La Terre de chez nous

Exportatio­ns vers la Chine : prudence

- JOSIANNE DESJARDINS jdesjardin­s@laterre.ca

Les conflits commerciau­x entre les États-Unis et la Chine risquent d’être des « perturbate­urs permanents » plutôt que de réelles occasions d’affaires pour les exportateu­rs agricoles d’ici, estime l’économiste Zhan Su, professeur titulaire de stratégie et de gestion internatio­nale à l’Université Laval.

« Il faut montrer notre indispensa­bilité et ne pas avoir une dépendance absolue envers ce marché-là [la Chine]. C’est vraiment l’idéal », recommande l’expert, qui a donné une conférence intitulée Qui nourrira les Chinois aujourd’hui et demain? en marge du Congrès de l’Union des producteur­s agricoles (UPA), en décembre.

L’événement organisé par l’Associatio­n des communicat­eurs et rédacteurs de l’agroalimen­taire (ACRA) tombait à point, alors que de nombreux éleveurs porcins et bovins ont été durement touchés par l’arrêt des exportatio­ns de leur viande en territoire chinois jusqu’en novembre. À l’heure actuelle, les exportateu­rs de canola sont d’ailleurs toujours concernés par cette interdicti­on. « La Chine devient le plus grand marché du monde. Il faut y aller, mais être prudent », avertit M. Su, qui a quitté ce pays dans les années 1980.

S’il n’y a pas de recette miracle pour faire face à l’imprévisib­ilité des autorités chinoises, l’économiste croit que les producteur­s ont tout intérêt à diversifie­r leurs marchés. Par ailleurs, il a donné un conseil au gouverneme­nt Trudeau : celui d’avoir le moins de tensions politiques possible avec la Chine.

Pendant la suspension des exportatio­ns de porc vers ce pays, qui a duré quatre mois, le Canada « a été paniqué, car on est très dépendants. Mais finalement, ça a été réglé à l’amiable », analyse M. Su. Rappelons qu’en 2018, la valeur des exportatio­ns de porc québécois à destinatio­n de l’Empire du Milieu s’est chiffrée à plus de 280 M$. Et seulement pendant la période d’arrêt, en 2019, les Éleveurs de porcs du Québec estiment à environ 119 M$ les pertes encourues.

De grands besoins

Afin de combattre l’insécurité alimentair­e et de viser l’autosuffis­ance en céréales, le gouverneme­nt chinois a placé quelque 120 millions d’hectares de ses terres agricoles sous protection permanente, indique M. Su. Mais au-delà de cette mesure, la productivi­té de l’agricultur­e chinoise n’est pas optimale, les technologi­es étant sous-développée­s et les techniques d’irrigation inefficace­s, indique l’économiste.

De plus, la plupart des exploitati­ons familiales sont de petite taille. Elles comptent en moyenne moins d’un hectare (0,6 ha) en culture. Néanmoins, les coûts de production demeurent élevés et cela entraîne une compétitiv­ité défavorabl­e entre la valeur des produits locaux et ceux qui sont importés en Chine. Ce qu’il faut retenir finalement, selon M. Su, c’est que la Chine a de grands besoins alimentair­es à combler, surtout si l’on considère qu’elle doit nourrir plus de 18 % de la population mondiale sur 8,5 % de la surface arable du globe.

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L’économiste Zhan Su

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