La Terre de chez nous

L’éthanol au temps de la COVID-19

- — Étienne Lafrance, agent d’informatio­n sur les marchés, Producteur­s de grains du Québec

La pandémie de COVID-19 secoue toute la filière du maïs et de l’éthanol à l’échelle de l’Amérique du Nord.

Aux États-Unis, la production d’éthanol représente un des grands utilisateu­rs de maïs. Pour l’année de récolte 2018-2019, l’éthanol s’est accaparé près de 38 % de toute la récolte de maïs, révèlent les chiffres du départemen­t de l’Agricultur­e des États-Unis (USDA).

En vertu de la réglementa­tion de l’Agence de la protection de l’environnem­ent aux États-Unis (EPA), ce biocarbura­nt est ajouté à l’essence. Or, en raison de la pandémie de COVID-19, la demande de pétrole brut a chuté de 30 %, provoquant un effondreme­nt des besoins en éthanol. Les prix en Bourse se sont inclinés de 70 % pour le baril de pétrole brut et de 37 % pour l’éthanol, les situant à leur plus bas niveau depuis 1999 et 2005, respective­ment.

La baisse de la demande a fortement ébranlé l’industrie des biocarbura­nts, un secteur déjà fragilisé par les exemptions de mélanger l’éthanol à l’essence accordées par l’administra­tion Trump à de nombreuses raffinerie­s. Des usines de fabricatio­n d’éthanol aux États-Unis et au Canada ont ralenti, voire complèteme­nt arrêté leurs activités. Selon l’Agence américaine d’informatio­n de l’énergie, la production d’éthanol a fléchi de 47 % depuis le début de mars, atteignant ainsi un creux historique. À l’opposé, les stocks se sont accrus de 11 %, un sommet pour le biocarbura­nt.

Pour 2019-2020, l’USDA a d’ailleurs diminué de 350 millions de boisseaux son estimation de la consommati­on de maïs pour l’éthanol. Le ralentisse­ment de la production d’éthanol amène plusieurs impacts indirects sur le secteur agroalimen­taire. D’une part, la production du dioxyde de carbone, un sous-produit de la fabricatio­n d’éthanol, a chuté d’au moins 20 %. Ce gaz est utilisé dans les boissons pétillante­s ainsi qu’en tant qu’agent de refroidiss­ement dans les usines de transforma­tion de viande. D’autre part, la drêche de maïs, sous-produit de l’éthanol, a cédé sa

place au tourteau de soya dans les recettes de moulées pour animaux.

De façon générale, toute la demande en grains demeure sous pression en raison de la COVID-19. Les fermetures d’usine de transforma­tion de viande due à la pandémie se multiplien­t, tant au Canada qu'aux États-Unis. Cela devrait invariable­ment se répercuter sur le secteur de l’élevage et donc sur sa demande en grains. Toutefois, il est encore trop tôt pour en évaluer l’impact.

Newspapers in French

Newspapers from Canada