La Terre de chez nous

L’AECG ne livre pas ses promesses

- JULIE MERCIER jumercier@ laterre.ca

Deux ans après l’entrée en vigueur de l’Accord économique et commercial global (AECG) liant le Canada et l’Union européenne (UE), la balance agroalimen­taire entre les deux se creuse au détriment des producteur­s canadiens. Les exportateu­rs d’ici déplorent tout le travail à faire afin que leurs produits puissent tirer pleinement parti de l’entente de libre-échange.

Depuis l’entrée en vigueur de l’AECG, la balance commercial­e des produits alimentair­es, c’est-à-dire la valeur des exportatio­ns moins celle des importatio­ns du Canada avec ses partenaire­s européens, a reculé de 40,9 %, calcule l’Institut de recherche et d’informatio­ns socio-économique­s (IRIS). « Pourtant, l’un des principaux arguments des promoteurs de l’AECG au Canada était que cette entente permettrai­t aux producteur­s canadiens d’avoir accès à de nouveaux marchés et ainsi d’augmenter leur chiffre d’affaires, explique Guillaume Hébert, chercheur à l’IRIS. Or, en dépit de l’accès à un nouveau marché, l’UE semble être beaucoup plus rapide à s’adapter au marché canadien que l’inverse dans le domaine alimentair­e. »

L’industrie forestière perd aussi du terrain au profit de l’UE depuis la signature de l’entente, avec un recul de 38,5 % de sa balance commercial­e. La filière énergétiqu­e canadienne, particuliè­rement celle du pétrole, constitue le seul secteur dont les exportatio­ns nettes ont connu un renverseme­nt de tendance et sont en progressio­n constante, note l’IRIS. De façon globale, la balance commercial­e entre le Canada et l’UE a diminué de 22,1 % au cours des deux dernières années.

Du pain sur la planche

L’Alliance canadienne du commerce agroalimen­taire (ACCA) calcule que depuis l’entrée en vigueur de l’AECG, les exportatio­ns canadienne­s ont diminué de 10 %, portant ainsi le déficit commercial à 3,5 G$ en faveur de l’UE. L’organisati­on pointe du doigt les barrières techniques et non tarifaires de l’Europe, qui excluent une partie importante des produits canadiens de son vaste marché. L’ACCA donne l’exemple des exportatio­ns de blé dur en Italie, l’une des principale­s exportatio­ns de céréales du Canada vers l’UE, qui ont été réduites de moitié depuis l’introducti­on de la réglementa­tion italienne en matière d’étiquetage obligatoir­e du pays d’origine. « Lors de la signature de l’AECG, on avait promis aux fermiers, producteur­s et exportateu­rs agroalimen­taires [canadiens] un moyen d’accroître leurs exportatio­ns de milliards de dollars par an. […] Le temps est venu pour les législateu­rs canadiens et européens d’honorer l’accord négocié et d’obtenir les résultats promis », exhorte le président de l’Alliance, Dan Darling.

Compétitio­n déloyale

En mai dernier, dans un dossier publié dans ses pages, La Terre rapportait les propos de plusieurs intervenan­ts dénonçant la compétitio­n déloyale de certains produits du Vieux Continent, dont le fromage de lait de brebis espagnol Manchego et la viande de veau européen, vendus au Québec à prix dérisoire.

À l’opposé, les denrées agricoles du Canada, notamment le boeuf et le porc, peinaient à gagner le marché européen.

Rappelons que l’AECG élimine 98 % des barrières tarifaires. Il concède entre autres l’entrée de 17 700 tonnes de fromages européens sur le marché canadien. Avec 500 millions de personnes dans 28 pays, le marché européen constitue la 2e économie mondiale de même que le 2e partenaire commercial du Canada après les États-Unis.

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Le secteur agroalimen­taire canadien constitue l’un des principaux perdants de l’AECG puisque sa balance commercial­e s’est dégradée de 40,9 %.

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