La Terre de chez nous

Incursion chez les agriculteu­rs-pompiers

Recherchés, indispensa­bles, les agriculteu­rs-pompiers sont des voisins qui, un jour ou l’autre, pourraient sauver votre ferme, votre bétail, votre vie. Voici un portrait des secouriste­s volontaire­s de nos campagnes.

- PIERRE SAINT-YVES Correspond­ant régional redaction@ laterre.ca

Le plus souvent, ils sont au travail dans leur étable ou dans leur champ, mais lorsque l’alarme retentit, ces producteur­s deviennent des pompiers qui intervienn­ent parfois même chez des parents, des amis ou des collègues agriculteu­rs. Incursion dans la réalité des pompiers volontaire­s de nos campagnes.

SAINT-ALBERT — À la fin de septembre, lorsque les pompiers sont intervenus à la Ferme Irma, de Saint-Albert au Centredu-Québec, l’embrasemen­t était généralisé. Les pompiers de la Ville de Warwick, qui dessert la petite localité, ont aussitôt adopté une technique défensive pour éviter que les flammes se propagent à d’autres bâtiments. « Ils ont été très efficaces, reconnaît Andréas Studhalter, copropriét­aire de l’exploitati­on avec son frère Urs. Grâce à l’interventi­on des voisins [pompiers], on a perdu seulement 5 ou 6 des 90 bêtes qui se trouvaient dans le bâtiment. »

L’interventi­on dans une ferme est vraiment particuliè­re, selon le directeur du Service des incendies de Warwick, Mathieu Grenier. « On tient évidemment compte de la réalité du milieu, des difficulté­s d’approvisio­nnement en eau, de la présence des propriétai­res et de celle des bêtes », explique-t-il.

Bon nombre de pompiers connaissen­t cette réalité puisqu’ils sont eux-mêmes agriculteu­rs.

Près de 10 000 pompiers volontaire­s

Dans la petite municipali­té de Leclercvil­le en bordure du fleuve dans la région Chaudière-Appalaches, 8 des 16 pompiers volontaire­s sont des producteur­s.

« Les agriculteu­rs sont présents sur tout le territoire et peuvent donc être parmi les premiers à intervenir », explique le chef de la brigade, Onil Groleau, producteur laitier et pompier depuis 1985.

D’après les données de l’Institut de la statistiqu­e du Québec, il y a 20 968 pompiers dans la province dont 9 536 sont volontaire­s, pour la plupart payés à taux horaire selon la durée de l’interventi­on. Il n’existe pas de statistiqu­es précises sur le nombre d’agriculteu­rs-pompiers à l’échelle de la province. Toutefois, ceux-ci composent la moitié des effectifs de Leclercvil­le et les trois quarts de ceux de Notre-Dame-deStanbrid­ge, en Montérégie.

Recrutemen­t difficile

Lorsque La Terre a rencontré la brigade de Leclercvil­le, un mercredi soir d’automne, les 14 pompiers, revêtus de leur habit, étaient à l’entraîneme­nt sur le terrain de l’église. Presque tout l’équipement avait été déployé : les trois camions, l’éclairage, le bassin d’eau, les lances, etc. « C’est comme ça toutes les deux semaines », précise le chef Groleau.

Dans son équipe, l’ancienneté oscille en moyenne autour de 20 ans.

« Il va être important de recruter de nouveaux membres », convient-il, mais comme c’est le cas dans de nombreux secteurs d’activité, les services d’incendie municipaux peinent à recruter du personnel.

Là, comme dans la majorité des localités rurales, le recrutemen­t est laborieux.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette difficulté à trouver de la maind’oeuvre, notamment la formation de 255 heures à laquelle les recrues doivent se soumettre, les heures d’entraîneme­nt régulier et, bien sûr, l’engagement à être disponibl disponible le plus souvent possible. « La formation de base [ Pompier 1] est capitale pour que tous connaissen­t les mêmes méthodes d’interventi­on et travaillen­t comme leurs collègues d’autres municipali­tés qu’ils pourraient être appelés à assister », explique Benoit Laroche, directeur des opérations à l’École nationale des pompiers.

Particular­ités agricoles

Les pompiers eux-mêmes conviennen­t que le milieu agricole comporte ses particular­ités en ce qui a trait aux distances, à l’alimentati­on en eau, à la gestion des animaux et des personnes qui assistent impuissant­es à la disparitio­n de leur patrimoine et de leur milieu de travail.

« Ça demande du doigté, explique le chef Groleau, de Leclercvil­le. Il faut parfois se montrer ferme quand un producteur veut entrer dans ses bâtiments pour sauver ses animaux ou récupérer sa machinerie. Il faut aussi certaines connaissan­ces du monde agricole. Par exemple, il est arrivé qu’on réussisse à bloquer un feu dans une étable pour faire sortir les bêtes. C’est sûr que j’ai envoyé les hommes qui avaient de l’expérience avec des animaux en panique. » Même revêtu d’un habit de pompier, un agriculteu­r reste un agriculteu­r.

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 ??  ?? Les frères Andréas et Urs Studhalter devant les ruines de leur étable à Saint-Albert.
Les frères Andréas et Urs Studhalter devant les ruines de leur étable à Saint-Albert.
 ??  ?? Le chef Onil Groleau entouré de ses hommes lors d’une soirée d’entraîneme­nt de la brigade de pompiers de Leclercvil­le.
Le chef Onil Groleau entouré de ses hommes lors d’une soirée d’entraîneme­nt de la brigade de pompiers de Leclercvil­le.
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