La Terre de chez nous

Une résistance à l’urbanisati­on

- ARIANE DESROCHERS adesrocher­s@ laterre.ca

Dans le nord de la ville de Québec, tout près des terres des Soeurs de la Charité acquises par un promoteur immobilier, deux familles d’agriculteu­rs, les Proteau et les Bédard-Blouin résistent à leur façon aux pressions de l’urbanisati­on. Rencontre avec des « Gaulois » de l’agricultur­e en périphérie urbaine.

CHARLESBOU­RG — Les maisons ont eu beau pousser comme des champignon­s tout autour de la petite ferme laitière Omer Proteau, les membres vieillissa­nts de la famille n’ont rien perdu de la déterminat­ion qui coule dans leurs veines d’agriculteu­rs depuis 360 ans. Cela, même si leur terre est menacée de dézonage par l’administra­tion Labeaume. (voir page 19)

Il y a longtemps que les promoteurs immobilier­s ont cessé de frapper à leur porte, car ils savent qu’aucune somme d’argent ne convaincra les propriétai­res de vendre l’héritage agricole qu’ils portent à bout de bras depuis le décès de leur père en 2006. « Ce serait sacrifier toute une histoire pour un peu d’argent qui va passer », souligne Michel, le prêtre de la famille, qui revient de TroisRiviè­res pendant ses congés pour aider à la ferme.

La plupart des sept enfants Proteau habitent sur la même rue. Chaque matin, à 10 h, tous convergent vers la véranda de leur maison natale. Le temps s’arrête pendant cette pause-café. Marie-Hélène, dont la bonne humeur est contagieus­e, fait réchauffer des galettes qu’elle sert à ses frères et soeurs. Elle est en quelque sorte le pilier de la ferme avec son frère André. Lui s’occupe des vaches et elle, des poules.

« On va continuer à faire tourner la roue aussi longtemps qu’il n’y aura pas de bâtons dedans », insiste l’opérateur de machinerie lourde à la retraite qui a secondé son père toute sa vie. Parmi les contrainte­s qui leur ont été imposées, il y a eu l’augmentati­on de 640 % de la valeur de la ferme en 2013 en raison des transactio­ns immobilièr­es dans le secteur. Le compte de taxes municipale­s a été majoré en conséquenc­e, mais les agriculteu­rs ont tenu le coup.

Pas de relève possible

Le récent décès de Charles, l’aîné de la famille, à l’âge de 76 ans, a aussi secoué le reste du clan. « On a perdu un gros poteau. C’était notre homme de confiance », affirment les Proteau au sujet de leur frère mécanicien. Conscients de la fragilité de l’existence, ils continuent néanmoins d’avancer sans chercher à trouver une relève potentiell­e. « La terre n’est pas assez grande pour faire vivre une autre famille », explique André. C’est faute de moyens pour payer une nouvelle ressource à la ferme que ce dernier préfère ne pas trop songer à l’avenir.

Même si l’exploitati­on est située en zone verte, la menace d’un éventuel dézonage plane au-dessus d’elle. « Je ne le verrai peut-être pas, le développem­ent [immobilier], mais l’avenir est incertain. On ne peut pas faire de projets », se désole le producteur. « On vieillit et la ville avance, complète son frère Michel. L’histoire va nous dire quoi faire. »

 ??  ?? À 10 h, les frères et soeurs de la famille Proteau se réunissent pour une pause-café dans la bonne humeur.
À 10 h, les frères et soeurs de la famille Proteau se réunissent pour une pause-café dans la bonne humeur.
 ??  ?? Marie-Hélène et André Proteau représente­nt les piliers de la ferme familiale établie à Québec depuis 360 ans.
Marie-Hélène et André Proteau représente­nt les piliers de la ferme familiale établie à Québec depuis 360 ans.
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