Des travailleurs saisonniers impatients de venir au Québec
Les producteurs qui attendent la main-d’oeuvre étrangère ne sont pas les seuls à mal dormir la nuit. Des milliers de Mexicains et de Guatémaltèques ignoraient encore la semaine dernière à quel moment ils recevraient la confirmation de leur départ vers le
« Certains travailleurs étaient déjà à l’aéroport, prêts à voyager le jour où le Canada a fermé ses frontières. On les a retournés chez eux », a raconté, depuis le Mexique, Anjel Palma, l’un des 16 000 travailleurs étrangers temporaires qui sont embauchés chaque année dans la filière agroalimentaire au Québec. Dans son village, Santa Maria Jajalpa, en périphérie de Mexico, ils sont une cinquantaine à avoir obtenu un contrat de travail dans différentes provinces canadiennes via une agence. Anjel, lui, devait travailler au Centre du Jardin Deux-Montagnes. Cette année allait être sa troisième expérience au Canada.
« Les autres et moi sommes censés partir en avril, mais on n’a pas de date. L’agence nous dit qu’en raison de la situation à la frontière, les démarches sont suspendues. Il y a beaucoup d’incertitude au village, a expliqué ce père de cinq enfants qui est producteur maraîcher dans son pays. C’est dommage, car j’aimerais vraiment pouvoir venir au Canada. On m’a toujours bien traité et les gens sont très chaleureux. »
« On est prêts! »
Travailleur saisonnier aux Jardins Vegibec à Oka depuis 14 ans, Mario Arreaga a aussi vu son départ être repoussé. « Le vol était prévu pour le 7 ou le 8 avril, mais le gouvernement nous dit qu’on aura une réponse le 13 avril. C’est inquiétant de ne pas savoir ce qui s’en vient », a-t-il confié à La Terre la semaine dernière.
Cet agriculteur joint chez lui à Tacana, dans le département rural de San Marcos au Guatemala, n’a pas caché son impatience de pouvoir voyager au Québec afin de mettre la main à la pâte. « Je reste en contact avec les autres travailleurs saisonniers de l’entreprise et ils veulent tous venir. On est prêts! » À San Martin Toxpalan, dans l’État d’Oaxaca, au Mexique, les sentiments sont également partagés entre inquiétude et impatience, a témoigné Candido Garcia, qui devait travailler pendant un an chez Services alimentaires Gordon de Boucherville, à compter d’avril. « Nous sommes une cinquantaine à attendre. L’agence de placement nous dit qu’elle fait tout en son possible pour nous aider, mais c’est une décision qui dépend des gouvernements. »
Entre-temps, Candido Garcia termine sa récolte de chayotes, une plante de la famille des cucurbitacées.
Nécessité économique
Tous les trois sont bien au fait de la situation particulière causée par la pandémie au Canada. N’empêche, rester chez eux aurait des répercussions économiques très lourdes pour leurs familles. « J’ai deux enfants de 17 et 15 ans qui vont à l’école du village. Il faut payer leur uniforme, leur matériel et leur pension. Sans mon emploi au Canada, je serais obligé de les retirer », s’est désolé Mario Arreaga.
Pandémie ou pas, Candido Garcia doit partir à l’étranger s’il veut améliorer son sort. Le taux horaire qu’offrent les entreprises canadiennes représente ce qu’un agriculteur mexicain gagne en une journée. « C’est difficile de vivre de notre terre de nos jours. Le coût des intrants a presque doublé ces dernières années et nos familles dépendent de nous. En allant au Canada, je peux gagner le nécessaire pour donner un meilleur avenir à mon enfant de 3 ans. »