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Le parcours de Kloé pour se sortir de la violence conjugale à la ferme

- Des ressources à connaître SOS violence conjugale : 1 800 363-9010 Maisons pour femmes victimes de violence conjugale : maisons-femmes.qc.ca

Kloé a vécu quelques mois avec un producteur laitier. Pourtant, cette courte période lui a paru une éternité et a contribué à détruire son estime d’ellemême. Le rêve de cette femme dans la jeune vingtaine de vivre à la ferme s’est rapidement transformé en cauchemar.

Rabaissée, humiliée et dévalorisé­e par son conjoint, Kloé a vécu une relation où régnait la violence psychologi­que, celle qui blesse très profondéme­nt, même si les traces ne sont pas visibles. Elle nous a confié son histoire dans l’espoir d’aider d’autres femmes à reconnaîtr­e et à refuser toute forme de violence.

Pour guérir de sa relation toxique, Kloé admet n’avoir eu d’autre choix que de consulter une intervenan­te spécialisé­e en violence faite aux femmes. Avec l’aide de cette profession­nelle, elle a réussi à mettre des mots sur son vécu. Kloé précise qu’elle n’a pas subi de violence physique, mais que certains mots et comporteme­nts de son ex-conjoint lui ont fait terribleme­nt mal. Par exemple, elle dit qu’il touchait à ses « bourrelets » juste pour se moquer de son apparence. « Il était agressif, mais je n’étais pas consciente que c’était de la violence. Il était mon premier chum sérieux, le premier avec qui je vivais en couple. Alors dans ma tête, c’était normal », explique-t-elle.

L’isolement s’installe

Il a également fait le vide autour de Kloé pour mieux la contrôler. Il l’empêchait de voir ses amies en disant que celles-ci n’étaient pas bonnes pour elle et que sa priorité devait être la ferme. Il l’isolait ainsi de son réseau. « Si je voulais aller voir une amie, il me disait que je devais aider à la ferme », poursuit-elle.

Par contre, lorsqu’elle le faisait, son conjoint la dépréciait toujours. Kloé ne s’est jamais sentie à la hauteur et avait l’impression qu’il pouvait disposer d’elle à sa guise. « J’étais obligée de travailler à la ferme, sinon j’étais une moins-querien pour cet homme. Dans la maison, je faisais le ménage, le lavage, les repas et je payais tout, sauf l’hypothèque, puisqu’il s’agissait de la maison de la ferme. »

Malgré cela, elle ajoute qu’elle n’était pas assez travaillan­te pour lui. « Mes diplômes, il s’en foutait. Seul le travail physique comptait. Quand on faisait les foins et que j’étais épuisée, il m’empêchait d’arrêter en disant que c’était pour mon bien, que ça allait me mettre en forme », mentionne la femme, qui ne vit plus d’agricultur­e. Forcer sa conjointe à travailler au-delà de ses forces relève de la violence économique.

La rupture

Elle se remémore avec émotion qu’un soir, après le train, il a décidé de la mettre à la porte, que c’était fini. « J’avais eu un accrochage avec sa mère et il m’a demandé : “À quoi ça sert d’avoir une blonde si mes parents ne l’aiment pas?” À ça, je n’ai pas su quoi répondre. »

Outre les dévalorisa­tions répétées, Kloé a subi des menaces à divers degrés au cours de sa relation. Elle a même eu besoin d’aide pour récupérer ses affaires laissées dans la maison familiale. « J’avais tellement peur après la rupture qu’il a fallu que j’appelle la police », confie-t-elle tristement.

Kloé apprend à s’en sortir graduellem­ent grâce à l’aide d’intervenan­tes qui prennent le temps de l’écouter. Elle réalise toute la violence qu’elle a subie et met en place des stratégies pour mieux se sentir. À présent, elle apprend à se choisir et à regagner confiance en elle.

« J’étais obligée de travailler à la ferme parce que j’étais une moins-querien pour cet homme. »

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Travailleu­se de rang dans le Centre-du-Québec
GINETTE LAFLEUR
Doctorante en psychologi­e communauta­ire à l’UQAM
HÉLEN BOURGOIN, T.E.S. Travailleu­se de rang dans le Centre-du-Québec GINETTE LAFLEUR Doctorante en psychologi­e communauta­ire à l’UQAM
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