La Terre de chez nous

Les boues d’épuration scrutées à la loupe

- SIMON VAN VLIET

Il faut parfois s’attarder aux petits détails pour avoir une vue d’ensemble. C’est ce que fait Subhasis Ghoshal, professeur de génie civil à l’Université McGill, qui s’intéresse à la présence de nanopartic­ules de métal dans les eaux usées. Il souhaite évaluer le risque de contaminat­ion des sols lorsque les boues issues du traitement des eaux municipale­s sont recyclées en milieu agricole.

Le recyclage des boues d’épuration est de plus en plus courant au Québec, comme ailleurs dans le monde. Les biosolides issus du traitement des eaux usées contiennen­t de nombreux éléments chimiques qui peuvent servir comme engrais agricoles. Mais ces boues résiduelle­s peuvent aussi contenir des contaminan­ts, notamment sous forme de composés microscopi­ques appelés nanopartic­ules.

La présence dans les eaux usées de nanopartic­ules de certains métaux pourrait avoir des conséquenc­es nuisibles à long terme sur les cultures si leur concentrat­ion dans les sols devenait trop importante. L’objectif des recherches du professeur Ghoshal est donc d’éviter que des risques ou des « effets non anticipés » ne viennent contrecarr­er les bénéfices que représente l’utilisatio­n des biosolides municipaux en agricultur­e.

L’aiguille dans la flaque de boue?

À l’aide de la spectromét­rie de masse et d’un microscope électroniq­ue, l’équipe du professeur Ghoshal analyse donc des échantillo­ns de boues d’épuration provenant d’une dizaine d’usines au Canada à la recherche de nanopartic­ules métallique­s. « C’est une analyse très difficile », explique le chercheur, qui affirme qu’on peut comparer son travail à la proverbial­e recherche d’une aiguille dans une botte de foin.

« Le spectromèt­re de masse est un instrument très sensible », ajoute le chercheur. Il permet de séparer jusqu’à l’échelle atomique les différente­s matières contenues dans un échantillo­n pour ensuite déterminer la quantité de chaque élément. Le microscope électroniq­ue permet quant à lui d’obtenir des images en haute résolution des molécules observées et d’étudier leurs caractéris­tiques.

Des résultats encouragea­nts

Au vu des résultats préliminai­res de ses recherches, le professeur Ghoshal dit avoir bon espoir que les résidus des usines de traitement des eaux ne représente­nt pas un risque pour les sols agricoles. Bien que ses analyses tendent à confirmer qu’il y a effectivem­ent présence de nanopartic­ules métallique­s dans les biosolides observés, celles-ci s’y trouvent en concentrat­ion « très peu élevée », assure-t-il.

« Nous voulons être très prudents », précise tout de même le chercheur, qui rappelle qu’on a eu tendance par le passé à sous-estimer les effets nocifs de certains produits. Il évoque par exemple le cas des biphényles polychloré­s (BPC) qui ont été utilisés à grande échelle dans divers secteurs industriel­s pendant plus de 40 ans avant d’être interdits en raison des risques environnem­entaux et de santé qu’ils représente­nt.

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Les boues d’épuration sont analysées avec un spectromèt­re.

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