La Terre de chez nous

Un détecteur de gaz lui aurait sauvé la vie

- JOSIANNE DESJARDINS jdesjardin­s@ laterre.ca @josianne.desjardins.98

Ventiler le silo à l’aide du souffleur à fourrage n’était pas suffisant pour permettre l’entrée sécuritair­e du jeune producteur Nicholas Lanciaux, mort intoxiqué par les gaz qui s’étaient accumulés dans cet espace clos, le 27 juillet dernier, à la Ferme Melga de Dixville, en Estrie.

C’est ce que conclut la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) dans son rapport, rappelant du même coup que seule la détection des gaz O , CO , NO et NO permet de 2 2 2 vérifier si la ventilatio­n est efficace et si l’atmosphère est sécuritair­e dans les silos.

Le jour de l’accident, M. Lanciaux devait niveler l’ensilage du silo à l’aide d’une fourche pour installer une toile et des boudins. Il est donc monté à une hauteur d’environ 21 mètres du sol par l’échelle située dans la chute du silo pour ouvrir une porte menant à l’intérieur. Son collègue, qui l’attendait en bas, l’a entendu prendre une ou deux grandes inspiratio­ns et il l’a ensuite vu tomber au sol. Les secours ont été appelés et la victime a été transporté­e à l’hôpital, où son décès a été confirmé.

À la suite de l’accident, la CNESST a interdit l’accès à l’intérieur des silos et des chutes de silos de la Ferme Melga. Une procédure d’entrée en espace clos a été exigée avant que le travail ne puisse reprendre. L’employeur a également mandaté une firme spécialisé­e afin de poursuivre les travaux en espace clos nécessaire­s au bon fonctionne­ment de la ferme.

Avoir un détecteur, « c’est vraiment la base »

L’inspecteur de la CNESST en Estrie, Sylvain Roy, est catégoriqu­e : il est impératif de détecter les gaz même si l’espace clos a été ventilé. « C’est vraiment la base », dit-il sans détour. Mais malheureus­ement, encore trop peu de producteur­s possèdent un détecteur, qui est pourtant obligatoir­e pour respecter la procédure complète d’entrée en espaces clos. C’est ce que l’inspecteur a pu constater lors des ateliers de prévention qui ont été organisés dans sa région cet automne. « On pense que quelques personnes ont commencé à s’équiper d’un détecteur de gaz. Mais le nombre est probableme­nt très minime. C’est encore loin d’être universel », affirme-t-il.

De plus, M. Roy estime qu’il y a encore une perception tenace dans le milieu agricole, selon laquelle ventiler les lieux suffit. Cela n’a plus lieu d’être, réitère-t-il, car visiblemen­t, Nicholas Lanciaux avait ventilé le silo de 30 à 60 minutes avant les travaux et il y a tout de même laissé sa peau. Le silo était rempli à 70 % de luzerne et l’espace libre était trop grand pour que la ventilatio­n soit efficace, précise l’inspecteur.

L’automne dernier, le père de Nicholas, Gilles Lanciaux, s’était confié à La Terre sur les nombreux témoignage­s de victimes silencieus­es des gaz de silo qu’il avait reçus lors des funéraille­s de son fils. « Tout le monde, à un moment donné ou un autre, a connu des épisodes comme ça [d’intoxicati­on subie par eux-mêmes ou par leur entourage]. La marge entre y rester ou s’en sortir est mince », avait-il dit.

« On a tellement peu de jeunes bons agriculteu­rs. S’il faut qu’on les perde comme ça! […] Nicholas, c’était mon fils, mon partenaire de travail pis mon chum », avait soufflé le père, la voix cassée.

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Les gaz asphyxiant­s ont provoqué la perte de conscience de Nicholas Lanciaux, qui a fait une chute mortelle en bas du silo.
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Sylvain Roy
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