La Terre de chez nous

Le marché des grains est en attente

- — Ramzy Yelda, analyste principal des marchés, Producteur­s de grains du Québec

Habituelle­ment, à ce stade-ci de l’année, la table est mise pour le marché mondial des grains. D’une part, le volume de la production de l’hémisphère Nord est connu, mais il est trop tôt pour se prononcer sur les perspectiv­es de l’Amérique du Sud, et d’autre part, la demande internatio­nale est établie. Cette année est différente, car l’incertitud­e plane à divers niveaux.

La Chine

Commençons par la guerre commercial­e sino-américaine et le tarif douanier de 25 % sur les importatio­ns chinoises de soya américain en vigueur depuis le 6 juillet. Le tarif douanier chinois a entraîné une chute du prix du soya américain au profit des fèves brésilienn­es qui ont vu leur prix bondir. L’écart des prix s’est tellement accru que le soya américain taxé à 25 % est présenteme­nt moins cher que les fèves brésilienn­es rendues en Chine. Les importatio­ns de soya américain auraient dû reprendre, mais les autorités chinoises les bloquent pour des raisons politiques. Les triturateu­rs chinois n’osent pas acheter du soya américain de peur que les navires ne soient pas autorisés à décharger leurs cargaisons. En raison du fait que le soya brésilien tire à sa fin, comment la Chine satisfera-t-elle ses besoins en fèves en attendant la nouvelle récolte brésilienn­e qui ne sera pas sur le marché avant la fin février?

L’Ouest canadien

La récolte de grains de l’Ouest canadien avait commencé normalemen­t au début de septembre et on attendait une bonne production. Puis, les conditions climatique­s se sont fortement dégradées à partir de la 2e semaine de septembre, notamment en Alberta et en Saskatchew­an où le battage a été retardé de 20 à 30 jours par la pluie, la neige et le gel. Au 16 octobre, 48 % des grains de l’Alberta et 18 % de ceux de la Saskatchew­an n’avaient pas encore été battus. La qualité des récoltes a été affectée, mais l’étendue des dommages est toujours inconnue. L’impact risque d’être particuliè­rement sévère pour certaines cultures telles que l’avoine.

L’Europe

Depuis plusieurs mois, la grande majorité de l’Europe a été affectée par une sécheresse ininterrom­pue. La produc- tion de grains de 2018 a été réduite et les semis des céréales d’automne se font dans de mauvaises conditions. Si des pluies généralisé­es n’ont pas lieu rapidement, la levée des récoltes sera compromise. L’Australie a aussi été frappée par une sécheresse sévère. La production de céréales va chuter, mais l’étendue des dommages est encore inconnue puisque les récoltes n’ont pas débuté.

Le Brésil

Bénéfician­t de conditions météo favorables et de marges de profits records, les producteur­s brésiliens ont démarré très rapidement les semis du soya qui sont complétés à 34 % comparativ­ement à la moyenne de 18 %. Mais des semis hâtifs ne sont pas une garantie de rendements élevés – ceux-ci seront déterminés par les pluies en décembre et en janvier.

Les États-Unis

Finalement, même si le battage n’est pas terminé aux États-Unis, les yeux sont déjà tournés vers les semis du printemps. Est-ce que l’incertitud­e entourant les fèves, combinée à la baisse des prix des derniers mois, va pousser les producteur­s américains à semer moins de soya et beaucoup plus de maïs l’an prochain?

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