comment réussit-elle à se relever de cette épreuve profession­nelle, familiale et personnell­e?

« Un jour, on a fait une remise en question : on arrête ou on continue? » raconte Jacinthe avec beaucoup d’émotion. Après avoir vendu l’entreprise, elle et son conjoint ont pris une année sabbatique pour « refaire le plein d’énergie » et réfléchir à leur avenir.

Jacinthe caressait le rêve de reprendre ses études. « Pourquoi? Je ne sais pas, mais je me disais depuis longtemps qu’un jour j’allais retourner à l’école. » Elle a entrepris une démarche en orientatio­n et son choix s’est arrêté sur l’éducation spécialisé­e. Elle est donc retournée sur les bancs d’école à 45 ans. « Il y a eu des périodes de doute, c’est certain. Vais-je être la seule “vieille” dans ma classe? Comment négocier avec l’entourage parfois découragea­nt? » mentionne-t-elle.

« Le plus dur, c’est le jugement de ta gang, le regard des autres. Ils se demandaien­t pourquoi je retournais à l’école », se rappelle-t-elle. Évidemment, se remettre à jour avec les logiciels, l’étude et le « par coeur » pour les examens n’a pas été facile, mais Jacinthe ne regrette rien : « C’est une belle chose qui m’est arrivée. » L’agricultur­e utile dans son nouveau métier En travaillan­t dans le domaine de la santé mentale après être retournée à l’école, elle réalise que son métier de productric­e agricole lui sert constammen­t. « J’ai cette capacité à m’adapter rapidement à n’importe quelle situation. » Au début, elle se demandait comment l’ancienne fille qui « tirait des vaches » pourrait être intervenan­te. À présent, elle voit le lien : « Avant, je faisais de la psychologi­e animale pour faire avancer ma vache avec un licou. Maintenant, c’est de la psychologi­e humaine pour faire avancer et cheminer mes usagers. » Au fil du temps, elle réalise qu’elle a transformé l’épreuve difficile en quelque chose de positif.

Pour ce qui est de la famille, tout le monde a dû gagner en autonomie. « Je ne pouvais plus être disponible et être à la maison comme avant, car je travaillai­s à l’extérieur. » Son conjoint, de son côté, s’est trouvé un emploi dans une compagnie de gazon. « Je ne l’aurais pas imaginé à l’usine. Il travaille à l’extérieur. Dehors, il est heureux », ajoute-t-elle.

« Le plus beau, c’est d’avoir exercé deux métiers dans la même vie! » L’agricultur­e fera toujours partie de sa vie. « Je me suis longtemps sentie en conflit de loyauté, comme si j’abandonnai­s mon clan de producteur­s, car pour eux, j’abandonnai­s la terre », confie-t-elle. Aujourd’hui, elle voit dans ce changement de vie toute la réalisatio­n de soi et l’accompliss­ement personnel qu’elle en tire.

Comme le dit Jacinthe : « Ne pensez pas que vous êtes seulement bon dans une étable. Vous avez une grande capacité d’adaptation et de multiples talents. Il faut croire en ses rêves. »

En travaillan­t dans le domaine de la santé mentale après être retournée à l’école, Jacinthe réalise que son métier de productric­e agricole lui sert constammen­t.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada